Confessions et apprentissage [entrainement ]

La lune luisait haut dans le ciel. Solis soupira.
Suite à sa rencontre désastreuse avec un membre de Blue Pegasus qui l'avait attaqué, Solis avait voulu rentrer chez lui. Cependant, les forces de l'ordre n'ayant pas retrouvé le responsable de l'attentat, les agents avaient fermé la gare. Et puisqu'il était trop tard pour prendre une charette, Solis avait été obligé de rester à Clover. Il avait loué une petite chambre pour la nuit, dans une auberge tout à fait correcte. Suite à un bain brûlant, il s'était alors mis au lit avec la ferme intention de bien dormir. Il avait toutefois été incapable de trouver le sommeil. Il était alors sortit, quittant la ville pour aller se promener à travers champs.
Il s'assit au sommet d'une petite colline. L'herbe verte et tendre était doucement agitée par un filet de vent nocturne. Solis regarda le ciel, et admira les étoiles. Il retrouva chaque constellation, dont certaines, aujourd'hui, étaient devenues ses alliées. Il eut soudain envie de compagnie. Il saisit une clé d'or qui pendait à sa ceinture.

"Ouvre toi, porte du bélier, Aries..."

La jeune fille apparut. Elle le regarda de manière hésitante, ne sachant trop que faire, ne voyant ni ennemi ni tâche que puisse nécessiter son renfort. Solis tapota l'herbe à côté de lui.

"Ce n'est rien. Je voulais juste parler. A moins que tu ais quelque chose d'autre à faire bien sûr..."
"N...Non..."
Elle s'assit à son tour.
"Je suis désolé de n'avoir pas été d'un plus grand secours cet après midi..."
Elle sursauta.
"N...Non... c'est moi qui n'ais pas pu..."
"J'aurais dû pouvoir t'aider à l'affronter"
Une flamme s'alluma dans les yeux de l'esprit.
"Il paiera. Il paiera pour Aquila. Et je lui ferais avaler son côté phalocrate..."
Solis sourit.
"C'est rare de te voir aussi véhémente..."
Elle rosit.
"Je... je suis désolée..."
"Ne t'excuse pas. Les émotions violentes font partie de notre lot quotidien. Je regrette juste de ne avoir pu combattre à tes côtés."
"Je lutte pour mon propriétaire. C'est ce qui fait mon honneur et ma fierté."
"Et que ferais je si tu es blessée ou submergée? Il faut que je puisse me battre aussi. Je ne souhaites pas te voler tes ennemis, ni devenir un grand combattant. Il faudrait juste que je puisse au moins frapper si c'est vital, pour toi comme pour moi."
Elle réfléchit un instant.
"Vous êtes limité par votre force physique... Oh désolée..."
"Cesse de t'excuser, c'est inutile. C'est un fait. Je suis incapable de me battre uniquement avec mon corps, comme certains mages le font."
"Avez vous demandé conseil à un armurier?"
"Ne me vouvois pas non plus... Oui j'ai demandé, mais ma condition physique m'interdit les armes lourdes comme les masses et les marteaux..."
"Et pourquoi pas une épée à une main ou une simple dague?"
"Je ne souhaites pas ôter la vie. De la même façon que Crater refuse que lui fasse rendre la vie à quelqu'un, je ne peux me résoudre à lui enlever."
Aries resta silencieuse. Elle évitait toujours de regarder Solis dans les yeux, mais au moins parlait elle avec moins de craintes. Elle se redressa soudain.
"Auriez vous la force de me rappeler une nouvelle fois?"
"Je ne sais pas... Je pense que oui... Dans le cas contraire, je pense que je m'évanouirais simplement. Pourquoi?"
"Rappelez moi dans environ un quart de vos heures."
Elle se dissipa.
"Arrêtes de me vouvoyer..."

Il patienta ainsi un certain temps, puis estimant que le quart d'heure avait dû passer, tendit la clé devant lui, curieux de voir ce qu'Aries avait pu faire durant ce temps.

"Ouvre toi, porte du bélier. Aries."

L'esprit réapparut devant lui, un ballot de chiffon entre les mains.
"J'ai cru que je ne le retrouverait pas..."
Elle déballa des chiffons deux lames. Chacune avait la forme de demi ellipse. Au centre de la lame se trouvait une poignée recouverte de fils de cuir mauve.
"Qu'est ce que c'est?"
"Ce sont des lames que vous pourriez utiliser... Il vous suffit de les tenir par la poignée, puis de pivoter. L'angle et la manière dont vous tenez les lames vous permet de blesser, sans tuer, à moins que vous ne visiez la gorge..."
Solis se saisit des lames, se coupant par la même occasion.
"Je suis désolée! Elles sont très affûtées..."
"Où les as tu obtenues? Elles sont superbes..."
Aries prit une teinte pivoine.
"C'est... c'est un cadeau de Leo... Il me les avait offertes il y a très longtemps... C'est aussi pour ça que les poignées sont mauves..."
Solis lui tendit les lames.
"Je ne peux pas accepter. C'est un cadeau que l'on t'a offert, je ne peux pas te le prendre."
Aries se rassit, et se tourna vers lui, évitant toujours soigneusement son regard.
"Cela... cela me ferait plaisir. Je vous saurais en sécurité..."
Solis lui sourit.
"Et Leo?"
Elle rosit.
"Il comprendra..."

"Quand l'as tu vu pour la dernière fois?"
"Nous nous sommes battus... Ma précédente propriéraire me..."
Solis retint son souffle.
"Elle me battait."
Solis sentit une rage brûlante déferler en lui. Il savait maintenant. Il comprenait tout des silences d'Aries, de ses peurs.
"Mais Leo est intervenu. Il s'est imposé à notre propriétaire pour qu'elle ne puisse plus invoquer d'esprits. Il voulait qu'elle nous libère, lui et moi. Elle a tenu. Lorsqu'elle a commencé à manquer d'argent, elle a voulu faire une mission, même diminuée. Mais lorsqu'elle a voulu m'appeler, je n'ai pas pu émerger. Elle s'est effondrée, incapable de réagir. Et son adversaire l'a tuée. Ma clé a été dérobée à cette occasion."
Solis ne savait plus comment réagir. Cet esprit qui était resté muet si longtemps...
"J'ai dû conclure un pacte avec sa meurtrière, elle aussi une mage céleste. J'ai appris que Leo avait été banni du monde des esprits pour le meurtre de notre propriétaire. Il l'avait laissé mourir. Il a cependant été gracié par le roi des esprits, grâce au courage de sa nouvelle propriétaire. J'ai moi même plaidé sa cause."
Elle tressaillit.
"Il avait fait cela pour me protéger. Il a fait ce que je n'avais pas osé faire. Mais il a été sauvé. Je n'ai plus eu de nouvelles jusqu'à que nos deux propriétaires s'affrontent. Ma propriétaire prenait un malin plaisir à berner et à faire souffrir la sienne. Nous nous sommes affrontés. La femme qui me possédait nous a fait abattre par une autre clé. J'était si heureuse pour Leo. Il avait trouvé une propriétaire douce et aimante. Ma propriétaire a été vaincu, et est tombée dans un ruisseau. Ma clé a été perdue à ce moment là. Et puisqu'elle avait perdu ma clé pendant un durée suffisante, mon contrat a été rompu. Un pécheur m'a trouvée et m'a vendue. C'est là que nous nous sommes rencontrés."
Des larmes coulaient sur les joues d'Aries. Solis resta silencieux. Que dire à une femme qui avait tant souffert? Il lui prit l'épaule et l'étreignit doucement.
"Je suis désolé"
Elle essuya ses larmes et lui lança un timide sourire.
"C'est vous qui dites que s'excuser lorsque l'on est pas responsable est ridicule."

Il tenta de sourir.
"Bon, et si tu m'apprenait à me servir de ces jolies lames?"
Aries se releva gracieusement.
"En théorie, Leo a créé ces lames à partir de certaines de vos armes. Elle sont prévues pour un style de combat proche du mien. Bien que je me batte avec mes mains, pieds et mes techniques Wool, Leo a trouvé drôle de les offrir."
Solis entrevit vaguement les combats d'Aries. Des mouvements fluides meurtriers. Il se leva à son tour.
"Apprend moi"

Ils passèrent ainsi la nuit à s'entraîner. Le maniement de ses armes était complexe et certes Solis aurait besoin de mois d'entraînement pour réussir à manier correctement ses armes qui demandait un combat en moulinets et pirouettes diverses, mais au moins connaissait il les bases. D'un ample mouvement il pourrait désormais infliger de terribles coupures. Il était incapable de faire un combat. Il ne saurait lancer qu'une attaque, mais peu importe, Solis était heureux.
Il avait trouvé bien plus qu'une arme. Il avait enfin vu Aries le regarder dans les yeux.

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