Les paroles sont déversées alors que quelques secondes après je fais preuve de désintérêt. J'ai libéré ce que mon coeur voulait que je libère et je me sens alors épanoui. Me couchant presque dans l'eau, je prends appui sur le rebord de la piscine et livre mon visage vers le ciel tout en regardant les étoiles. C'est là-haut que vivent ses esprits, je crois. Ce doit être merveilleux là-bas, ca brille, c'est plein de lumière malgré l'obscurité, on y perçoit vraiment une sensation de chaleur et de convivialité. Après ce n'est peut être que moi car je suis d'une manière ou d'une autre lié aux étoiles, de par ma magie ou de par ma fascination quand je les ai vues pour la première fois. C'est vrai, je viens d'Hosenka et là bas la ville est tellement éclairée qu'on ne peut même pas y voir les étoiles. Le ciel n'est qu'un drap bleu marine porté par les lampadaires qui jonchent les rues et font fuir les étoiles. Les rencontrer fut quelque chose de troublant pour moi, et merveilleux à la fois. Je découvrais une nature plus naturelle à ma magie comme la lumière du soleil ou celle de la lune.

Mon oreille se tend alors qu'elle semble triste et gênée cette fois. Elle se retourne et je ne comprends pas. Je me rends compte qu'elle fait partie de ces femmes au caractère instable, fragiles, souvent incompréhensibles et je fais mine d'ignorer la raison de sa tristesse alors que doucement je commence à comprendre. Délicatement je lâche le bord du bassin à remous pour flotter à la surface de l'eau, le corps tourné vers le ciel avant d'ouvrir la bouche en profitant que mes oreilles bénéficient du calme aquatique.

"Si ce n'est que ça qui te dérange..."

Je ne l'entends plus pleurer car le son est bloqué par l'eau, j'entends seulement ma voix bourdonner à travers l'air et je trouve ça plutôt drôle. Et pour cacher ma nudité, la mettre plus à l'aise je me dis qu'il me faut cacher tout cela. Cacher ce corps humain derrière quelque chose de plus mystérieux et de plus attractif que de la simple chair. Ma peau luit tandis que mes pieds deviennent dorés, que mes muscles semblent disparaître sous le halo montant progressivement jusqu'à mon cou. Seule un visage prend place au-dessus d'une silhouette éthérée. Et la lumière qu'est devenue mon corps luit dans l'eau tandis qu'elle éclaire sous ses reflets le visage de la mage. Je souris et le halo s'empare alors de mon visage, laissant à la place de ma bouche un rictus d'un blanc éclatant et de mes yeux deux sphères toutes aussi pures prennent place. Je me redresse alors et m'installe à côté d'elle à nouveau pour pouvoir lui parler mais de ces six années passées je ne pouvais rien lui dire, mes derniers souvenirs remontent à si longtemps et je ne me sens même pas capable d'aborder un nouveau sujet. Nous avons l'air trop différents, j'aurai pu lui parler des étoiles mais elles sont des choses que je ne connais pas assez. Alors je laisse la place au silence et à la quiétude de l'eau qui fredonne sous la forme de bulles les chants des sirènes. Sirènes qui pourtant ont hanté mon esprit pendant ces six ans, qui ont possédé mon âme, m'ont utilisé comme arme. Et rien que ces souvenirs me rappellent à quel point j'étais impuissant. Je me tourne alors vers Ohatsu, les yeux devenus grands face à la surprise.

"Désolé mais... Je crois que je ne devrais plus perdre mon temps à barboter ici."

Ayant peur de l'avoir vexée avec mes paroles, je tente alors de me justifier.

"Nous sommes des mages et suite à la cuisante défaite que j'ai connue il y a de ça six ans, je pense qu'il serait mieux pour moi de m'entrainer davantage. Je suis déjà bien chanceux de ne pas être tombé lors de ma mission..."

Le regard plein de regrets malgré qu'il soit difficile à lire au-delà de l'enveloppe de lumière, je caresse sa joue avant de m'en aller, fusant vers la sortie à une vitesse bien au-delà des capacités d'un être humain. Et mon corps reprend forme, mon visage réapparaît pour montrer quelques regrets, un sourire d'angoisse sans doute provoqué par l'alcool, du moins c'est ce j'essaye de croire pour oublier que nombre de mes rencontres ne se comporteront jamais plus comme avant.