Il marche, regard hagard ses yeux scrutent sans vraiment voir, perdu, tendu. La forêt l’enlace et s’étend à perte de vue. Une sorte de malaise qui s’empare de lui, malaise renforcé par une conversation ayant cherché à le dissuader. Il n’a rien dit à Uriel. Non, jamais. Plus tard il l’apprendrait mieux cela serait, il l'en aurait empêché… Elle avait peut-être échoué, mais lui y serait arrivé. Un craquement qui le tire de ses pensées, le petit brun se retourne pour scruter l’invisible de ses yeux pétrifiés. Un mouvement entre les arbres, as-t-il rêvé ? Vague illusion l’ayant transporté ? Il s’avance, lentement, peu assuré alors que déjà la nuit commence à tomber, mais il est déterminé, il doit la trouver.
***
Une main qui balaye ses cheveux avec soins, il sent l’odeur de pin. Un mouvement, furtif, un rire qui s’élève de sa gorge ahurie. Ses yeux se perdent entre les arbres, endroit inconnu qu’il ne connait pas. Sa vision balaye l’assemblée alors qu’il sent dans le bas de son dos ses cheveux le fouetter… Qu’il comprend qu’un appel a été proféré, qu’il voit à travers des yeux étrangers. Il rit, elle rit. Un rire aussi faible que l’écho alors que la cime des arbres devient son tombeau. Il danse, ses yeux aperçoivent une peau aux teintes de vert, il sent qu’il ne possède plus de chaire. Il s’émerveille devant le spectacle, impressions électrisantes qui l’enlacent dans un courant de chaleur bienfaisante. Il sent la vie courir en lui, battre et se projeté dans un naturel inné. Il sent l’énergie l’imprégner, une énergie chaude et glacée, mélange étrange et électrisant, il est vivant.
Puis la spirale alors qu’il sent le sourire se dessiner, un rire qui s’élève alors qu’il se retrouve chassé, rire lointain alors que le regard inhumain le fixe de sa noirceur enchantée, un faible écho qui résonne avant la fin, un faible écho avant qu’il ne rejoigne à nouveau son corps humain.
" Sauras-tu me trouver ? "
Aux frontières civilisées, ma beauté ravie les étrangers voulant me pénétrer, en mon cœur bat l’invisible enchaînée, berceau de mystères jamais contés, dans mon sol grouillent le cadavre des terribles secrets.Un réveil en sursaut, sueur battant sur son front brûlant alors qu’il se lève brutalement. Un stylo saisi pour griffonner, que sur la feuille vient s’inscrire cette énigme qu’il ne comprend pas.
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Il avait cherché, un moment, longtemps… Que pouvait-elle signifier ? Etais-ce un indice laissé pour la trouver ? Il revoit la forêt à la nuit tombé, cette magnifique sensation parcourant son corps entier… Puis la réponse apportée sur un plateau doré alors que furtivement sa vue est empreintée par l’écorce incarnée.
« Toujours aussi cinglé celle-là. » Une expression choquée sur le visage du gamin détraqué alors que ses yeux se plongent dans ceux de la gamine délurée. Il tente de connaître la vérité, elle ne veut rien lâcher, hors de question que cette timbrée vienne s’ajouter aux quatre autres demeurés avec qui elle doit déjà le partager. Non.
”JAMAIS !” Elle disparait alors que les yeux d’acier pénètrent son esprit au bord de la migraine, regard froid et pourtant apaisant… Réconfortant. Sa voix grave vient le bercer de sa rudesse teinté de tendresse. Il se laisse subjuguer, enchanté alors qu’il décide de parler. Qu’il énonce son nom et l’endroit où la trouver. Mise en garde succédant à ses paroles n’ayant pour but que de le réconforter, mise en garde car il ne veut que le protéger. Tiraillé entre deux sentiments amers, entre deux devoirs contraires. Il disparait, sa présence froide et apaisante s'efface de son esprit embrumé. Ce soir il la trouverait.
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Une ombre filant entre deux troncs, il ne réfléchit pas il s’élance dans sa direction, ici et là un reflet sur sa peau, reflet luisant à la lueur d’une lune immaculée. Les arbres s’épaississent alors qu’il sent le changement dans l’air, qu’il sait qu’il pénètre dans son repère. La lune ne peut plus briller, alors que gagne en puissance l’obscurité. Il continue d’avancer, à taton alors que un à un il les sent s’éveiller.
Révélation. Clairière illuminée par l’astre éthéré, le cœur de la forêt. Végétation luxuriante et animée, chatoyante alors que dans la terre gise les restes de centaines de voyageurs égarés. Un léger souffle dans l’air alors que les pétales commencent à voler, que feuilles et fleurs sous son impulsion se réunissent pour former le corps filandreux et verdoyant, corps indécent, des lianes qui se mêlent au spectacle enchanté, liane et lierre venant parachevée l’apparition de l’Entérée. Un léger sourire qui s’esquisse sur son visage verdoyant.
« Je savais que tu me trouverais. »Un léger rire, elle commence par s’approcher, inspecte avec minutie son invité. La joie la transperce d’une douce allégresse alors que le jeu peut commencer, que s’est profilé le résultat souhaité, il semble capable de percer ses secrets, il est temps d’instaurer les règles de son jeu préféré. Le prenant de court elle l’empêche de parler.
« Ma terre, mes règles. Une énigme comme simple jeu, pacte ou prison éternelle seront les deux enjeux. Aucune rétractation ne sera tolérée, considère le jeu lancé. Sur ses mots elle lève les bras, fluide d'énergie qui s'élève et le transperce, que dans un sublime ballet végétal arbres, plantes, lierres et fleurs viennent combler tout passage lui permettant de s’échapper. Le jeu vient de commencer.
Ils s'excitent et s'agitent dans son intériorité, un à un ils émergent pour parler quand le hurlement strident les fait s’arrêter. Que la bouche couleur de lierre se referme avec un sourire pervers.
« Bien évidemment leur participation serait tricherie, le silence est désormais exigé, ou ta défaite d’office sera décrétée. » Une main aqueuse qui se plaque sur une bouche d’écorce prête à vociférer, un regard perçant n’étant pas autre chose qu’une menace révélée, face à Syla suivre les règles était exigé.
Elle sourit alors que son corps végétal se met à tourner autour de lui.
"Commençons."
"J’enlace les être de ma sublime agonie, je suis l’amante chérie des artistes maudits, que l’on me craigne je suis pourtant souveraine d’un royaume loin de toute haine, reine de sujets dont je cache la peine, je suis la damnation salvatrice de toute raison. »Un silence, pesant alors qu’elle se stoppe devant son visage d’enfant, que son sourire s’étire, attendant. Attendant pensant gagner, attendant espérant qu’il trouverait ? Chose impossible à savoir dans la contradiction de cet esprit détraqué. Elle attend, sifflant et énumérant le temps, temps s’écoulant avant qu’il ne doive honorer ses engagements. Puis la réponse vient avec une naïveté d’enfant, réponse trahissant cet humain déjà dément.
“La folie.” Un cri qui déchire la nuit alors qu’elle éclate en mile confetti ahuries. Que dans son esprit se révèle l’incantation sacrée alors que dans un unique souffle les cinq intrus ont recommencé à respirer. Ballet végétal libérant le lieu de sa prison sacré, que rampant tous reprennent leur place sur le champs.