Tu souris quand il te rappel ce poulet. Tu souris quand le mot est associé aux images de votre première rencontre. La plus improbable des rencontres. Qui aurait cru que tu tomberais nez à nez avec un type aussi têtu et borné que lui ? Qui aurait cru que tu tomberais nez à nez avec celui qui prétend être le parrain de la forêt ? Qui aurait cru que tu tomberais nez à nez avec celui qui, au détour d’un chemin, a égaré son frère ? Tu aurais certainement été le premier à en rire si on t’avait dit avant que tes yeux ne croisent ceux d’Uriel. Tu aurais certainement été le premier à en rire si on t’avait dit que ta route finirait, par croiser la sienne. Deux fois. Deux fois de trop faut croire. Il était si difficile à suivre, si difficile d’essayer de briser cette carapace qu’il porte en lui. Si difficile d’essayer de voir où il voulait en venir à chaque fois. Comme si votre rencontre n’était qu’une énorme partie d’échec et qu’il avait bien trois coups d’avance sur toi, te menant par le bout du nez.

C’était tellement facile en même temps.

Il suffisait de te mentir. De te tromper. De te faire croire monts et merveilles pour que tu suives cet homme, peu importe où il allait. Comme son ombre. Tu l’avais promis à votre première rencontre et quand t’y repenses, t’aurais dû fermer ta gueule. Ou te casser une jambe. Ce que tu peux être con parfois. Maintenant, tu le regrettes ce choix. Parce qu’il a été fait trop tôt. Parce que tu pensais que lui, il serait sans doute le premier homme à comprendre ce que tu traversais à ce moment-là. Parce que tu pensais que lui, parmi tous les autres imbéciles, il pourrait t’aider. Au lieu de ça…C’est chacun pour soi et maintenant, c’est toi qui l’aide. Si t’avais su…T’aurais au moins pris Charles avec toi au lieu de le laisser à la guilde. Il aurait été bien plus amusant de voyager avec lui.

« - La barbarie de la Nature est préférable à la tromperie du genre humain. Elle fait moins mal…Du moins c’est ce que je dirais si je devais choisir entre les deux. »

Tu le regardes d’un œil alors qu’il est toujours affalé dans son coin avec ses deux compagnons.

« - Tu veux ton poulet ? Je vais te le chercher ton poulet. Bien gros, bien juteux…Tu ne bouges pas hein ! »

Quelle question. Evidemment qu’il ne va pas bouger. Cela serait trop demander à Monseigneur ! Vue comment il est avachi contre son tronc d’arbre là…Il serait même pas assez rapide pour partir avec tout ce qu’il trimballe.

Reprenant forme animale, tu pars à travers les buissons partant à la recherche du repas de sa majesté. Si on vivait à une époque moyenâgeuse, Uriel serait le Seigneur et toi…Le pauvre vassal mal traité. Tant que tu n’étais pas son Mignon….Rien qu’à l’idée, t’as un frisson.

Au bout de 20 minutes, tu repars un bon gros dindon …tiens, même deux.

« - Bougez pas les poulets…Ce soir c’est votre fête… »

Il te fallut 10 minutes pour les attraper ces connards. Tu comptes même plus le nombre de plumes que t’as avalé. C’est fous ce que ça peut être dégeulasse les plumes. T’en as plein la gueule, c’est horrible.

Tu reviens avec les deux bestioles dans chaque main alors que tu reprends ta forme humaine, tout sourire et fier de ta prise, tu lances la bestiole au cou tordu à Uriel.

« - Tiens ! Reflex ! Voilà ton poulet. Faut aussi que je te le déplume tant qu’on y est ou Monseigneur arrivera à se débrouiller tout seul ? Dis-le tout de suite, j’ai l’habitude de ce genre de chose. T’as qu’à préparer le barbecue pendant que je m’occupe des bestioles. Mais avant…Mon jean…J’en ai marre de la brise légère qui me caresse l’anus. Désolé. »


Alors tu cherches ton pantalon dans les alentours et tu finis par le retrouver, à sa place. Va vraiment falloir que t’investisses dans une sorte d’objet magique permettant de retrouver ses fringues. Cela devient crucial.