Bien assis sur une chaise dans la Guilde, je me reposais de cette mission d'assassinat. Les paroles de cet albinos se répétaient sans cesse dans mon crâne. Il croyait fortement que nous allions nous croiser à nouveau. Jusqu'où s'étendaient ses capacités magiques? Je n'avais rien vu de ce dont il était capable. Il savait parler et réfléchir, je connaissais son visage et sa silhouette, mais comme moyen de défense, rien n'avait été montré. Je me devais d'être prudent lorsque ce jour arrivera. La Guilde était déserte donc mon repos ne pouvait pas être dérangé par quoi que ce soit. Cependant, je me retrouvai tout de même à avoir de la difficulté à être dans un état de sommeil profond. Quelque chose dérangeait mon cycle, mais je ne pouvais pas savoir ce que c'était.

Puis soudainement, je me réveillai en sursaut, en sueurs, une douleur atroce au ventre, une envie de vomir considérable. Je sortis de la Guilde en trombe et tombai à genoux sur le carrelage de pierre, les mains sur le ventre, les dents serrées. Les veines sur le dessus de mes mains et mes carotides se mirent à gonfler de plus belle. Est-ce que j'allais mourir à cet instant? Je me mis à vomir mon dernier repas dans une odeur nauséabonde que je ne sentais pas. J'avais une abondance de salive, une douleur aux ongles et je sentais mon sang se pomper à vive allure. Je perdis conscience.

Je me réveillai à côté de ma régurgitation, l'appétit allumé. Mon ventre criait famine et ma bouche salivait intensément. Je me disais que le dernier humain que j'avais dévoré devait avoir quelque chose de spécial pour que mon corps ne l'ai pas accepté. Même si l'heure présente était en plein jour, je ne pouvais plus me contenir, je devais manger, je devais nourrir cette faim intolérable. J'enfilai mon manteau et ma capuche pour marcher dans l'anonymat jusqu'à ce que je croise une personne qui se promenait dans les montagnes. Une jeune femme se promenant avec son panier de fruits croisa mon regard. La peur s'empara d'elle, mais je lui pris le bras d'une main. Je ne voulais pas qu'elle parte, je voulais au moins qu'elle meurt sans en souffrir. Elle se dégagea de mon emprise, mais une de mes griffes se planta dans sa chaire par accident. Elle se mit à courir à travers les arbres en criant à l'aide.

La voix de son cri changea subitement. Elle cria de douleur en se tenant le bras. Elle échappa son panier, se tenant le bras, pleurant à froides larmes et s'écroula, prise de spasmes. Je fronçai les sourcils et allai à sa rencontre. Les yeux tournés au blanc, je l'immobilisai de sa crise en mettant mes mains sur ses épaules. J'essayais de détecter ce qui avait provoqué cela... la blessure... La légère marque de ma griffe était tournée au noir et les veines importantes autour aussi. Le noir se propagea à travers tout son corps. Qu'avais-je fait? J'avais gaspillé une proie pour mon estomac... La femme arrêta de gigoter, je la croyais morte. Elle ne me semblait plus pure à manger alors la dévorer me dégoûtait. Je me remis sur pieds et m'apprêtai à quitter la scène du crime. Quelques pas franchis, puis une respiration forte retentie comme si quelqu'un reprenait son souffle après avoir plongé dans l'eau. Je me retournais vers elle et la vis porter ses mains vers le haut comme si elle cherchait à s'accrocher.

Je m'avançai vers elle, tendis mon corps pour l'aider à se relever. Les jambes molles pour les premières secondes, elle retrouva l'équilibre et me lâcha. Elle me fixait de ses yeux blanchis par une possession magique quelconque. Je décidais de partir et de la laisser par elle-même. Mais elle me suivait comme mon ombre, ne me laissant jamais en paix. Je me retournai pour lui faire face pour essayer de comprendre ce qu'elle était devenue. Je l'examinai, je reniflais son odeur, l'empreinte magique laissée par moi-même. Je sentais ma magie circuler en elle. Je me disais que cette crise la veille était la source de ce reflux magique. Je quittai les bois pour retourner à la Guilde, la femme à mes côtés. Son visage neutre, le regard absent, la blessure fraîche et noircie, les apparences n'étaient pas trompeuses. Allais-je être coincé avec elle pour le reste de mes jours? Ou bien était-ce temporaire?

Méditant sur une chaise pendant quelques heures, je sentais mon énergie vitale me quitter rapidement. L'envie de me reposer était à ma porte. Était-ce ce lien invisible qui me rendait aussi faible? Ou bien était-ce la faim? Je me concentrai fortement sur ce lien pour le ressentir, pour le voir. Juste faire cela me demandait de l'énergie et j'étais sur le bord de l'inconscience. Lorsqu'il était à la limite palpable, je le brisai dans un éclat de poussière. La femme tomba sur le sol, inconsciente, mais toujours vivante. En sueurs, je devais rendre mes derniers efforts pour l'amener là où je l'avais trouvée. Arrivé à destination avec la maigre femme sur mon épaule je la déposai avant de m'effondrer d'épuisement. Elle se réveilla avant moi puisqu'à mon réveil, elle avait disparu. Assis au centre de ce feuillage mort, je me disais que ce nouveau flux magique devait être contrôlé si je ne voulais pas que cela se reproduise. Je le sentais flotter au bout de mes ongles et dans ma salive. Je devais l'entreposer dans mon corps pour l'empêcher d'être trop près du quotidien. L'entreposer avec ma réserve de paralysant pourrait être une excellente idée. Je dirigeais donc le flux magique jusqu'à cette poche interne qui s'était crée avec ma transformation passée. Je me disais que ce devait être la dernière étape de ma transformation. La goule était complète. Les surprises, il n'y en aurait plus. Maintenant, je devais trouver un homme à manger, mon estomac criait incessamment.