Tu es là, au milieu des aigles, dans ce refuge brûlé qui autrefois fut ta vision. Tu es là, et tu regardes la pierre qui constitue le mur... Tu es là, et tu touches ce mur qui semble te montrer les souvenirs... Tu repenses... Tu remarques. Tu as toujours pu voir ce que les autres ne voyaient pas. Tu as toujours ou trouver ce que les autres cherchaient. Étaient ce dû à ton calme incessant, du fait de ton aphasie naturelle ? Ou parce que tu étais de ces filles studieuses et indifférente ? Non, tu n'étais pas indifférente. Toujours, tu as su être l'amie, la sœur de cœur, la belle... Toujours, tu as été empathique...
Certains disaient que tu étais gentille, tu aidais les autres. D'autres diront que tu étais sympathiques. Mais ce qu'il faut retenir c'est que tu as toujours été là, au bon moment...
Jusqu'au jour où tu lâchais tout. Jusqu'au jour où, pour accroître ton savoir et tes connaissances, tu l'abandonnas. Jusqu'au jour, où tu devins isolée... Tu te privas alors de ton adolescence, toi qui t'étais déjà privée de ton enfance.
Lire... C'est tout ce une tu savais faire en fin de compte. Lire, écrire... Tu n'as jamais su faire autre chose. Aphasique, tu n'as jamais si parler, curieuse, tu n'as jamais su t'arrêter...

En fait, tu savais lire de base... Et c'est de là que tout découla... La lecture t'apporta la connaissance, la connaissance t'apporta le savoir, le savoir t'amena aux expériences, et la petite fille curieuse que tu étais ne résista pas. Tu testais ce que tu lisais. Tu trouvais toujours un moyen. Que ce soit en créant un mini geyser de chocolat chaud, ou une bille de verre fondue... Tu trouvais toujours ce qui te permettait de vérifier les phénomènes à de plus grandes échelles que ta chambre.
Tu étais inventive... Tu étais débrouillarde. Jamais tu ne demandas quoique ce soit à ta mère, ou à ton père... Était ce à cause de ton manque de paroles ? Non, c'était parce que tu savais te débrouiller. Parce que tu savais quoi faire, et quand le faire... Encore une fois, les livres t'aidaient. Il y avait les libres de recettes, les livres de bricolage, les livres de contes de fées... De quoi alimenter les qualités que tu avais déjà...

Mais les livres ne t'apportèrent jamais des amis. Jamais tu ne sortis de ta chambre avant d'être envoyée à l'université. Jamais tu ne découvris les joies de l'enfance... Alors quand tu fus larguée dans la fac, tu t'accrochas, tu cherchas, et tu trouvais. Tu devins protectrice, tu devins celle qui veut et qui va chercher ses amis. Tu devins ouverte.
Et avec Ester, tu devins presque intime. Tu trouvais chez elle la passion des images, et tes rêves furent marques sur ta peau, sous la forme de tatouages. Ils ne signifiaient alors quelque chose que pour toi... Ils étaient tes rêves, et jamais tu ne demandas la parole. Ils étaient là pour que toujours tu te rappelles. Ils se voyaient dès le matin sur tes bras, ils se montraient par ton dos presque toujours nu, et étais derrière toi pour montrer que tu savais t'en passer. Ils étaient des rêves, mais ils n'étaient pas indispensable... Ils étaient tes rêves... Mais seulement des rêves...

Lorsque tu fus finalement seule, tu trouves refuge dans les histoires de ta tante, racontant les périples magiques de ton oncle. Et tu avais une magie qui te définissait. Alors tu choisis cette voie plus pratique que théorique, et tu voyageas, jusqu'à tomber sur eux... Eagle's Claw.
Cette guilde était belle, par la force de ses membres. Elle était forte et invincible. Elle voyait le monde d'une façon qui te plaisait. Elle était grise, et tu étais grise. Elle était déterminée, et tu trouvais la détermination la bas. Elle était imposante, surmontant les monts et pourtant éparpillée dans Fiore, et en te hissant au sommet, tu compris que tu avais trouve ton foyer.
Eagle's Claw, c'est ta famille, Misto, c'est la mère, et toi, tu es en son cœur...

Vivre sans parler, vivre sans pouvoir pleinement s'exprimer, vivre sa vie alors que tu fus atteinte d'une aphasie naturelle, c'était difficile. Tu n'as jamais réussi à émettre le moindre son, tu n'avais pas les cordes vocales qu'il fallait, tu avais une malformation, tu n'as jamais rien dit... Mais c'était naturel, et depuis ta naissance. C'était le coût de ta vie, et cela ne t'a pas empêché d'être aimée de tes parents...

Perdue dans ma petite ville, perdue dans Stella, ma seule alternative à la parole fut le dessin, ou les gestes. Jamais je n'ai pu me faire pleinement comprendre, avant de savoir écrire, mais cela me suffisait. Très tôt, j'étais enfermée dans la maison. Très tôt, j'étais recluse dans la bibliothèque. Très tôt, je fus fragile, et dus rester cloîtrée.
Alors très tôt, je m'échappai par les livres, et découvris le monde par delà ces milliers de pages que je dévorais chaque jour.

Le monde extérieur, les pays bordant Stella, les incroyables découvertes... La physique, les mathématiques, la littérature, l'art, la beauté de ce monde, relatée par les ouvrages de l'immense bibliothèque personnelle de mon père, tout cela me fascinait. Je voyais, par l'écriture. J'entendais par la lecture. Je vivais, au travers de l'encre.

Au fur et à mesure, les livres passant dans mes mains devinrent plus lourds, plus gros, plus complexes.
Et mon esprit assimilait. Au bout d'un certain temps, je comprenais les plus intellectuels et abstraits des écrits. Et je développais mes capacités. Tous ces théorèmes, toutes ces démonstrations, toutes les hypothèses de notre monde.
Et enfin, la magie. Mes premiers contes en parlaient, mais ce fut dans un grimoire que je compris. J'avais quatorze ans, et la magie me fut enfin connue.

Alors très vite, les ouvrages la relatant passèrent sur mon bureau, au centre de la bibliothèque, et je pus enfin la débloquer.

C'était ta magie. Tu pus la façonner et la perfectionner. Les sceaux. Tu choisis ce type de magie, car cela te permettait de t'amuser à changer les lois de ce monde. Tu pouvais rendre de l'eau solide sans la geler. Tu pouvais altérer poids et masse. Tu pouvais découvrir le monde sous un autre jour.
Et lorsque, fière, tu montras à tes parents tes prouesses, ceux ci n'attendirent pas. Tu étais devenue forte, et tu fus acheminer vers la capitale, pour étudier plus en profondeur...

Là bas, je la rencontrai. Elle, Ester. Cette fille d'un an plus âgée que moi m'avait attirée par la beauté et la signification de ses dessins. Très vite alors, elle devint une amie, ma seule amie sans doute, et c'est à elle que je dois mes tatouages.
Nous étions comme deux doigts de la même main, toujours ensembles. Elle fut tout pour moi. Elle m'initia bien vite aux motifs corporels, les dessinant sur toutes surfaces.
Lorsqu'enfin je pus comprendre toute l'étendue, toute la signification de ses dessins, elle me proposa un tatouage, et je lui en demandai alors plusieurs. Mes rêves... Tous mes rêves, je les ancrais dans la peau, dans mon dos, derrière moi. C'était tout ce que je voulais, mais je démontrais que je pouvais m'en passer...
Et le plus surprenant, d'après Ester, fut que jamais la parole ne fut mon souhait...

Lors de ton examen d'entrée, quelques jours après ta rencontre avec Ester, tu tins tête à l'un des éminents professeur de physique. Ah il t'était chiant lui. Il savait poser les questions pièges. Tu fus assez forte au début, mais tu dus inverser deux masses pour réussir à lui clouer le bec, et tu réussis ton épreuve.
Études, recherche, apprentissage, connaissances. Tu allais toujours plus loin, tu visais toujours plus haut.
Il t'aura fallu six longues années d'acharnement pour atteindre des sommets menaçants, et pour cela, tu sacrifias Ester.
Une fois arrivée là haut, tu arrêtas tout. La pression, la haine d'autrui, tu l'avais découvert, et il était hors de question que tu te laisses submerger par tant de sentiments négatifs.
Alors tu partis te réfugier chez ta tante, habitant en Fiore...

Je considérais ma vieille tante comme la femme la plus formidable du monde... Elle était douce et gentille. Elle était toujours là pour moi, et surtout, elle avait un amas d'histoire sur mon oncle désormais décédé. Me les racontant, elle m'avoua qu'elle se sentait rendre hommage à ce frère de ma mère, et me conta ses périples, ses obstacles... Elle me conta cette passion, cet engouement qu'il avait eu à partir en quêtes, en missions... Et au fur et à mesure, je voulus moi aussi le faire. Elle me donnait tant envie, que je ne résistait finalement pas...
Et je partis explorer Fiore.

Lorsque tu te retrouvas dans ces hauts monts qu'étaient Jura, tu faillis, et tombas. Tu t'étais perdue et ne tenais plus sur tes jambes. Tu étais en train de te perdre mentalement, lorsque tu les vis, eux, ces aigles au sommet...

Sans eux... Je serais morte...

Eagle's Claw... Cette guilde m'avait aidée, et j'étais restée un peu avec eux, avant de repartir. Mais au moment de mon départ, je compris quelque chose : que je ne serais jamais plus satisfaite qu'ici... Ils pensaient différemment, ils voyaient les choses d'un autre œil, et cela ma plaisait.
Alors je décidai de rester avec eux...

Et tu rejoignis le doux nid des aigles, et prônas leur vision du monde...

Les hautes montagnes de Jura trônaient devant tes yeux, imposante et grandes. Tu les regardais, levant la tête, avant de te décider à emprunter l'étroit chemin destiné à t'emmener au sommet. Parce que tu étais Enma, et que tu voulais voir. Parce que tu étais Enma, et que tu voulais ressentir, cette impression de grandeur. Tu voulais être au sommet de ce mont et voir la beauté de Fiore...
Alors tu gravis, et tu te hissas. Tu suivis ce chemin serpentant entre les roches. Plusieurs fois, tu dus utiliser la magie, et réduire ton poids, afin de pouvoir surmonter les escalades qui te paraissaient impossibles.
Tu arrivas finalement devant le pont de bois, qui te paraissait si peu solide. Ton poids diminué, tu t'engageras doucement sur celui ci, et fermas les yeux à quelques moments. Tu avançais, lorsque finalement il craqua, et tu tombas...

Effrayant. C'était effrayant de tomber dans ce vide. Si j'avais pu crier, sans doute l'aurais je fait. Ma tête faillit percuter la roche, mais ce fut d'une habile figure que mon bras fut touché à la place, et je m'écrasais contre le chemin arpent, la tête dans le vide. Je saignais, j'avais mal. J'avais peur. Je ressentais enfin la peur... Et je n'aimais pas ça. Je voyais la montagne, la hauteur. Je voyais la mort à la prochaine erreur. Doucement, je tentais de me glisser loin du bord, avant de me relever. Les larmes aux yeux, je les laissais couler, me tenant le bras, et marchant. Dans la neige, je laissais la trace rouge de mon mal...

Tu cherchais alors comment rejoindre le pied de la montagne de là où tu étais. Tu marchas un moment, avant de t'apercevoir que tu étais perdue, que tu ne ou vais te retrouver, et que tu ne te concentrais pas. Tu t'écrasa par terre, et tes yeux et ta conscience se fermèrent. Tu n'en pouvais plus. Tu avais mal de partout, certains os devaient s'être fracturés ou cassés durant ta chute, et ton bras était clairement cassé. Tes jambes semblaient avoir survécues en revanche, mais elles avaient très vite faillies.
Tu étais inconsciente. Mais fort heureusement pour toi, le rouge que tu avais laissé derrière toi leur avait permis de te retrouver ...

À mon réveil, j'étais à l'abri dans un bâtiment. J'appris plus tard que c'était une tour et le refuge des aigles.
Je regardai alors autour de moi, pour voir deux visage qui me regardaient. Et j'étais emplâtre, et bandée, on avait veillé sur moi. Cela me fit chaud au cœur.
Et je restais alitée plusieurs jours. J'appris que mes deux sauveurs s'appelaient Elliope et Jarvan, et qu'ils étaient mages. L'une était créatrice de glaces, l'autre était transformiste.
Passant du temps avec eux, je leur révélai mon aphasie, ma magie, mon envie de voir un autre monde. Je leur contai mon histoire et ils me contèrent la leur.
Enfin, vint le jour où je pouvais me lever. Je n'avais plus qu'un plâtre au bras.

Alors que tu pouvais te relever, Jarvan te défia. Tu fis surprise, et ne savais pas ce qu'il y avait dans sa tête. Mais tu acceptas, et vous vous retrouvâtes alors devant le refuge brûlé, Elliope jouant le rôle de l'arbitre. À peine avait elle prononcé le début du match que Jarvan se transforma, revêtant l'apparence d'un loup, et te fonça dessus. Un peu surprise et prise de court, tu te jetas sur le côté pour l'éviter, et ton plâtre cogna le sol, t'infligeant une grande douleur. Tu crias, avant de rouler sur toi même, évitant le second assaut. Tu te relevas rapidement, les larmes aux yeux, avant de sauter en arrière pour esquiver un nouveau coup, mais tu sauras trop tard, et tu te retrouvas méchamment griffée...

Il était trop fort, trop rapide. Il bondissait de partout, et m'attaquait aux bons moments. Je ne voyais rien à faire, j'étais perdue au milieu de cette bataille. Plus loin, je voyais Elliope s'inquiéter de mon sort, mais il était hors de question de me reposer sur elle. J'étais une Herel, je n'allais pas abandonner. Alors, même griffée, je continuais, et roula sur le côté, jusqu'à courir près du refuge. J'avais une idée.
Je touchai alors le mur en pierre, et y apposai mon sceau, avant de toucher la neige encadrant le pied de la tour, pour y mettre le deuxième sceau. Jarvan fonça, et, tout en me jetant une nouvelle fois au sol pour l'esquiver, je l'activai.
Stone !
Alors Le loup, plutôt que de sauter sur le mur comme il l'avait prévu, afin de bondir sur moi, traversa la pierre, comme s'il s'agissait de la neige. Je désactivai alors aussitôt ma magie, et me relevai, afin de passer à la seconde partie de mon plan.
Je me dirigeai vers la lourde porte en bois fermant l'accès au refuge et utilisai mon sceau Power afin de m'alourdir et de renforcer ma puissance physique. Et j'attendis le loup qui devait retrouver la porte de la tour pour sortir. M'apercevant, il grogna et courut vers moi, pour que je lui donne un coup de pied puissant. Il s'écrasa contre le mur, et je tombai à terre. Mon sceau s'effaça, je m'essoufflais...

Jarvan se transforma en statue de pierre au bon moment, pour éviter une fracture de la colonne vertébrale, et te trouva ensuite à terre. Il s'approcha de toi, pour te frapper, et tu l'utilisa à nouveau, ton Stone. Il s'enfonça alors dans le sol, comme s'il s'agissait d'eau, et la neige s'enfonça avec lui. Il se retrouva dans la poudreuse blanche, et tu scellas l'eau, afin de le bloquer.
Tu souris alors, devant son handicap, mais tu n'avais pas prévu la suite. Il se changea en singe et sa queue t'attrapa, et t'étrangla, jusqu'à ce que tu lèves le bras et abandonnes. Tu avais perdu.

Le défi terminé, je libérai le transformiste, et allai souffler un peu avec Elliope. Jarvan nous rejoignit et parla avec la demoiselle, avant de me regarder, souriant. Il me révéla alors qu'ils étaient dans une guilde neutre, et que j'avais les "tripes" pour en faire partie. Il m'expliqua que c'était une guilde différente des autres, ni blanche, ni noire. Il dit que c'était la vision d'un aigle : famille, chasse, survie. Et plus il en parla, plus mes yeux brillaient.
Enfin il m'avoua qu'Elliope et lui, après avoir discuté avec moi durant les quelques jours où je guérissais de ma chute, songeaient à me recruter, ma vision du monde et mon envie de découvrir étant, selon lui, propres à cette guilde, mais qu'il avait fallu qu'il me voit combattre. Une sorte de test.

Tu les avais impressionné. Tout simplement. Alors ils te tendirent la main, et tu la saisis.

- Bienvenue à Eagle's Claw, Enma.

Seal Magic, c'est une magie étrange, et merveilleuse. Pouvoir modifier les propriétés physiques à sa guise. Pour quelqu'un comme Enma, qui a passé plus des trois quarts de sa vie dans les livres de sciences, cette magie est une aubaine. Elle lui permet d'étudier, de renverser, et de s'amuser.

Car un sceau, c'est tout ces principes... En un seul. Un sceau, c'est le principe de sceller quelques chose, au niveau du corps, élémentaire, environnemental, climatique, ou autres, moyennant évidemment un coût plus important selon la puissance et la surface scellée.

Ainsi, Enma est capable, par exemple, de sceller un objet, un élément, et de modifier ses propriétés physiques. "Avez vous déjà pu passer votre main au travers de la roche ?"

Les sceaux, c'est comme les runes. C'est complexe, ça peut être long, et surtout, combinés à d'autres sceaux, ça peut tout changer.
Les sceaux, c'est une manière de changer le monde...

Mais jamais cette magie ne donnera la voix à Enma...