Jiro s’était levé bien avant l’aurore, comme à ses habitudes, et avait arpenté les longs couloirs de la guilde aussi silencieusement qu’un félin pour arriver dans le bar vidé par la nuit. Il s’assit sur le rebord d’une table et ouvrit en grand une fenêtre pour laisser entrer une vague d’air glaciale dans la pièce. Sur le rebord de l’ouverture, on pouvait encore trouver la rosée. Il passa négligemment le bout de ses doigts sur toute la largeur de l’ouverture, accumulant les gouttes de la nuit sur sa peau, laissant une trace bien visible là où il y avait l’ouverture. Son regard se perdait au loin, cherchait un horizon caché par les trop nombreuses montagnes, et il resta ainsi immobile, en pleine contemplation muette, pendant quelques minutes. Puis une silhouette s’avança au loin vers la guilde, attirant son attention. Il se redressa pour montrer sa présence au travers de la fenêtre. Le passant était un vieil homme.

Jiro attendit de voir Arkhana arriver dans la salle pour marcher directement vers elle et demander à lui parler en privé. Ils s’assirent dans un coin de la pièce et Jiro lui expliqua alors de quoi il était question. « Salut Arkhana, j’espère que tu vas bien. Un vieil homme est venu à la guilde ce matin, il appartient à un petit village à peu de kilomètres de la guilde. Ce soir, une fête aura lieu en faveur de l’esprit d’un aigle vénéré parmi ce peuple, et ils chercheront à élire la fille la plus belle pour clore la fête. La plus belle, en plus de recevoir la bénédiction de l’esprit, recevra une belle somme d’argent pour avoir assuré le spectacle. C’est une sorte de tradition dans ce petit village, sauf que cette fois, la petite fête a pris une ampleur considérable, et beaucoup d’étrangers se sont installés au village soit pour concourir au concours, soit pour assister au spectacle. Or, le vieil homme, un des organisateurs de la fête, s’est rendu compte que certains de ces étrangers étaient malveillants et n’étaient pas là simplement par curiosité. Il n’a pas osé me dire ce qu’ils complotaient, peut-être qu’il n’a pas trouvé de mots pour définir leurs plans vicieux… Mais il a demandé de l’aide à notre guilde pour qu’on surveille la fête ce soir et qu’on s’occupe des bandits s’ils passent à l’action. » Il marqua une pause, soufflant un peu, puis posa son regard dans celui de la jeune femme. « Je compte bien aller m’assurer que cette fête se déroule comme il le faut. Mais peut-être qu’une autre paire d’yeux sera beaucoup plus utile pour mieux voir les complots qui se trameront. Et tu es une femme, tu pourrais même participer au concours pour mieux enquêter de l’intérieur. »

Il ne connaissait que peu Arkhana personnellement, mais il l’appréciait pour les quelques moments passés avec elle. En lui proposant de l’accompagner en mission, et surtout en lui demandant de jouer une fille innocente en concourant pour la fête, il ne savait pas réellement comment la femme de caractère allait réagir, et c’était bien là le souci, car tout son plan reposait sur la décision de la magicienne, décision qu’il ne pouvait deviner. Il tenta de lui sourire pour l’inciter à accepter, mais il n’y arriva pas réellement. Il était en effet trop concentré sur sa future mission pour se le permettre, l’explication du vieil homme l’avait suffisamment convaincu pour l’inciter à accepter personnellement. Mais le vieil homme avait bien précisé que les étrangers, touristes attirés par l’évènement, étaient trop nombreux, et que Jiro seul ne pourrait sans doute rien faire. Il avait directement pensé à Arkhana, d’une part car il savait qu’elle était forte, d’autre part car il était persuadé qu’elle allait être touchée, à sa manière, par la mission. Il espérait juste, désormais, qu’il avait vu juste et qu’elle accepterait de l’accompagner.

La proposition avait fait mouche et Arkhana s'était presque enflammée en écoutant la requête. Elle s'était levée en demandant au garçon de patienter un peu pour aller se préparer pour la mission. Jiro était resté à sa table en attendant le retour de son amie. Elle ne revint que trois heures plus tard - il n'avait pas bougé.

Elle était élégante, Jiro le comprit en voyant les différentes personnes de la pièce se détourner sur son passage. Elle avait pleinement saisi le rôle qu'elle devait jouer. Elle se pencha sur le marionnettiste qui l'accueillit avec un sourire. Elle se jouait de lui pour faire son effet sur l'assemblée qui observait le duo inédit. Ils quittèrent la pièce dans un drôle de silence où chacun se demandait si la scène était réelle. Arkhana semblait s'en donner à cœur joie. Une fois à l'extérieur, elle changea de comportement et demanda à ce qu'ils se dépêchent - et Jiro eu un petit rire en pensant aux trois heures d'attente qu'elle lui avait infligée; il n'en était pas contrarié mais il trouvait l'audace de la jeune femme amusante.

Ils marchèrent une quinzaine de minutes dans les sentiers de la montagne, l'air était trop frais pour qu'ils se concentrent à parler de quelque chose de particulier. Puis ils commencèrent à entendre un bourdonnement lointain, de plus en plus distingué en même temps que leurs pas les guidaient vers le village. Ce dernier leur apparu bien vite : il était, dans la faible clarté de cette journée (les jours se raccourcissaient de plus en plus et la nuit n'allait pas tarder à tomber), illuminé par divers artifices. Chaque maisonnée était parsemées de lanternes, lumières vives, parfois magiques, et les rues, d'habitudes désertes, étaient complètement submergées d'une foule improbable. Des personnes de tout type, de tout horizon s'étaient rassemblées pour un petit évènement local qui avait prit une drôle d'envergure. Les rues étaient remplies de stands en tout genre - nourriture, vêtements, jeux ou simple distractions. La fête pour l'aigle du village était devenue totalement commerciale. Bientôt, les deux mages se retrouvèrent coincés dans la foule.

Était-ce une bonne idée de se présenter ensemble alors qu'ils venaient en mission et qu'ils n'avaient pas vraiment de plan ? Si des bandits grouillaient vraiment les rues, c'était un choix plutôt mal aisé. Jiro pensait à ce détail et allait en faire part à la femme mais, au moment où il se tourna vers elle, il sentit une main s'infiltrer dans une de ses poches arrières pour en retirer sa bourse d'argent; il se retourna violemment et vit une silhouette tenter de s'enfuir discrètement dans la foule. Jiro, agissant instinctivement, lança en sa direction une aiguille qui se planta profondément dans l'épaule de l'homme, qui se laissa tomber à terre dans un sec hurlement. Les gens s'écartaient de lui, la foule proche se tut quelques secondes, le temps que Jiro revienne chercher sa bourse sans daigner poser le regard sur le voleur qui se lamentait de douleur. L'homme se rendit compte que tous les regards se tournaient vers lui, et retourna alors dans la foule dans une direction aléatoire pour s'y perdre et qu'on l'oublie.

A agir en se basant sur son instinct, voilà qu'il avait attiré trop l'attention sur lui. Peut-être les bandits l'avaient déjà placé dans leur ligne de mire. Il s'éloignait donc de son alliée Arkhana, espérant qu'elle comprendrait. Pour rester en contact avec elle, il manipula une femme facilement pour qu'il devienne sa marionnette et il le guida, à distance, jusqu'à Arkhana.

Le pantin ouvrit la bouche promptement : « Arkhana, c'est Jiro, par le biais de ma magie. On peut communiquer à distance comme ça; il ne faut pas qu'on m'assimile à toi si tu veux concourir. On est en territoire inconnu, en territoire hostile, donc toutes les précautions sont à prendre, et j'ai failli en agissant si brusquement en pleine foule, peut-être que les bandits présents me surveillent déjà, et si tu concoures, tu deviendras une personnalité publique, et ils enquêteront peut-être sur toi, alors mieux vaut ne pas attirer trop l'attention. Cette marionnette est plutôt jolie, non ? Je pourrais la faire concourir en même temps que toi - même si tu l'emporteras sans doute à un moment sur elle - histoire qu'on ait deux paires d'yeux dans les coulisses du concours. Moi, je resterais à distance pour regarder les évènements se dérouler et voir d'où peuvent venir les bandits. Il y a trop de monde et trop de facteurs peuvent rentrer en compte, c'est difficile de faire un plan précis dans ces conditions... Allons s'inscrire désormais. »

La jeune femme, marionnette malgré elle, tourna son visage taciturne vers la place du village, où une longue estrade était destinée au concours imminent.

Arkhana et la marionnette s'avancèrent jusqu'aux organisateurs du concours. Malheureusement, celui-ci était déjà fermé aux nouvelles inscriptions. Jiro s'en soucia fortement, se demandant quel plan allait pouvoir être adopté dans les prochaines minutes, mais Arkhana avait déjà usé de sa malice et de son drôle de tact naturel pour arranger la situation en leur faveur. Elle obtint l'inscription des deux nouvelles venues (et présenta la marionnette comme étant Kikouko Tata - le pire était que le présentateur n'ait pas tiqué devant l'affreux patronyme).

Elles furent guidées dans une large tente derrière la scène où se trouvaient huit autres jeunes filles; elles étaient dix parmi les participantes au concours. Un vieil homme leur demanda de faire de leur mieux sur scène et Jiro se sentit d'intervenir par le biais de Kikouko : « Mais que devrons-nous réellement faire devant le public ? » A sa question, le vieillard répondit par un drôle de rire, se détourna pour chercher un sac, et le lança aux pieds de la pauvre Kikouko (qui après tout était une jeune fille innocente contrôlée par un marionnettiste et, malgré ce contrôle, qui restait consciente de tous les évènements mais était dans l'incapacité de reprendre possession de son corps). Dans le sac se trouvaient une trentaines de maillots de bains, en deux pièces. Avec un regard lubrique, le vieillard continuait de rire et leur avertit qu'elles allaient devoir défiler devant le public pour la première partie, et ce en revêtant un de ces maillots. Une jeune fille amena en avant le fait que la nuit tombait et qu'elle allait être fraiche, mais le vieillard répondit que pour gagner, il fallait être une fille forte et ne pas avoir peur du froid. Toutes durent se changer et un son de trompette déclara le spectacle ouvert.

A l'extérieur, l'alerte sonore attira beaucoup de personnes devant la scène, attirées par le drôle de concours destiné à la divinité. Jiro, malmené par la foule, s'en écarta pour ne pas être trop déconcentré et perdre le contrôle de Kikouko. Il grimpa sur le toit d'une petite maisonnée adjacente, d'où la vue lui était parfaite, et se concentra alors à la fois sur son rôle de marionnettiste mais aussi épiait les moindres comportements suspects du public (des bandits étaient toujours sur place et leur mission était de les arrêter !). Déjà, des filles arrivaient sur scènes en maillot de bain sous une musique de fanfare, elles durent faire des allers-retours sur scène puis des hommes sortirent des tuyaux d'arrosages et envoyèrent des jets sur les femmes. Certaines crièrent (de froid, de hargne ou de dégout) et on annonça que celles qui criaient seraient disqualifiées, donc les filles devaient rester dociles et continuer à défiler en étant trempées. La scène dura bien quelques douzaines de secondes en plus quand on leur demanda de revenir dans leurs loges (la fameuse tente derrière l'estrade) tandis que le nom de quatre filles étaient disqualifiées. Fort heureusement, Arkhana et Kikouko étaient encore en lice.

Cette dernière pu enfin s'approcher de son alliée, maintenant qu'ils n'étaient plus sous les yeux du public, pour lui parler (et savoir ce qu'elle pensait de cette drôle de mise en scène) : « N'oublie pas que c'est pour la mission que nous faisons ça, même si c'est un peu embêtant. » Le présentateur vint les féliciter et annonça la deuxième partie du concours, l'épreuve de danse : les filles devaient danser en rythme sur diverses musiques qui s'enchaineraient à la vitesse de l'éclair, quiconque ne saurait s'adapter aux nouveaux rythmes serait disqualifiée ! Elles purent se sécher et s’habiller à nouveau (en vêtements légers et serrés) puis on les rappela sur scène; la musique débuta aussitôt, et toutes se mirent à danser. Jiro n'excellait pas dans cet art, et il peinait à ordonner à sa marionnette de faire tels ou tels gestes fluides, si bien que Kikouko fut la première à être disqualifiée. Elle du quitter la scène en catimini, pour ne pas déranger la danse des 5 dernières compétitrices (dont Arkhana faisait encore parti !).

Kikouko, seule, descendit quelques marches à l'arrière de la scène, puis elle entendit un bruit furtif dans son dos. Elle se retourna et vit une silhouette abaisser une matraque sur sa tête. Directement, elle perdit connaissance; et la connexion avec Jiro fut rompu. Ce dernier, alarmé par cet accident, se redressa du haut de son toit où il était perché. De là, il ne voyait pas l'arrière de l'estrade, il ne voyait pas qui avait fait ça à Kikouko. Il descendit du toit, traversa la foule, puis arriva sur le côté de l'estrade. Il se faufila jusqu'à l'endroit où l’agression avait eu lieu. Mais il était trop tard : Kikouko et le malfrat avaient disparus. Jiro revint sur le devant de la scène : les cinq dernières danseuses dansaient toujours. Si une nouvelle allait être disqualifiée, allait-elle être aussi enlevée ? Jiro décida de rester proche de la sortie de la scène, mais un homme vint lui dire qu'il n'avait pas le droit de rester là, et malgré les protestations du mage, il fut repoussé dans le foule et on ferma l'accès à l'arrière de la scène. Jiro n'était plus en mesure d'observer qui pouvait intervenir pour enlever les femmes. Il se tourna vers la scène, espérant qu'aucune ne perdrait et tomberait dans le piège... Mais la danse endiablée continuait, toujours plus forte, toujours plus intense, et les participantes montraient déjà des signes de fatigue...

Perdu (non pas physiquement mais dans le cas de sa mission), Jiro était malmené par la foule, par les cris d'encouragement, par les huées des spectateurs devant la danse. Progressivement, les candidates étaient disqualifiées et disparaissaient derrière la scène, jusqu'à ce que ce soit finalement Arkhana qui tombe de fatigue et qui s'en aille. Alors qu'on consacrait la nouvelle gagnante qui pleurait de joie en recevant la couronne (où était l'Aigle sacré dans tout ça ? Le mystère était complet), Jiro se hâta de se frayer un chemin parmi la foule déchainée pour arriver dans une rue adjacente à la place où se déroulait le concours. Il marcha à vive allure pour contourner les diverses maisons du coin puis emprunta une ruelle pour arriver derrière l'estrade. Il y avait une tente, et Jiro passa délicatement sa tête au travers d'un pan de la toile pour voir si les participantes y étaient. Il n'y avait aucune trace d'elles, et personne n'était là. Il entendait toujours la foule, étouffée par la distance, et le présentateur qui félicitait toujours la gagnante. Où était Arkhana ? Le mage traversa la tente, sortit de l'autre côté, vers le passage jusqu'à la scène où il avait été précédemment, où Kikouko avait été enlevée.

Il tomba alors face au quatre membres du jury, qui sursautèrent presque tous en le voyant là. Jiro resta immobile, attendant une prochaine réaction de leur part avant d'agir. « Jeune... homme (?), que faites-vous là ? » Jiro ne prit pas la peine de répondre, et avança pour passer au travers du groupe et continuer son chemin, mais un des jurés le retint par l'épaule. « Je n'irais pas par là si j'étais toi, sale fouineur. » Sans prévenir, de son autre main, le juré tenta de frapper Jiro à la tête, mais le marionnettiste se courba en arrière pour éviter l'assaut et frappa de la pointe de son pied le juré au visage. Il se tourna vers les trois autres qui déjà étaient en position de combat.

« Alors si même les jurés sont au courant de ce qui se trame ici, cela veut dire que ce concours n'est qu'un prétexte pour organiser vos actions. Vous êtes démasqués, vous et votre réseau criminel. » Les trois jurés lui sautèrent dessus simultanément, mais Jiro esquiva en reculant d'un bond. Il sortit alors trois aiguilles de ses manches et les lança instantanément. Elles se plantèrent toutes trois dans les fronts des jurés qui tombèrent ensemble dans la poussière. Jiro se détourna, et se rendit compte que le quatrième juré (celui qu'il avait envoyé à terre avant les autres) avait disparu.

Il reprit sa marche pour arriver face à Arkhana qui combattait trois hommes. Aucun d'eux ne l'avaient remarqué, il se cacha derrière une caisse et, avec sa magie, créa des fils pour tendre de lourds objets qu'il avait à portée juste au dessus de l'air de combat. Si Arkhana le voyait, il lui ferait signe de regarder en l'air. Elle aurait juste à faire en sorte que les gardes soient placés juste en dessous des pièges et il lâcherait tous les fils pour les écraser.


Le quatrième juré sortit de l'ombre une fois que Jiro s'en fut allé. Il se pencha sur les trois corps des autres jurés, morts, et posa ses mains au dessus d'eux. « Réseau criminel ? Il se trompe. Ce n'est pas un réseau, j'agis seul. » Et les trois corps morts furent aspirés dans le corps du juré qui changea d'apparence, devenant beaucoup plus imposant physiquement, et son énergie magique gonflée au maximum. Il se mit en marche vers l'endroit où Arkhana combattait, prêt à en découdre avec eux.

Arkhana se débarrassa des trois gardes facilement, mais resta sceptique face à leurs paroles troublantes. Jiro voyait toute la scène mais avait du mal à comprendre de quoi il était question. Arkhana semblait réfléchir à quelque chose, elle semblait avoir compris quelque chose qu’ils auraient du comprendre depuis longtemps, et au même moment, Jiro sentit une ombre dans son dos. Ses réflexes et l’alerte d’Arkhana aidant, il évita un coup qui lui était destiné, tandis que son alliée fonçait déjà sur lui pour l’attaquer. Mais les tentatives de la magicienne furent vaines, et l’homme ne réprima même pas son sourire après le coup encaissé. Il envoya d’une simple gifle la vaillante Arkhana se fracasser plus loin. Jiro restait seul aux côtés du juge malsain, et son fidèle instinct lui somma de fuir directement.

Il fit un bond pour s’éloigner du colosse, mais ce dernier, aussi rapide que brutal, l’attrapa en plein vol par la jambe et le fit tourner au-dessus de sa tête pour l’écraser finalement au sol devant lui. Jiro sentit l’impact le déstabiliser complètement tandis que l’autre était déjà au-dessus de lui et s’écrasa contre le marionnettiste en le plaquant au sol. Jiro aurait juré avoir senti tous ses os craquer terriblement, et tandis qu’il hurlait en silence (le coup était si fort que ses cordes vocales en étaient rompues), il se décida que le moment était venu pour lâcher les caisses qu’il avait hissé au-dessus de la zone où ils se trouvaient. Il lâcha les fils magiques qu’il tenait depuis son arrivée et les diverses caisses tombèrent alors du ciel pour se fracasser dans le dos du juré, qui était toujours allongé sur Jiro. Ce dernier sentit encore plus sa douleur avec le poids des caisses s’ajoutant à son fardeau, mais au moins il avait touché le juré.

Mais sous les débris de bois, l’homme se redressa, indemne, et ricana. Il dévisagea le marionnettiste toujours sonné, allongé dans la poussière, et s’adressa à lui : « T’as eu le temps de faire ce piège ? Dommage, ça n’a pas marché. Dans une autre vie, peut-être ? » Il se pencha pour prendre une planche de bois à terre qui avait en son extrémité un long clou pointu et menaçant. Il leva les bras pour se préparer à tuer Jiro de son arme d’infortune, mais alors qu’il allait abaisser les poings, une panthère noire sortit de l’ombre et lui sauta dans le dos, plantant ses crocs dans sa nuque jusqu’au sang. Le juré hurla de rage et se dégagea du félin d’un coup de coude puis recula de quelques pas, ce qui permit à Jiro se reculer lui-même, toujours allongé, puis de se redresser en s’appuyant sur un mur derrière lui. Il avait heureusement invoqué Sheena, sa panthère, qui l’avait sauvée au dernier moment. Mais l’homme, malgré sa blessure, ne semblait pas vouloir en découdre. Comment s’en sortir face à un tel colosse ? Jiro se tourna alors vers Arkhana, espérant qu’elle était capable de lui tenir tête, car lui-même n’avait pas énormément d’initiatives pour stopper la machine de guerre qui leur faisait tête.