La Web Valley n'avait pas changé. Elles étaient toujours aussi grises, ces pierres qui formaient les grandes crevasses le long de la plaine déserte. D'ailleurs, le soleil tapait toujours aussi fort contre le sol sec, et la chaleur ardente s'abattait encore inlassablement sur le paysage. Aussi, ce soleil aveuglant était accroché tellement haut dans le ciel bleu, qu'infiniment peu de zone d'ombre se trouvait sur l'espace visible, et encore, en comptant les crevasses à l'air fraiche, mais inaccessibles.

L'horizon si lointain était bordé par une courbe si plate, que le moindre arbre, la moindre roche, le moindre buisson venant amener de l'irrégularité à cette ligne, était repérable. Pourtant, malgré le paysage grisâtre s'étendant à perte de vue, je n'apercevais même pas notre lieu de rendez-vous, à moi et aux deux autres personnes dont m'avaient parlé les parents commerçants de la jeune fille que j'étais "censée" escorter jusqu'à ce qu'elle trouve des fleurs... Mais bref, je ne trouvais pas ce lieu de rendez-vous, intitulé "un arbre près d'un rocher". M'arrêtant un instant, je regardais de tous les côtés. Un arbre... Un rocher... Mais pas un arbre et un rocher. Zut... N'aillant pas de temps à perdre, je reprenais mon "chemin" d'un pied ferme, motivée pour trouver finalement ce maudit lieu de rendez-vous.

Si je disais que ce désert n'avait pas changé, c'était que j'avais déjà eu l'occasion de le traverser auparavant, et également pour une mission (Qui consistait à trouver des épices dans un buissons. Génial...). Bien qu'elle fut réalisée sans encombre, elle m'avait laissé une mauvaise image de la Web Valley. Pourquoi donc ? Sûrement à cause de la multitude de fissure qui creusait le sol, dans lesquelles je me cassais la figure par la moindre occasion, car une mission réalisée sans maladresse n'était pas une mission que j'avais réalisée... Ces "événement" avaient fait place dans mon esprit à une sorte d'énervement, j'avançais en trainant les pieds, ce jour là, et aveuglée par une haine profonde contre la chaleur et les fissures, je n'ai pas pu admirer ce désert à sa juste valeur.

Mais aujourd'hui, j'avançais presque en sautillant, et la chaleur pesante ne me dérangeait nullement. Je me sentais en paix, et toute légère, comme si j'arrivais à voler dans le ciel épuré. Pourtant, je n'avais pas forcément de quoi être heureuse. Voilà plusieurs jours que je ne parlais pratiquement à personne, aussi il faut dire que je n'avais pas grand chose à raconter de ma vie si morne... Mais peut-être que ces deux "compagnons" qui se serait avec moi pour la mission saurait m'écouter refouler les paroles que je m'empêchais de prononcer depuis ces quelques jours passés en solitaire...

Pour le moment, je m'attelais toujours à trouver ce fameux lieu de rendez-vous, ce fichu lieu de rendez-vous ! Stoppant mon pas à nouveau, je regardais partout autour de moi, et cherchais une fois de plus le rocher et le buisson. Et sur l'étendu de la plaine déserte, je vis apparaître une espèce d'étincelle, un peu comme une étoile... Un peu troublée par la faible lueur, au loin, je me mis à courir vers cette dernière, pour finalement me rendre compte qu'elle ne se situait pas si loin que ça... Mais plus j'approchais, plus la lueur perdait de son éclat, et à la place je voyais se dessiner le fameux lieu de rendez-vous, avec coucher sur le rocher un homme. Un homme aux cheveux d'un roux si éclatant que le soleil en avait créer une étincelle de lumière. Il n'avait même pas besoin de tourner son visage vers le mien, je l'avais immédiatement reconnu. Aussi, des chevelures telles que la siennes, il n'y en avait pas énormément. Du moins je n'en connaissais qu'un, et c'était lui.

Je me rapprochais en trottinant vers le jeune homme, une grand sourire sur le visage, la main levée pour lui faire un signe. Arrivant à sa hauteur, je ralentissais doucement, avant de m'arrêter complètement devant lui, penchée en avant et les mains appuyées sur mes genoux, histoire de reprendre mon souffle pour avoir courue sur la petite distance qui nous séparait. Prenant la parole, plus souriante que jamais de le retrouver, je lui demandais en m'exclamant, tous ce qu'on pouvait poser comme questions, à un ami...

Le livre, s'était par rapport à mon écureuil qui avait déchiqueté celui-ci après se l'être injustement approprié... Étonnamment, j'avais soudainement envie de beaucoup lui parler, de lui raconter tout ce qui avait pu m'arriver depuis que nous nous étions quitté, dans le parc de Magnoria. Peut-être que le fait de ne parler à personne pendant ce temps donnait envie de se lâcher dès qu'une personne capable de vous écouter et de vous répondre se présentait, quitte à ne parler que de n'importe quoi... Je me mis donc à lui parler de ma vie. Tout simplement...
Un peu fatiguer de mon voyage, je voulu m'asseoir, en attendant l'arriver de la jeune fille. En voyant le rocher entièrement occupé par Ichigo et ses affaires, je décidais de m'installer par terre, dos appuyé contre la roche. Mais quand mon corps toucha le sol bouillant du désert, il y un mouvement de "recule", et se redressa entièrement, pour finalement choisir de s'appuyer contre un arbre, mais en restant debout. Je dis il, mais c'est moi qui le commande hein...

Parlant, au jeune homme, toujours avec passion de ma vie si inintéressante, je guettais l'horizon, mais ne voyais rien qui ne ressemblait à des marchants d'approcher. Peut-être qu'ils arriveraient par les airs. Ou alors en creusant un trou dans la terre. Ou bien qu'ils apparaitraient de la profondeur d'une crevasse. Je n'en savais rien... Tout ce qui comptait pour moi, en ce moment même, c'était de parler. De parler avec Ichigo... ♥

La bouche du jeune homme était ornée d'un agréable sourire, son visage joyeux était apaisant, cela faisait du bien. Avoir cette impression de transmettre une sorte de joie à une personne, ça me rendait moi même heureuse, mais encore plus quand le sort s'acharnait sur quelqu'un que j'aimais bien. D'ailleurs, quand il répondit à ma première question, il semblait tout aussi enthousiasme que moi, quand je les lui avait posées. Le sourire d'Ichigo grandissait en parlant, il augmentait de volume en même temps que mon soulagement...

J'aurais bien aimé l'écouter, mais malheureusement pour la prospérité du desert, je me trouvais dans l'incapacité de me calmer. J'étais bien trop heureuse de le revoir, et de pouvoir faire une mission avec lui. Même si notre première rencontre fut plutôt brève, mon souvenir était celui d'un agréable moment passé en sa compagnie. Et les gens que je serais capable de respecter et d'aimer pour toujours, moi, je le sentais dès les premières minutes passées avec les concernées. Pourtant, ces gens là, on ne les revoyait pas toujours, et on finissait par les oublier avec le temps, alors ils laissaient dans mon coeur cette nostalgie accrochée aux bons souvenirs, surtout aux bons souvenirs. Peut-être qu'Ichigo aurait fait partie de ces personnes-ci, si jamais nous ne nous étions pas revus aujourd'hui. Mais peut-être encore qu'il sera de leur côté, suite à cette mission. Pour l'instant, je ne pouvais qu'être contente de le retrouver, alors hors de question que je me calme ! Et bonjour la réaction toujours aussi excésive suite à une bonne nouvelle... Je ne me contrôlais pas vraiment. Désolée, Ichigo...

L'exemple était peut-être ridicule, mais ça pouvait toujours arriver !... Pour retourner sur la marche des questions/réponses, le jeune homme enchaîna sur sa réponse à ma première et seconde question, qui portait sur ces fameux sujet auxquels tout le monde à tellement l'air de profondément s'y intéresser. Tu vas comment ?/Quoi de beau ?...

Petite interlude pour reprendre son souffle, durant laquelle son sourire grandit encore plus, en même temps que le mien. J'avais vraiment l'impression d'être dans une compétition du "c'est qui qui va faire la plus grosse grimace de banane". Malgré ce sentiment d'envie de victoire qui me poursuivait, je me maitrisais (?) de façon à maitriser (??) mon sourire. Mais je serais la plus forte à ce jeux !

Résultat, je n'osais pas vraiment lui demander s'il avait été autre chose qu'un mage indépendant. Car profitant toujours de sa bouche souriante, quand je repris la parole, c'était pour répondre lui-même à la question qu'il m'avait retourné, et c'est tout. Nah.

Le fameux sujet dont tout le monde se passionne étant maintenant clos, Ichy enchaîna sur sa troisième réponse, à ma troisième question. Peut-être était-ce logique. Peut-être devrais-je établir une théorie sur la probabilité qu'il réponde à mes question dans l'ordre de ses réponses. Enfin on s'en fiche...

Commençant à m'égarer dans mon bavardage, je préférais en rester là sur la demande à propos du petit rongeur. Il ne fallait pas que je me perdre déjà dans mes propos, sinon la discussion ne finirait jamais ! Non pas que je n'aime pas les interminables discutions mais... Peut-être qu'Ichigo n'appréciait pas ça et... Voilà. Je m'égarais à nouveau. Et zut...

Le jeune homme vint se mettre dos contre l'arbre, proche de moi. L'ombre avait l'air de l'apaiser. Ce qui n'étais pas forcément fait pour empirer son sourire (dans le bon sens). Je lui répondais, comme je pouvais. Parce que finalement, son sourire à lui, il était plus coriace que je ne l'imaginais.

Cette question me surprit beaucoup... Effectivement, ça aurait fait sacré hasard que je me promène dans un désert à la chaleur écrasante pile le jour où Ichy attendait son compagnon pour une mission ! Je m'empressais vite de répondre, pour ne pas faire attendre encore plus ce regard portant un fond d'espoir, avec mon sourire surpassant tous ceux qu'il avait pu m'adresser jusque là...

Alors que je me perdrais, je cru apercevoir dans le dos du mage un lueur. Mais cette fois, elle n'était pas causée pas l'éclat de ses cheveux roux, mais par un petit groupe qui avançait, au loin. Je fis un signe pour avertir Ichigo de l'arrivé de nos "clients". Plus ils avançaient, plus on pouvait distinguer leur étrange manière d'être. Vêtu de grands foulard, ils avaient enfourché des dromadaires. Ou des chameaux. Un truc dans le genre... On aurait dit des nomades. La Web Valley avait beau être un désert vaste et d'une forte chaleur, cet accoutrement n'était pas forcément nécessaire... Remarque... J’espérais que leur fille ne soit pas aussi froide que l'approche des chameaux/dromadaires qui avançaient, en silence, aussi bien pour eux que pour Ichigo et moi...

Je me concentrais un peu plus sur l'objet scintillant, il perdait de son éclat au fur et à mesure que la distance se serait, et sa forme se précisait : une sorte de grande chaine, un grand filet de fer, posée sur les reins des deux chameaux/dromadaires. Quand le... Missionnaire (ils étaient au nombre de deux : lui et la fameuse jeune fille) arriva à notre hauteur, il descendit de sa selle et vint aider la demoiselle à mettre pied à terre, avant de présenter à nous. Mais voyant que je fixais le filet avec insistance, il le prit entre ses mains, et le tendait devant nous, bras écartés à cause de taille imposante de la "parure". Il nous expliqua, sous mon regard interloqué, l'utilité de cet objet ferré, la voix laissant paraître comme un soupson de nostalgie...

Je regardais les trois personnes avec des sourires un peu tendres. Mais le plus tendre de tous, il allait à Ichigo. En fait, c'était presque comme si tous mes sourire n'étaient que pour lui. Et rien que pour lui.

Le jeune homme semblait ravis d'avoir l'occasion de faire sa mission en ma compagnie. Sûrement pas plus que moi. Alors pour le lui montrer, je renchérissais mon sourire le plus possible. En fait, à chaque "provocation", je le remplissais du plus de gaité possible, mais à chaque nouvelle fois, je vainquais la possibilité précédente. Étrange, non ?

Bref, la mini-troupe se profilait au loin, et ne tarda bientôt plus à se retrouver en face de nous. C'était une jeune fille fort bien élevée qu'on nous présenta, à Ichigo et moi. Souriante, polie, sans être non plus extravagante. Remarque, c'était peut-être cette petite touche de folie qui manquait à son visage, car malgré le sourire qui le composait, son expression restait comme neutre, ou intouchable. Sans émotion, ni aucune leçon à en tirer. Un douceur peut-être brutale, si puis-je le dire. Alors peut-être que sa politesse nous stoppais sur une impression pourtant négative, comme si cette jeune fille passait ses journées entourées de domestiques, toujours prêts à la soutenir, à la servir. C'était dommage, elle me paraissait si pâle, sans vie. Il manquait la sincérité, pas vraiment hypocrite, mais presque comme. Or, un sourire sincère et un sourire hypocrite n'avait pas du tout la même façon d'apporter une "touche" d'expression à la figure d'une personne, on pouvait même dire que son visage s'en trouvait entièrement changé.

Malgré cela, mon visage aussi radieux que le soleil brulant ne pouvait s'empêcher de résister à mon envie de lui sourire, mais d'une grimace bien plus joyeuse que la sienne. Car peut-être que comme ça, le sien se transformerait pour devenir comme le mien, ou celui d'Ichigo. Et peut-être même qu'elle rejoindrait notre compétition, intitulée "c'est qui qui va faire la plus grosse grimace de banane". On aurait l'air fier, nous trois, à se pointer dans le lieu indiqué sur le papier de la mission, une grosse patate sur la figure, à sourire bêtement le plus possible, avec toujours un élan de sincérité spectaculaire.

D'ailleurs, Ichigo venait de nous présenter tous les deux, avec un ton répondant à sa politesse. Sa phrase fut également suivie d'un sourire, qu'il maintenait inlassablement sur ses lèvres depuis le début de tout cela. Quel têtu. Pour la peine, j'allais en faire de même... Et heureusement qu'il se retourna vers le vieil homme, pour lui glisser quelques mots à propos de la sûreté de la jeune fille, car sinon, ma mâchoire se serrait décrochée. Puis le vieillot s'en alla, nous laissant seulement nous, trois paumés au plein milieu de ce désert asséché. Proposition d'Ichigo face à cette évidence :

Grand sourire d'Ichigo, grand sourire de ma part. Il me regardait, alors je plongeais mes yeux dans les siens et le fixait, en marchant, et posant mes pieds au hasard sur le sol plat. Un peu gênée par le regard qui semblait s'éterniser, je redirigeais mes yeux en face de moi, et observait fixement la... "route". Nous étions donc à présent en route vers la fameuse oasis. D'ailleurs, je me demandais, comment allions nous la trouver ? Aucune indication n'était donnée sur le papier de la mission, et aucune n'avait été donné par le vieux chargé d'accompagner la demoiselle. Il fallait donc marcher, marcher, encore, dans n'importe quelle direction. SUPER.

Pendant que j'exposais à Ichigo le problème de la direction à emprunter, je lui souriais.... Ca, inutile de le préciser... Mais maintenant, j'affichais une mine un peu anxieuse, me demandant comment on allait s'y retrouver, si on se perdait, ou qu'un d'entre nous disparaissait. Je lui en parlais, avec la tête qui regardait par terre, trainant des pieds, comme pour exprimer mon angoisse...

Je shootais dans un caillou, suivait sa course du regard, avant de relever la tête pour à nouveau me figer sur le visage du jeune homme, et au fûr et à mesure que l'on avançait et que je le regardais, je retrouvais un peu le sourire, pour au final lui afficher la même bouche que les précédentes. Malheureusement, ce moment ne dura pas bien longtemps, car une secousse légère, mais arrivée brusquement, vint déranger le calme de la Web Valley. A cause de cette dernière, je perdais l'équilibre, n'ayant que le vide pour m'appuyer, et trébuchait sur le sol en tombant a quatre pattes dessus, avant de me relever aussitôt.

Derrière nous j'avais entendu un cris, et ça ne pouvait pas être Ichigo, la voix était celle d'une fille. Peut-être que Marguerite avait crier suite à la surprise de la secousse. Le problème, c'est que quand je me retournais pour vérifier si elle allait bien, il n'y avait pas de Marguerite. Inquiète, et sur le coup affolée, je commençais à paniquer de ne la voir apparaître nulle part. Peut-être qu'elle était tombée dans ces grandes fissures ? Qu'elle avait profité de notre inattention pour s'enfuir ? Apeurée, je commençais à l'appeler...

Mes paroles furent coupées par une seconde secousse, sauf que celle-ci n'eut pas un issue semblable à la première (disparition de la jeune fille), mais à une toute autre conséquence (apparition d'une taupe). Cette taupe était... Wha, différente des taupes normales... Apparemment elle était active au soleil, voir même enragée par cette chaleur, pour se protéger de celle ci elle se cachait dans les crevasses pour bondir sur sa proie... Et elle était aussi beaucoup plus grande que la normale, de presque la taille d'un homme...

Elle tenait la pauvre fille dans sa gueule. Même si elle nous menaçait méchamment de ses crocs, tantôt moi, tantôt Ichigo, elle n'avait pas l'air bien puissante... Malgré tout, je ne pu m'empêcher d'être un peu impressionnée par la taille peu ordinaire de la bête. Alors mon temps de réaction joua encore de ses tours, et décida de me pétrifier sur place. En gros, ma réaction, ce fut de ne pas en avoir.A part peut-être jeter des coups d’œil inquiet à mon coéquipier.

Je n'avais pas envie de me mettre déjà à jouer les princesses en danger mais là... Étant donné que sur les trois, deux étaient incapable de bouger (et vu que y'a pas d'animaux dans le désert, beh, trololo), j’espérais qu'il veule bien faire quelque chose... Pour que son sourire puissant réapparaisse sur sa bouche... Et que la créature cesse de m'aveugler pour que je puisse enfin replonger mes yeux dans ceux d'Ichigo. Et rien que dans les siens...

Pourquoi restais-je là, sans bouger, à regarder la scène se dérouler, une fois de plus ? Pourquoi une fois encore, ce n'était pas moi qui était là, à combattre contre la gigantesque taupe, à me battre contre celle qui menaçait la jeune demoiselle que j'étais censée protéger ? Heureusement qu'Ichigo était là, sinon la pauvre Marguerite ce serait déjà fait engloutir par les fentes du désert, ce qui aurait été plutôt embêtant. Alors comment ne pas se sentir coupable en voyant mon partenaire essayer d'ordonner à la taupe de recracher notre cliente, alors que si ma pétrification totale s'envolait comme elle était venue, mon pouvoir aurait la contrôler directement ? C'est sûr qu'il y avait là de quoi se sentir coupable, même si le jeune homme ne semblait pas en être vraiment dérangé...

Pourtant, ce sentiment de culpabilité grandissait au fur et à mesure que la bataille, aussi courte soit-elle, s'avançait, ou se déroulait. Surtout quand le coup de patte de la taupe vint griffer le bras de mon partenaire, qui risquait d'en garder des petites coupures pendant quelques temps... De quoi me sentir encore plus fautive. C'était vrai que, par rapport à sa résistance, il ne devait pas souffrir le martyre non plus, mais hein, ça me faisait toujours un peu mal.. Il m'avait dit juste avant, de ne pas m'inquiéter, ce que je me trouvais incapable de tenir, et que, malheureusement pour le reste de mon entourage, je ne tiendrais sûrement jamais.

Quel soulagement quand notre cliente fut recrachée, et la taupe assommée par mon cher coéquipier de mission. La pauvre jeune fille était sûrement un peu sonnée par ce que venait de lui arriver, alors je la rassurais un peu, en lui tapotant sur une épaule. Je sais, ça ne sert à rien, mais pour moi c'est comme psychologique, ça offre un réconfort, et sûrement plus à moi qu'à elle...

Monté sur le dos de la taupe, mon partenaire venait de nous lancé cette question, histoire de s'assurer que nous nous portions bien toutes les deux. Je jetais un coup d'œil timide à la demoiselle, pour remarquer que celle-ci allait plutôt bien, un peu bousculée par la rapide apparition de la bête, mais dans l'ensemble, pas de problème apparents pour elle. Et moi, il n'y avait pas vraiment de commentaires à faire. Il ne m’était rien arrivé, donc... Je regardais mon partenaire, en haussant les épaules, l'air de lui faire comprendre que tout allait plutôt bien. J'aurais peut-être dû lui retrouver la question... Mais ce vilain me coupa la parole !

Ce satané écureuil. On ne l’oubliera pas, celui-là… Avec toujours cette petite larmichette en coin de l’œil, suivi de la pensé au pauvre livre déchiqueté dans l’estomac du rongeur. Les pages réduites en bouillie, illisibles, décompactées, l’encre extraite des lettres pour former des taches foncées sur la purée humide… Pwah… Il ne s’était pas trompé. Je lui lançais juste un regard qui confirmait son doute, mais aucun justificatif ne sorti de ma bouche, puisque le méchant enchaîna directement, me coupant à nouveau la parole ! Baka.

Finalement, tant mieux, qu’il m’ait coupé la parole ! Au moins, il venait de débiter une bonne idée. Et moi, ça m’apprendra à traiter les gens d’idiots alors qu’ils sont magnifiquement malins. Mes yeux jetèrent un vif coup d’œil en direction de la bête, sur le sol, Ichigo toujours assis au-dessus d’elle, et il la surveillait de près. Gare à elle si elle osait sourciller des sourcilles qu’elle ne possédait pas. Non mais oh.

Je donnais un léger coup de jambe dans la truffe de la taupe, les animaux sont sensibles à ça. Elle se réveillerait plus vite. Et nous n’avions plus qu’à nous installer ! Ichigo était déjà en place, alors on aidait à faire monter Marguerite sur le dos de la chose. Elle pourrait se mettre devant nous deux, ça lui éviterait une éventuelle nouvelle attaque. Comme ça, on pouvait surveiller devant. Dommage pour Ichigo, si on attaquerait par derrière, ce serait lui qui prendrait…. Je me retrouverais devant. Enfin, la plus devant qui puisse « potablement » guider la taupe. C’était donc à moi de la diriger. Et il fallait que j’avoue, piloter une taupe géante, ce n’était pas vraiment dans mes habitudes. Pas vraiment.

La coquine. Elle venait de reprendre conscience de sa situation, et me voilà une nouvelle fois coupée dans mon élan. Et zut. Et quel élan soudain d’énergie ! J’en avais même la peur qu’elle se cabre avant que nous ne retombions tous en arrière (et là encore, le mage se serait tout pris) ! Mais heureusement, je la contrôlais. Peut-être difficilement par la faute de sa puissance, mais je la contrôlais. C’était un peu dur, ordonner une direction à un animal, ou disons, une direction que nous ne connaissions pas. Mais elle, elle savait où aller. Alors je lui faisais confiance, et la lâchait, comme ça, pour quelle nous mène à l’oasis.

GRAVE ERREUR DE MA PART, étant donné que celle-ci fonça directement sous terre, nous enfonçant nous trois avec elle. Finalement, la plus mauvaise place n’était pas forcément celle de mon coéquipier. Là, c’était la pauvre Margueritte qui se prenait tout en pleine face, alors que ce chanceux était protégé par nos deux corps ! Et mais mains se contentaient de s’enrouler autour de l’abdomen de la jeune fille, pour la maintenir bien en place sur la « selle ».

Quelles étaient moches, ces galeries ! Je ne m’attendais pas au ciel, mais ça, ça ne ressemblait pas à des chemins creusés par une taupe ! Il n’y avait presque pas de terre, juste une sorte de pierre qui s’effrite sous notre passage. Aussi, il y avait des racines qui pendaient du plafond, aussi durent que la roche qui les retenaient prisonniers. C’était laid, affreusement laid. Même si la température y était plus fraiche, il n’y avait presque pas d’humidité… Au moins, le soleil n’était plus aussi assommant, vu d’en dessous du dessous. D’ailleurs, la surface, on la voyait se profiler au loin… Puis la taupe qui galopait dans le vent inexistant nous approchait peu à peu de la chaleur, comblant la distance avec la vitesse de ses pattes solides qui butaient en rythme contre les parois des galeries.

Le soleil était enfin atteint, un énorme bond en l’air pour effectuer la sortie brutale du tunnel, accentuant la chaleur qui, à nouveau, attaquait brusquement nos peaux. Surprise pour nous tous, pas d’Oasis en vu… Mais alors… Pourquoi la taupe s’était-elle stoppée ? Pourquoi elle refusait d’avancer malgré mes ordres ? Je ne sais pas pourquoi, j’avais comme l’impression que nous n’étions pas arrivés à bon port…

Je ne me sentais pas rassurée du tout. Avec en plus Marguerite que je serais fermement dans mes bras, ce n’était pas forcément pour arranger les choses… Pour me rassurer, j’aurais bien aimé pouvoir regarder le jeune homme qui était derrière moi. Mais ce n’était pas possible… Alors j’espérais que, très rapidement, l’on pourrait descendre du dos de cette taupe, pour pouvoir se regarder, et se sourire à nouveau, encore… Et encore.