Ne sait pas s’battre, ne sait pas s’battre, j’vais leur montrer moi si je n’sais pas m’battre. Non, je ne suis absolument pas vexé, et encore moins contrarié, c’est archi-faux. Je sais parfaitement bien me battre. Mes acrobaties de singe de foire me permettent d’esquiver de nombreux coup et je manie l’épée de manière plus que correcte. Je sais même me servir d’un arc avec une précision hors pair. Il est vrai que je fais difficilement la différence entre une hache et une massue, mais ce sont des armes de brutes, de troll et de nains d’jardin. J’entre dans la salle, puis je donne un violent coup de pied dans la porte derrière moi pour la fermer. Pour qui ils se prennent, tous ces nouveaux mages de la guilde, à me sous estimer parce que ma magie n’est pas offensive à souhait ? Tous ces mages de rééquipement débiles à peine capables d’aligner deux mots, tous ces mages de feu au tempérament explosif dont la magie peut être stoppée par un simple seau d’eau, je vais leur montrer moi.

« Depth of the feeling ! »

Avec cette nouvelle technique, je vais leur… Quoi, une enclume ? Erf, c’est lourd. Je lâche avec dégoût l’objet qui vient d’apparaitre devant moi ; il atterrit dans un bruit sourd qui me mutile littéralement les oreilles. Un rien est douloureux, quand on est entré dans une colère aussi colorée que celle-ci. Sans retenu, je shoote dedans. Evidemment, simple résultat, je me fais mal au pied avec une grimace hérissée, mais je suis bien trop fier pour hurler. J’ai la simple et bonne impression que le destin s’est amusé lui-même à me dénerver, et à faire un nœud avec chacun de mes nerfs, un par un, pour en faire une pelote des plus artistiques et des plus torturées. Je soupire longuement, incapable de rester dans un tel état d’excitation bien longtemps. Suis-je condamné comme ils l’affirment tous à être un nain blond incapable de contre attaquer avec fougue et classe ? Je refuse de me laisser dans un pétrin pareil, je dois trouver une solution.

Et là, ça a fait tilt dans mon esprit, comme les ampoules qui s’allument dans les bédés quand les héros sont ingénieux. Je retourne chercher ma sacoche, que j’avais abandonnée par loin, et j’en sors ce bouquin que j’ai emprunté à la bibliothèque l’autre jour. Il m’avait bien aidé à comprendre ma magie la dernière fois. Bien que ce genre d’apprentissage ne me ressemble pas, le genre de technique que je veux apprendre ne me ressemble pas non plus, alors autant changer d’angle de vue. Après avoir farfouillé les pages, je suis tombé sur des éléments bien intéressant. Ce chapitre tombe juste après celui que j’ai lu la dernière fois. Il s’agit effectivement de donner une forme concrète à une énergie magique, mais cette fois-ci, il faut conserver la nature psychique de l’élément. Que de théorie complexe pour dire que le bonhomme fait apparaitre des flèches magiques. Voyons, et si j’essayais ? Le livre sous le coude, je lève la main droite et prononce la formule magique

« Que ma volonté prenne forme et que les flèches volent ~ Asuna ! »

Et c’est alors qu’une multitude de flèches lumineuses apparurent autour de moi telle un ciel étoilé, et partirent droit dans le cœur de ces mages arrogants de tantôt pour les châtier de leur comportement sur moi. Haha, qu’est-ce que je suis fort et surdoué. Oui enfin, ça, c’est dans mes rêves les plus fous, là, il ne s’est juste rien passé et j’ai l’air d’un gros attardé de foire. Humpf, que c’est embêtant. Je dépose le livre puis ferme les yeux avec une grande inspiration. Pourquoi ? Parce qu’ils font toujours ça dans les films. Enfin bref, me concentrant sur mon but à atteindre, je réitère l’opération. Sans succès. Abusé. Comment ils peuvent apprendre la magie comme ça, les gens lambda, sérieux ? Agacé par cet échec, je saisis le livre d’un geste vif et je parcours rapidement les différents paragraphes. Comment ça, s’approprier la magie ? La faire sienne ? Comment je suis supposé faire mienne une magie qui n’est, justement, pas la mienne ? Sont crétins les érudits, parfois. Il est écrit ici que je dois lui donner une forme propre et la ressentir. Bon, et si je commençais par la sentir ?

M’y prenant avec un peu plus de sérieux, je dépose le livre et je m’éloigne vers le centre de la salle. Voyons, et si j’essayais de ré-inventer cette technique, ce serait certainement plus lucratif. Et au moins, ce sera plus ou moins ma propriété. Je n’ai jamais été doué en droit, alors ne chipotons pas sur les détails. Je veux créer ici et maintenant une magie qui peut causer du mal, de la douleur, et donc du tort. Il faut donc que je m’inspire de ce qu’il vient de m’arriver, ça semble évident. Mais pas seulement, me plonger dans mes souvenirs de haine et d’impuissance servira peut être ? Essayons donc un coup.

« J’en appelle à l’essence de ma magie : Will power ! »

Cette fois, je sens la magie se concentrer en moi, sensation très familière. Je concentre avec une énergie mentale cette force en face de moi et je vois apparaitre une lueur, puis une lame bleuté qui s’éparpille presque aussitôt dans l’atmosphère. Et mince, j’y étais presque. En sueur, je reprends mon souffle puis retente ma chance encore une fois, puis encore une fois, pour arriver toujours à ce même résultat frustrant. Il y a quelque chose qui cloche, c’est comme si cette épée ne voulait pas me servir. Elle est bien là, mais refuse de rester pour obéir aux ordres que je pourrais lui donner. Au moins, j’ai réussi à lui donner une forme propre, et un nom qui est mien. Aurais-je oublié quelque chose d’essentiel ? Pourquoi se révolterait-elle ainsi ? J’ai bien passé un bon quart d’heure à me tortiller les neurones sur ce sujet, tout en en profitant pour me reposer un peu physiquement. Et puis ça m’est venu comme une évidence.

Cette lame qui peut me servir ne suit pas qu’un seul axe. Elle n’est pas là pour trancher bêtement toute personne me haïssant. Ce n’est pas moi. Non, elle n’est pas constituée de colère, mais bien de toutes les émotions qui me traversent à la fois. Elle est aussi là pour défendre, pour être loyale. Me focaliser sur un simple aspect unique ne me mènera à rien. Ca, c’est pour les mages de pacotilles qui ne réfléchissent qu’avec leurs muscles. Une nouvelle détermination au fond des yeux, c’est avec une confiance en moi inhabituelle que je prononce une nouvelle fois ma formule.

« Noble lame de la vérité, tranche le faux et protège ton maitre : Will power ! »

C’est là que tout a changé. Le sort est venu de lui-même et deux lames dont émane une faible lueur blanche se sont mises à léviter devant moi. Les maintenir ainsi me demande moins d’effort, maintenant que j’ai compris leur fonctionnement. Je m’amuse à les diriger en bougeant les mains, sans pour autant les toucher, par la force de ma pensée. C’est… agréable. Je ne saurais pas expliquer. Je finis par en prendre une directement dans ma main, ce qui ne fait qu’amplifier cette sensation de bien être presque surnaturel. Eh bien, si apprendre dans les livres est quelque peu barbant, ça reste vraiment gratifiant.

Spoiler: