Toi, qui n’as rien connu, dans ton sanglant passage,
D’égal à ton bonheur que ton adversité
psychologie
Les hommes tombent à genoux devant les paysages envolés dans des vapeurs lourdes, quand le feu vient lécher leurs pieds et les portes de leurs cités. Ils flanchent quand leurs mains se referment sur le cou tendre de la vie, quand leurs doigts se font truchement d'un pouvoir divin, malsain, meurtrier. Ils vacillent sous les casques, valsent, viennent se perdre dans l'atrocité des guerres.
Mais pas Zulria. Zulria en est revenu.
Toutes ses peurs se sont éteintes, saignées par les pores de sa peau.
L'homme reste droit dans un corps discipliné, ne sourcille pas. C'est comme ça, façonné par les réalités du champs de bataille, il garde des séquelles d'un entraînement militaire. Avec la violence, ses faiblesses ont été emportées dans le vent froid d'Iceberg pour laisser enveloppé Zulria dans son pragmatisme inflexible.
Il n'a pourtant pas pris le goût âpre disséminé par les canons, contrairement à ce que l'on pourrait croire. Non, ce n'est pas par fermeture d'esprit qu'il se borne à vouloir suivre la voie rationnelle, mais parce qu'il se sent le besoin de comprendre. Lui, il est homme de savoir. Alors il écoute planté là, la silhouette qui se découpe droite, et vous regarde avec ses yeux chauds d'intérêt. Zulria creuse sans jamais brusquer, cherche le pourquoi sans vous juger. Il nourrit cette soif sincère de connaître vos retours et ne triche pas dans ces moments où son attention est toute à son interlocuteur.
Mais Zulria, il s’enquit sans s'inquiéter. Quarante centimètres peuvent se trouver entre vous et lui qu'un monde vous sépare quand même, et c'est précisément pour cette raison qu'il est dangereux. Réconfortant, apaisant, charismatique, il incarne la lanterne par laquelle le papillon de nuit se laisse séduire sans se méfier, là où ses ailes consumées lui crient de fuir.
Cependant Zulria vous voit, splendide, et vous apprécie dans tout ce que vous avez à offrir. Il embrasse chacune de vos qualités. Cet homme n'a pas d'ennemis, que des adversaires qu'il considère valeureux et se déploient devant lui comme autant de personnes qu'il respecte. Il aime solennellement les droits, les doux, les bons, les engagés et les fougueux. Son dos se courbe humblement devant le courage et la dévotion, devant les amoureux. Zulria se retrouve dans ceux qui pourtant ont tendance à le haïr, et cours lui aussi après un idéal que jamais il n'a failli à perdre de vue. Pour cette raison, l'estime qu'il vous porte ne l'empêchera pas de vous passer au scalpel rigoureux de son ambition.
Alors pour assouvir l’ascension vers son utopie, Zulria, il piétine tout ce qui peut y faire obstruction, se fait arme humaine pour servir ses desseins. Et après avoir passé des nuits à entendre les tirs feutrés autour de lui, il est aujourd'hui de ces résidus que les conflits peuvent laisser dans leurs sillages : une défaillance. Peut-on encore parler d'humanité quand la violence n'est plus conséquence de passions ? Quand les actes hystériques deviennent froids et réfléchis ? Le pardon n'existe pas pour celui qui peut justifier ses crimes par des motivations rationnelles, et Zulria ouvrira la voie sur le chemin des damnés.
S'il a rejoint Ajatar Virke, c'est, paradoxalement, dans l'espoir d'un avenir meilleur. Et d'une main de fer il couche ceux qui ne voudraient pas de son monde égalitaire où les puissants ne régneraient plus. Il vous gracie de son animosité dans l'espoir secret que celle-ci soit la clé pour changer les choses, partisan de l'extrémisme pour qu'un jour la vie soit plus douce.
Peut-être aurait-il pu être quelqu'un de bien, Zulria, mais la réalité l'a rattrapé, éviscérant doucement son âme pour le faire glisser dans la peau d'un homme que l'on craint.
background
Souviens-toi de ne pas oublier.
iceberg
Quand Zulria fermait les yeux, des volutes de haine giclaient sous le voile de ses paupières. Il revivait inlassablement ces scènes aux contours semblables aux traits névrotiques de celui qui couvre sa feuille avec beaucoup trop de forces pour calmer sa rage, dardées de déflagrations rougeâtres, de silhouettes qui se mouvaient sans jamais avoir forme humaine Pourquoi est-ce qu'il rêvait le champs couleur sang ? Il le savait, c'était absurde, tout était plus blanc qu'autre chose ici bas.
-Tu devrais dormir Zulria.
L'intéressé se redresse, éreinté par le poids de ses propres os. Si seulement il pouvait se rendre compte qu'il était épuisé, si sa tête n'ignorait pas les cris de ses muscles ankylosés, malmenés, saignés à vif par la douleur, son corps aurait peut-être suivi pour l'entraîner dans une longue léthargie. Mais il s'en foutait et avait pris l'habitude d'étouffer les gémissements sourds de sa carrure abîmée, pourtant taillée par et pour le froid, témoignage silencieux qu'il était homme d'Iceberg.
-Passe-moi du café, s'il-te-plaît.
Zulria empoigne doucement la tasse qui lui est tendue. Café ou non, cette mélasse en a l'odeur, âcre et forte, un peu calcaire, la faute au fond de cafetière. De ces odeurs assez puissantes pour couvrir l'entêtante présence de celle de sueur dans les nuques, qui perle sur les soldats insidieusement, de jour comme de nuit.
- Merci... Je t'avais pas entendu revenir. Tu es là depuis longtemps ?
- Assez pour savoir que tu te retournes depuis cents ans dans cette putain de couchette, déclare calmement l'homme qui lui fait face, assis dans sa petite chaise de toile. Zulria sait qu'il ne bougeait pas, mais ne relève pas ; l'autre le sait d'expérience et de nuits à attendre avec lui dans ces quelques mètres carrés. D'autres dormiraient depuis longtemps à ta place.
- Si tu parles de ceux qui rejoignent la caserne demain... désolé de te décevoir, je n'en fais pas partie.
- Ah ? Je pensais qu'on envoyait les tanks en démonstrations pourtant, histoire d'aller pêcher du rookie. T'as une bonne gueule, ils pourraient te faire passer pour le résultat d'un mois au front. Tu vois le tableau : moi, à gauche de l'affiche, en « avant », et toi, gros bras suintants, le « après ». Le marketing militaire, le vrai ! Zulria rit doucement.
- Vois le bon côté des choses, ça me permettra de profiter plus longtemps de tes autres talents !
- Petit coquin...
Ils rient encore. Vlad n'est pas un type très costaud, c'est vrai. On le verrait bien faire de la comptabilité, avec son nez fin déformé par un port de lunettes passé et son petit sourire juché sur un visage creusé de trentenaire bien entamé. Dans une autre vie, pourtant, il avait été tout sauf de ce bord. Vald était un botaniste passionné, que le devoir avait rappelé à des entreprises autrement plus gargantuesques que l'observation de la druse : la guerre. Parties en fumée, les délicates plantes qu'il venait avant observer dans les steppes du pays passé l'hiver. Ici tout le monde se foutait bien du cycle de pollinisation. Mais les quelques heures où ils se retrouvaient dans leur cocon de toile cirée, on pouvait entendre l'homme dispenser de véritables diatribes sur la vie végétale à Zulria, qui buvait, passionné, ses paroles au même rythme que le café. C'était alors une éclosion de corolles contre la destruction, une floraison de savoir qui s'épanouissait dans le plus inhospitalier des lieux, qui avait fait germer en eux une forme abrupte, et par dépit, d'amitié.
Souvent Zulria se disait que cet homme pas bien grand avait entassé un savoir à bout de bras, pour nourrir les livres et enrichir ses pairs, et que ce qu'ils vivaient là était l'autodafé de cette connaissance. On brûlait sur la place publique, d'un revers de bras, le génie de dizaines d'années.
Comment s'étaient-ils tous retrouvés là, sur l'autel des condamnés, autant d'instruments pour mener des combats qui n'étaient pas le leur ?
Zulria voulait penser qu'il s'était engagé pour protéger ces mêmes visages qu'il avait croisés ça et là. Il eut voulu ouvrir grands ses bras pour accueillir cette explosion insoupçonnable de mort, balayer de son dos large les vapeurs acides, étouffer les cris de peur de sa chaire pour ne plus jamais qu'on les entendent. C'était noble et presque farouche, mais il avançait aveugle. Il se savait emboîtant le pas d'hommes calfeutrés dans leurs tours d'ivoire qui pour combler leur ennui rebouchaient la terre qu'ils meurtrissaient par des cadavres. Lui voulait la paix, mais empilait ces cadavres pour entrevoir la lumière au-dessus des cimes calcinées. Aussi s'était-il longtemps posé la question de pourquoi il était encore là après trois années, s'accordant sa propre haine plus qu'à ces têtes couronnées qu'il voulait voir tomber. Zulria était monstrueux, et si roi il était, il ne l'était que des mouches, même pas souverain de lui-même, incapable de pleurer quand il se voyait encore courir vers l'autre pour qu'il rejoigne les charniers. Parce qu'il aurait voulu pleurer, hurler lui, mais ces soldats couchés ne l'empêchaient plus de se tenir droit et invaincu.
Puis un jour il avait compris pourquoi. Ces hommes étaient tous là pour une raison. Ils étaient venus pour faire de son corps le tapis de leurs pas déterminés, chacun messager de sa propre soif de changement. Et ce changement ne pouvait pas être celui que Zulria espérait.
Ils méritent que tu les tue.
Honore une dernière fois leurs principes, érige-les martyrs, fais d'eux les maîtres absolus de leurs convictions. Ne néglige pas leur volonté et les motivations qui les animent. Ils sont toi, Zulria, le squelette vulnérable et fragile sous le feu, mais leur foi ne se brisera que sous tes coups.
▭
- Allez. Une nouvelle journée dans la peau de personne.
Vlad tape amicalement l'épaule de Zulria avant de lui aussi sangler son casque.
-A demain dans une autre vie.
Leurs regards s'entendent. L'autre vie, c'est ce soir ici même, de retour dans une semaine ou dans la tombe : qui sait, partir est synonyme de mourir encore chaque fois ; on ne renaît que pour mieux crever.
- Bonne chance matricule 1I 783 355 8RC.
Bonne chance Vlad.
Vingts années à n'être rien, qu'un casier vierge qu'aucun événement majeur n'était venu à ébranler. Il avait suivi le destin sans grands tumultes que d'autres avaient connu. Et voilà que maintenant Zulria courait dans l'immensité des plaines d'Iceberg, que ses pieds battaient le sol à la poursuite de traces aussi fraîches que la neige dans laquelle elles s'étaient imprimées. Où sont-ils ? Suis-je encore cet enfant qui fuit le loup ? M'a-t-on passé le relais pour que je devienne moi-même prédateur ? Zulria se mord la queue, il regarde autour de lui mais ne sait pas sur quoi poser ses yeux. Il n'y a rien à l'horizon mais il devine ces présences. Il est encore cette fois trappeur traqué.
Et dans ce décor le vent le fouette, l'emmène aux confins de ce qu'il peut apercevoir. Ce n'est pas la première fois qu'il se retrouve là sur le terrain, le danger aussi tangible, et se meut discret, voûté, à travers les quelques obstacles de cette immense étendue glacée. Pour lui c'est presque une habitude, de celles auxquelles on se réfère en parlant des itinéraires que l'on trace tous les matins, que l'on décrit cents et cents fois au point d'en imprimer les moindres aspérités. Zulria est serein au milieu de la panique que son corps a empruntée. S'il est emplis de craintes tues, il avance sans tergiverser. Il n'est que soldat.
Suivant le geste qu'on lui indique, il s'accroupit derrière une bute.
Ce jour-là, lui et d'autres étaient partis en mission d'éclairage sur ordres directs, venus des plus hautes sphères militaires. La guerre s’essoufflait depuis quelques mois maintenant, mais certaines troupes étaient restées sur place pour assurer une victoire certaine au pays. Aussi, si la diplomatie se chargeait manifestement de régler les dernières questions de pouvoir, la guerre n'en était pas moins un dialogue à deux mesures. Les forces armées restaient alors le meilleur moyen pour convaincre l'autre de sa bonne foi en matière de paix, moteur de la persistance de quelques conflits ça et là sur les cartes. Mais Zulria savait d'expérience que s'il en restaient peu à canarder, c'était aussi les meilleurs qui les attendaient, ceux désignés pour être représentants de la force de frappe d'un parti entier. Lui et tous ceux qui suivaient étaient à cette image de héros meurtriers et marchaient réunis sous le symbole de combattants aux prouesses reconnues. De héros, vraiment ? Tout juste bons à être déployés pour une confrontation d’ego.
- On se sépare. Les Yankees, vous coupez. Je contourne la forêt avec les autres.
Zulria opine du bonnet et se lance après la fraction Y, l'une des plus réduites qui soit. Il y reconnaît les visages qui serpentent à quelques mètres : la plupart sont des noms qui ont longtemps circulé dans les rangs. Il se sent capable, comme c'est rarement le cas, d'identifier chacun d'eux.
Déjà ils atteignent les silhouettes noueuses des premiers arbres, entités titanesques qui se découpent féeriques au milieu de ce néant albâtre, leurs corps se fondant insignifiants dans la densité des troncs. Soudain, Zulria s'arrête pour scruter ce détachement éparses de soldat, aussi absorbés que lui, mais par les environs silencieux.
Il y a l'Ourse, une petite blonde trapue. Ses longs cheveux dépassent de son casque, se prenant dans les coutures de son uniforme. Le Phasme se tiens près d'elle, longiligne, avec ses sourcils énormes qui jurent avec la ligne fine de ses traits. Tapis dans les racines, la réputation de chacun n'a plus grand importance pourtant, mais Zulria s'attache à les détailler, de plus en plus dérangé à mesure qu'il se souviens de qui les rumeurs racontent qu'ils sont. Plus devant, enfoncé dans l’enchevêtrement végétal, une peau d'ébène sur laquelle sont montés deux yeux verts. Colonelo, l'homme qui faisait exploser les sols, les murs, les ennemis : le mage volcanique.
Zulria ramène son regard sur la cime des arbres, où la canopée laisse deviner dans une fine dentelle un ciel limpide, éblouissant de clarté. Il se sent loin, pendant un instant, vole au dessus de sa propre tête, même si tout lui crie que la tension est palpable au milieu de toute cette plénitude.
Un pied, l'autre, le mouvement reprend. Il faut avancer, aller au devant. Ne regarde pas ailleurs, Zulria. Ne regarde pas. Tu la sens, n'est-ce pas, cette fameuse anomalie qui vient se loger dans ta routine de faucheuse ? Arrête, ne lève pas la tête, ne la toise pas quand elle viendra à toi.
« EMBUSCADE. »
Déflagration.
On y voit plus rien. Les alentours sont toujours aussi silencieux. Ils sont devenus muets au moment même où l'air a hurlé pour ne pas qu'on entende gémir les arbres, pour signifier que plus jamais les hommes ne s'esclafferaient.
Le corps de Zulria se déchire de toutes parts et lui coule entre des mains qu'il ne sent déjà plus. Tout son poids s'est décuplé, a enflé, s'est explosé quelques pas plus loin dans une terre cramoisie. Des viscères qu'il ne soupçonnait pas exister au fond de lui implosent et brûlent la moindre parcelle de son intérieur. On l'a dépecé, privé de son épiderme pour que ses organes soient exposés à l'air mordant de cette belle matinée. Zulria souffre. Il ne perçoit ni les sons ni le temps alors que les secondes s'égrainent au rythme de son cœur bouillant, qu'il sent cogner au milieu de ses os défoncés, bouillie de moelle attendrie dans le bain marie de son hémoglobine.
C'est peut-être ça, l'enfer, avoir la mort au bout des lèvres sans que jamais on ne puisse vraiment y goûter. Une perte lente de tout ce qui fait de soi un homme, pour en revenir à cet état de chaire malléable.
Le visage de Zulria se dessine à travers les sillons d'une mâchoire, incapable de s'ouvrir pour expier la douleur, qui se crispe à l'extrême. Il n'aurait pas su dire si c'était réellement le cas, mais il pensait s'être mordu la langue au sang dans un ultime effort pour ne pas perdre conscience. Alors il restait voûté sur lui-même, les membres désarticulés, à subir, et ne voulait pas fermer les yeux, parce qu'il savait que plus jamais il ne risquait de les rouvrir après ça. Dans le filet de lucidité qu'il conservait, il s'étonnait de n'avoir jamais autant ressentis la vie que si proche de la fin, alors même qu'il était incapable de quoi que ce soit. A cette idée ses muscles se relâchèrent un peu, libérant une nouvelle vague de signaux de douleur, inondant d'une sensation abrasive chacun de ses vaisseaux. Il l’accueillie. Zulria mourrait. Il n'était pas effrayé pourtant, n'avait pas non plus envie d'en finir plus vite pour faire s'éteindre avec lui son calvaire. Il se contentait d'endurer son sort avec le calme qui était permis à quelqu'un agonisant.
J'ai mérité la mort. Qu'elle vienne !
Puis une nouvelle vague de douleur, incomparable aux précédentes. S'il ne pouvait pas hurler, Zulria le fit pourtant, vomissant un son rauque qui se brisa dans sa gorge. Un spasme suivit, saisissant toute sa carcasse en même temps que l'adrénaline atteignait son cerveau. Il ne mourrait plus, il le sentait, mais une aura insupportable broyait le semblant de forces qu'il lui restait. Quelque chose s'insinuait dans ses tissus : quelque chose d'extérieur à son être.
C'était bienveillant.
Surtout ne bouge pas.
Sous le regard hagard de Zulria, le sang de ses bras coagule pour lentement laisser se refermer les plaies. Il ne mourra plus aujourd'hui, alors il ferme les yeux, incapable d'être plus longtemps acteur dans le théâtre à feu et à sang qu'est son corps.
Je suis Eir. Dors, repose-toi guerrier abîmé, un jour prochain je serais de nouveau à ton chevet, je chevaucherais pour t'annoncer que la mort t'as cueilli, mais pas ce soir. Les dieux en ont décidé autrement. Ils te veulent à leur côté, Zulria, mais comme envoyé parmi les mortels. Nous t'avons choisi, toi, pour ta justesse, pour l'amour violent et passionné que tu as pu porter dans tes coups meurtriers. Nous te voulons pour incarner avec nous le sort. Il sera entre tes mains désormais, et nous porteront avec toi le glas en accompagnant tes batailles. Salue-nous, valeureux : nous sommes les Valkyries, et aujourd'hui je panse tes plaies pour que demain tu combattes avec mes sœurs. Appelle-nous, nous viendrons à toi. Tu es un mage désormais. Nous serons ta source de pouvoir, Zulria. Prends donc ce que j'ai à te donner et fais-le tiens. Nous nous reverrons.
- Zulria, c'est ça ?
La voix de la jeune femme dénotait vivement avec son apparence un peu ramassée. Son timbre était doux, apaisant, alors que son dos semblait vouloir toucher les notes les plus graves, toucher sol. La dernière image que Zulria s'en était faite la montrait bien plus fière, la poitrine dardant et le dos cambré.
- Moi-même. Je ne vous demande pas qui vous êtes.
- J'espère pour vous que vous me connaissez ouais, ou bien vous êtes bien naïf de me laisser m'asseoir, dit-elle nonchalamment en haussant les épaules. Avec une gueule comme la vôtre je doute que des gens aient très envie de s'approcher de toute façon. Elle joignit le geste à la parole en approchant vivement son bras de Zulria, avant de se saisir dans une extrême lenteur de ses joues. Entre ses doigts, l'Ourse fit tourner son profil, les yeux cramponnés à cette peau râpeuse de croûtes. C'est pas très beau à voir... Vous avez de la chance.
- Comme vous j'imagine.
- Foutue chance oui.
Zulria la trouvait attendrissante, à moitié femme à moitié enfant. Son regard fatigué voulait soutenir les yeux calmes du guerrier, mais ses prunelles tremblaient avant de fuir. Il était difficile de lire sa détresse si on ne devinait pas que sa vie était faite auparavant de victoires aux batailles de regards et qu'elle était femme desquelles on ne défie pas.
- Écoutez, je ne pense pas que vous ayez besoin de ressasser, alors n'en parlons pas. J'aimerais juste savoir pourquoi vous êtes ici. Pourquoi vous n'êtes pas retournée sur la base ?
- Qu'est-ce qui vous fait dire que je ne suis pas venue boire un verre ?!
- Nous sommes à trois jours, en temps normal, de là où nous avons été déployés. Endroit lui-même à deux jours du camps, donc cinq jours. Je vous ai vue avant-hier, le cul posé à la même table, et je suis arrivé précisément quatre jours après l'att-...
- Ok ok, j'ai compris. C'est vrai : c'était pas pour un verre ! Je pensais que vous vous foutiez de moi. Pourquoi vous, vous n'êtes pas retourné là-bas si vous n'êtes vraiment au courant de rien ?
- On va dire... que ma jambe m'a dicté de prendre du repos avant ça, glissa Zulria en coulant un regard vers l'atèle qui enserrait la totalité de son fémur gauche. Et d'autres choses. Mais j'ai perdu connaissance sur le terrain, quand je me suis réveillé il n'y avait plus que des cadavres.
- Bon. Vous y étiez aussi... Merde, ça craint. C'est à moi de vous raconter alors, y'a pas beaucoup d'autres personnes qui pourront s'en charger comme vous l'avez vu. Sa lèvre inférieure esquissa un rictus moqueur empreint d'une infinie tristesse. On va commencer par le début. En partant, je sais pas si vous avez remarqué que la faction Y était assez moindre, on devait être quoi... Une quinzaine ? Ça m'avait pas vraiment frappée, mais pour aller chercher l'ennemi dans la forêt c'est vraiment, vraiment peu, même avec des mages dans l'équipe. La dérouillée assurée sans effet de surprise. On avait beau être prêts à se battre, ceux devant l'étaient encore plus s'ils se doutaient de notre arrivée bien bien armée. Et devinez quoi ?
- Pas d'effet de surprise.
- Pas d'effet de surprise, non, pas le moindre. Aucune surprise pour l'ennemi, et encore moins pour le type qui a demandé aux Yankees d'aller dans la forêt pour se faire tuer.
- … Attendez. Le général était au courant ?
- Question indiscrète, Zulria, mais je crois que vous vous êtes fait connaître dans la légion pour votre manque d'amour de l'ordre établis, non ? Vous êtes un type assez inspirant dans votre genre d'ailleurs, j'ai eu vent de vos discussions ça et là. Les gens vous aimaient bien, parlaient de vous, et c'est rare à l'armée d'être encore là après avoir laissé entendre qu'on était pas prêt à se faire prendre par derrière par la royauté. Excusez-moi je vais être crue, mais votre seule chance, ça a été d'être un bon guerrier. Autrement ils auraient essayé de vous tuer bien avant ça.
Zulria était quelqu'un de discipliné qui avait su faire taire son dédain pour l'autorité en sa qualité de combattant. Certes, s'il se battait avec eux il n'estimait pas se battre pour un autre intérêt que le sien, et même au travers de tout le respect qu'il avait pu montrer pour un quelconque supérieur hiérarchique, il n'éprouvait aucun amour pour ces décideurs, hauts sur leurs promontoires de confort. Certains incarnaient des gens comme lui, sortis de leurs lits par la nécessité du port de l'uniforme, d'autres se contentaient de donner les ordres. Ceux-là n'avaient jamais rien obtenu de lui. Zulria n'avait d'oreilles que pour qui il estimait digne d'être son égal.
-Je peux vous demander comment vous le savez ?
- Je suis restée en contact avec un autre rescapé. Aloi. Le Phasme. Je suis mage, je suis capable d’invoquer des animaux, alors on a échangé par le biais d'une chouette. Il est rentré après tout ça si on peut dire, il a rejoins la base parce qu'il n'était plus en capacité de sa battre passé l'assaut dans la forêt.
- Et il va continuer d'aller au front ?
- Difficile à faire, de là où il est il n'est même plus capable de parler.
- Il a été jugé par un tribunal de guerre à titre d'exemple ? Pour abandon de poste ?
- Non, ils l'ont fait assassiner.
Alors c'était ça, le pouvoir dont disposaient les grands de ce monde ? S'élever au-dessus des dieux pour asséner dans l'ombre de leurs grandes capes tissées d'or le châtiment de vie et de mort ? Au trou les rats. Qu'importe que le peuple soit plus nombreux ou plus fort, ils les feraient tous tomber pour qu'ils ne soient plus une menace.
L'Ourse marqua une pause. Elle semblait aussi sonnée que si elle avait elle-même appris la nouvelle, mais elle repris. Ce jour-là, les Y avaient été désignés pour leurs capacités exemplaires. Mais ce qui les avait gardés en vie jusqu'ici, comme l'avait souligné la jeune femme, était aussi la raison de leur salut : guerriers indépendants au caractère trop peu flexible, ils avaient été jugés comme dangereux pour la suite. Revenus à la société, ils auraient représenté une menace pour le gouvernement qui les avaient pris sous sa tutelle. Personne n'était plus conscient que ces soldats des déboires de la politique, des carnages qu'elle engendrait, et donner la possibilité du libre arbitre à ces éclairés était la pire chose qui puisse être pour assurer la pérennité des rois. Lâchés dans la foule ils redevenaient des citoyens : à pouvoir voter, vivre librement, et contacter la presse. Les enterrer avec leurs médailles héroïques et leurs secrets restait encore la meilleure option, et celle qui faisait le moins de vagues.
C'est pour cette raison que les Yankees avaient été amenés à courir un danger certain : même se salir les mains était secondaire. Un complot parfait où l'ennemi le reste, se chargeant de la sale besogne. La royauté faisait alors d'une pierre deux coups, présentant son adversaire comme un barbare sans même avoir besoin de l'exprimer par des mots, et se débarrassant des parias devenus inutiles.
Zulria avait la tête qui tournait. Il avait le vertige d'un homme dépassé qui se sentait nager dans une galère intangible, et ses tempes battaient sourdes à son oreille. Rien n'était pourtant plus simple qu'à ce moment :
- Merci beaucoup.
Il se releva bancal sur sa jambe folle en souriant doucement à l'adresse de l'Ours.
- J'imagine qu'avec tout ça, il ne nous reste pas beaucoup d'options. Il est temps que je pense à une petite retraite anticipée. Prenez bien soin de vous.
Zulria la salua encore avant de disparaître, franchissant sans se retourner les quelques mètres qui le séparaient de la porte et d'une autre vie.
Il faut être sans lois pour écouter la loi nouvelle.
O délivrance ! O liberté ! Jusqu'où mon désir peut s'étendre, là j'irai.
fiore
Rien de tel qu'une limonade quand il fait chaud, ça vous revigore un homme. Zulria en savait quelque chose, et rien n'était meilleur à ce moment que de siphonner goulûment l'une des bouteilles de Maël – peut-être la dernière ? Mais personne d'autre n'aurait plus bénis cette fraîcheur salvatrice que lui, pas même le blond. L'été avait tendance à le transformer en mage nouveau : quelques degrés de plus et pouf, voilà que son corps se liquéfiait comme s'il maîtrisait l'eau. Une saison un peu ingrate pour Zulria qui adorait pourtant se prélasser aux heures où les lumières se tamisaient, et dont le soleil flattait l'entrain. Il aimait flâner ça et là quand le temps lui permettait.
Ses mains moites se perdaient dans le terreau pendant qu'il rempotait avec dextérité de minuscules et fragiles pousses d'herbes aromatiques. C'était une journée tranquille, quelque chose de rare à la guilde. Accroupis comme il l'était, Zulria aurait pu passer pour ces types un peu grands un peu gauches, à tâter du thym comme il le faisait, brillant de sueur du labeur, mais pourtant on le savait, il n'était pas de ce genre-là. Plutôt de ceux qui échafaudent des plans criminels avec brio, au point qu'on leur confie les rênes de l'anarchie. Parce que si Zulria s'adonnait à un jardinet luxuriant dans les locaux d'Ajatar, il n'y avait pas volé sa place pour autant. Non il n'était pas homme maladroit, encore moins penaud : sa voix portait toujours quelques mots chauds bien mesurés, polis avec quiconque, le tout sur fond de belle gueule grave d'éphèbe brun.
Il s'épongea le front avant de se redresser en déroulant son dos et frotta énergiquement ses doigts sales. Zulria se sentait chez lui à Ajatar plus qu'il ne l'avait été. Jamais il n'avait mis les mots dessus, peut-être parce qu'il ne s'en rendait pas compte, mais il était un homme un peu rongé, à qui il manquait quelque chose. Pourtant c'était aujourd'hui qu'il se sentait le plus en phase lui-même, articulé par une colère sourde passée qu'il avait régurgitée pour en faire une détermination infaillible. Les gens ici avaient un petit quelque chose de similaire. Sans avoir trouvé une famille, Zulria les appréciait et savait que leur aide était précieuse, eux qui cheminaient dans une direction similaire à la sienne. Ni maîtres ni lois autres que celle qu'il voudrait bien suivre, et la possibilité de planter de la ciboulette le corps dévêtu de tout uniforme ; il se retrouvait dans Ajatar.
test rp - les chats me font chèvre ft. la guilde d'ajatar au petit matin
Tout doux, tout massif. Tout est tout chaud. Viens là, pose ta main ici, oui. Arrête donc de faire ton grand timide et aime-moi. Prends-moi donc à rebrousse poil, retourne-moi. Je veux être ta bête l'espace d'un instant. Est-ce que les plus gros, comme toi, ont peur de créatures plus fragiles ? Non ? Alors continue, sors un peu tes griffes pour me plaire. Je n'ai pas eu mon lot pour la journée et j'aimerais que tu sois celui qui m'arrache des cris d'extase, arrête donc de me ménager. Tu dois en avoir vu d'autres. Alors vas-y franchement. Profites-en le temps que tu pourras poser tes yeux sur moi, bientôt je serais parti, lassé par tes caresses.
Voilà... Oui.
Comme ça...
Zulria trouve les chats insupportables.
A se frotter pour trois malheureuses minutes d'attention avant de fuir le pelage électrique d'amour, en vous laissant seul avec son dédain. Celui-ci était particulièrement collant, faisant du charme à sa jambe. Il le grattouilla brièvement mais l'espèce de boule hirsute en eut vite pour son soul et partis en trottinant. Tout ça pour ça. Insupportable.
Il lui rappelait ces connards mielleux dont le torse était foulé par une foultitude de mains avides de romantisme mais dont la seule perspective était de vite fuir pour se coller à d'autres corps chauds. Les chats sont toutes des catins en puissance. Pires que des adolescents découvrant leur pouvoir de séduction. Zulria se lassait vite de leurs grands yeux et de leur démarche sautillante qui n'avait que peu de pouvoir sur lui. Pourtant il finissait toujours par poser une main sur eux et échanger quelques secondes amicales. Ils étaient doux quand même. C'était sympa le temps que ça durait même si c'était un peu tendu dans les muscles de Zulria qui se sentait la pute d'un minet.
Mais il se bornait à n'en tirer qu'un plaisir passager et avait l'impression de livrer une guerre sans merci à tous les chats qu'il pouvait croiser. Qui serait le premier à lâcher l'affaire ?
Il était tôt. Le derrière du chat disparu par la fenêtre et Zulria se retrouva effectivement seul. Quand il n'arrivait pas à dormir, il lui arrivait de finir une partie de la nuit enfoncé dans un fauteuil de la guilde. Ce n'était alors que lui et son livre, lui et les grandes ombres projetées sur les murs qui dansaient au rythme des hiboux.
Passée l'heure des grands ducs venaient maintenant les félins, apparemment. Plutôt ça que celle des rousses tumultueuses et bruyantes. Zulria quitta le cuir pour se diriger vers les tables quand il entendit des bruits de pas feutrés. Le bruit résonnait léger dans la plénitude de l'aube, reconnaissable entre milles. Ils furent bientôt suivis d'un visage qui se découpa dans la cage d'escaliers, inhabituel de voir à cette heure.
- Ah tiens. Bonjour. Déjà réveillé, Zadig ?
test rp 2 - tous les mêmes
- Ce n'est pas comme ça qu'on frappe, Poppy.
Zulria en avait vu, des amateurs taper en adoptant la mauvaise position, les poings tout juste bons à faire mal. Déformées, les phalanges qui rencontraient des côtes, traumatisés les os qui en tapaient d'autres. C'étaient des gestes sans réelle incidence. On reculait sous ces coups mais ces types bagarreurs n'étaient bons à rien, pas même à blesser correctement. C'était un spectacle qui dégoûtait Zulria.
Parce qu'il était ridicule, mais pire encore, banal.
En arrivant à Fiore, Zulria s'était noyé dans les affriolants excès urbains : les lumières, le monde, la hauteur des immeubles, tout ici n'avait commune mesure avec rien de ce qu'il avait pu voir à Icerberg. Une rupture s'était établie en quelques instants une fois arrivé, subjugué dans l'effervescence du dédale que constituaient toutes ces immenses rues. Il avait aimé Fiore dès qu'il y avait posé les pieds. Celle-ci le lui avait bien rendu. Zulria avait pris le parti de fuir pour pouvoir continuer à opérer pour un monde meilleur, et il se sentait ici capable de beaucoup. Ce sentiment s'était amenuisé dans la canopée de béton qui l'avait gobé, mais au fond de lui dormait une indicible envie de ne pas stagner trop longtemps. Il prenait simplement la peine de retomber sur ses pattes abîmées.
Six mois qu'il s'était établis ici, pour essayer temporairement de trouver de quoi vivre, et six mois qu'il avait trouvé un taff un peu pourri dans un bar assez sympa. De tueur il était passé anonyme essuyant des verres de bière : rien de très glorieux mais c’était suffisant. Il était juché derrière son comptoir de jour comme de nuit, et le soir tombé, la ville n'avait plus pareille mesure : les néons illuminaient quelques alcooliques un peu trop téméraires au milieu de gens saouls de l'ivresse de la jeunesse.
- Laisse-moi te montrer.
Et il frappa Poppy en plein visage.
C'était un coup puissant, de ceux qu'il avait rarement décochés.
Il était furieux, avide de blesser. Il avait réussi, et la femme se tordit pour aller s'écrouler contre le mur adjacent. Zulria ne broncha pas en la sachant souffrir le martyr. Il ne lui accorda pas une once d'attention, alors qu'elle gémissait hagarde à ses pieds.
- Connasse.
Elle était couchée dans une pièce un peu sombre, que quelques rideaux voilaient d'une lumière de fin de journée un peu agressive. Il y avaient des bouquins dans les armoires, quelques babioles sur les tables, la vaisselle préparée dans la salle à manger pour un repas à trois. Quelques jouets étalés sur le tapis. Toutes les marques d'une vie de famille tranquille.
Zulria s'approcha sans ciller du coin du mur, toujours sans remarquer la blonde étalée dans sa grande robe rose poudrée, de celles que l'on sort pour les beaux jours.
- Excuse-moi.
Il était impressionnant Zulria. Encore plus quand il faisait usage, impassible, de la violence.
- Je suis désolé de l'avoir frappée devant toi, il ne faut pas que tu aies peur.
Il l'était vraiment, désolé. Dans quel monde un enfant devait voir sa mère bousculée au sang par un homme entré par effraction dans une pièce ? C'était un spectacle horripilant pour lui, sans doute, à voir les yeux terrorisés et farouches qu'il posait sur l'imposante carrure du soldat. Ses lèvres étaient pincées et interdites. C'était un amas d'hostilité qu'il déployait à tout ce qui était extérieur à lui. Alors il se recroquevilla un peu plus quand Zulria tendis une main hésitante, masquant son visage d'un rideau de boucles secouées par la peur. Est-ce qu'il espérait ne rien voir de cette façon ?
Zulria avait beau s'être battu contre des armées, à cet instant précis, il était désemparé. Il ne savait pas bien quels mots articuler pour qu'ils touchent le cœur innocent d'un enfant qui comprenait mille fois plus le monde qu'un adulte ayant connu les guerres et la haine. Il aurait aimé pouvoir se taire, que tout ça se fasse sans blesser les victimes, mais lui n'était plus doué pour s'occuper d'autres. Il avait peur de poser une main sur ce corps si fragile et de le brise de partout comme il avait tant eu l'habitude de le faire. Tout ce qu'il savait, c'est qu'il sentait résonner les tambours de la peur dans la poitrine du gosse qui lui faisait face, parce qu'à cet instant précis il n'y avait que lui. Ou peut-être était-ce son propre cœur ?
- Ecoute.
Zulria s'accroupit. Il fit son corps petit, aussi petit qu'il le pouvait, pour se retrouver à la hauteur du semblant d'homme qui ne lui décochait pas un regard.
- Je vais partir d'ici, je te le promets. Mais j'aimerais que tu viennes avec moi.
Les doigts de sa main se tendirent vers l'enfant avec une extrême douceur, comme pour éviter d'affoler ses sens. Il avait l'impression d'être face à un animal acculé qui sondait ses intentions pour savoir s'il devait ou non le mordre.
– On va faire attention tous les deux à ce que ça aille bien, on va soigner ce bleu. Tu dois juste venir avec moi. Après ça je te promets que tout se passera au mieux, d'accord?
Et là, tout fit mouche : l'effrayé agrippa la main. Zulria ne su pas pourquoi il fut si soulagé, mais il redressa le petit être pour le faire glisser dans ses bras comme s'il était son propre enfant. Il se demanda combien de promesses cet enfant avait pu entendre avant celle-ci. Est-ce que sa mère lui avait dit qu'il mangerait un bon repas ce soir-même avant de lui foutre dessus ? Avait-il eu des « je ne le referais plus » avant la prochaine fois ? Peut-être rien de tout ça. Des fois, aimer quelqu'un suffit à se convaincre seul. La passion intrinsèque est plus forte que tout, elle s'élève au-dessus de la peine et de la peur. Il n'y a même pas besoin d'excuses, pas besoin de pardonner. Tout est pardonné avant d'avoir été fait.
Poppy ne savait pas frapper, c'était sûr, mais elle avait marqué le petit corps qui l'appelait maman de coups. La joue de l'enfant était brunie. Zulria ne voulait pas soulever le haut pour vérifier si l'estomac qu'il avait vu dégommé à coups de pieds avait les mêmes séquelles.
Zulria haïssait à cet instant l'humanité, prête à sacrifier le peu d'innocence qu'il lui restait au nom de sa faiblesse. L'homme voulait dominer parce qu'il n'avait aucun pouvoir tangible sur ce qui lui arrivait, mais influer sur autrui avait cette prise immédiate et terriblement satisfaisante.
Il l'avait vu de ses propres yeux, au bout des canons d'hommes démunis qu'il saluait tous les soirs dans ses rêves. Le scénario se répétait dans les creux laissés par une main de mère hystérique, dont les coups témoignaient d'une violence sourde pas démunie d'amour.
Zulria ne comprenait pas ces folies mais les concevaient.
Il n'arrivait tout simplement plus à prendre part à ce festival de passions qui liaient les hommes entre eux. A cet instant chez lui s'était confirmé cette envie furieuse de n'être plus un acteur passif du monde : ses idéaux, il les assouvirait lui-même. Pour la même raison, il rejoignit Ajatar quelques semaines plus tard.
Il emporta avec lui l'enfant, loin de la femme qui toisait de ses yeux vides la porte.
– Non... M-mon... fils. Rends-le moi. Elle le murmura comme une prière pathétique, que personne ne pouvait plus saisir. Son corps s'anima soudain d'une vive énergie, assez longtemps pour lui arracher un cri de possédée. ENFOIRE. RENDS-MOI MON FILS.
Décidément, oui : nous nous cachions bien de nos faiblesses sous prétexte d'être humains.
- Tu viendras manger à la maison un de ces quatre !
- Pourquoi pas, ça pourrait être sympa. Si tu veux je finis le service à quinze heures... mercredi ? Je peux toujours amener un truc à manger chez toi ce soir-là ?
- C'est pas un rencard, t'embêtes pas, je m'occuperais de tout. Tu seras juste l'invité avec un grand i.
- Très bien. Tiens. Une bière payée par la maison en attendant.
Il lui sourit sincèrement, heureux de sa proposition. Depuis son départ d'Iceberg, Zulria avait rarement eu l'occasion de connaître quelqu'un, et s'était muré dans un mutisme autrement plus important qu'avant. La chaleur des autres ne lui manquait pas. Il se contentait de les apprécier de là où il était, d'un intérêt farouche, sans se mêler de quelconques histoires d'affection.
Mais Poppy était gentille et ils parlaient bien, il n'avait aucun souci à aller partager un repas avec elle.
magie
walkyrias
incarnation
Valkyrja – chooser of the slain / qui choisit les abattus
issu de la mythologie nordique (
plus d'infos)
Walkyria est une magie faisant appel aux Valkyries, femmes guerrières légendaires, allégories de la guerre. A moitié déités, elles sont connues comme étant les guides vers la voie du paradis de ceux morts au combat : le Valhalla (territoire d'Odin, dieu parmi les dieux) pour les plus nobles, et le Fólkvangr (plaine sous le contrôle de Freyja, déesse majeure) pour l'autre part. Une Valkyrie distribue seulement à ceux qu'elle en juge dignes le repos auprès des dieux, serpentant à dos de loups parmi les cadavres laissés après la bataille. Leur loi règne maîtresse sur l'âme de ceux tués, les érigeant ainsi comme les prêtresses du sort.
Walkyria est une magie d'incarnation. Celui qui la maîtrise ne fait donc pas appel à l'entité en question, qui ne se matérialise pas : Zulria se contente d'être le réceptacle de leurs capacités. Ainsi il se voit en partie octroyer les pouvoirs et caractéristiques associées aux Valkyries auxquelles il s'associe, mais celles-ci ne se manifestent pas directement.
Walkyria est une magie badass.
→ il est possible d'invoquer différentes valkyries et chacune a ses techniques propres
→ l'appel de la déité ne coûte rien / les techniques si
→ si les Valkyries profèrent leurs aptitudes, une partie de la puissance vient du mage. L'un ne marche pas sans l'autre.
→ en dehors de la magie, Zulria sait se battre à main nues et maîtrise les armes à feu
techniques / valkyries