Le tournoi terminé, je me cherchais une auberge à l'extérieur de la ville qui pourrait abriter un type comme moi. Je ne recherchais pas à tout prix de me rendre dans la ville tout de suite. Je m'étais rendu compte que le calme de cette forêt pourrait me faire du bien pour mon rétablissement. Je m'étais vidé de mon énergie magique et en plus, je m'étais pris des coups de roche au visage et dans l'abdomen. Ça c'était sans compter les coupures volontaires sur tout mon corps pour utiliser ma magie. Une chance que j'avais attendu d'être rétabli avant de quitter Oshibana, sinon ce tournoi, je ne l'aurais jamais gagné. L'énorme quantité d'argent ramassée par le biais de ce tournoi, je pouvais maintenant me permettre quelques luxes par-ci et par-là. En avais-je vraiment envie? En tout cas, au niveau de la nourriture, je n'allais pas laisser passer une bonne grosse dinde et des légumes juteux tout autour. Tiens... Ça me donne faim penser à ça...
Je vis une auberge. Enfin, je ne vis que sa pancarte qui disait qu'elle était à 100 mètres dans les bois. Il me suffisait de suivre le sentier et j'étais arrivé. C'était un sentier fait de roches de toutes sortes qui avaient tendance à nous faire glisser si celles-ci décidaient de se mouiller. Arrivé à l'auberge, j'ouvris la porte et pénétrai à l'intérieur. L'ambiance qui régnait me faisait penser à une taverne. J'espérais seulement qu'avec tout ce bruit, je pourrai dormir sur mes deux oreilles. Je me dirigeai au comptoir où un homme bedonant à la moustache était installé. L'avant-bras sur le comptoir, le sourire aux lèvres en riant avec les blagues qui se disaient à la table la plus proche, ne m'avait pas vu. Je lui fis des signes de main pour lui signaler ma présence. L'homme me fit signe d'attendre un instant. Décidément, cette blague était plus importante que se faire de l'argent... Je repris mon habitude et lui tapotai sur l'épaule en lui demandant:
Monsieur? ... Moustache? ... Bonhomme? ... Vieux? ... Vous là! Avec la chemise! ... Hé ho!... Vous faites exprès? ... Hé gros tas!
C'est à moi que tu parles, mon gars?
Ouais c'est à toi que je parle gros plein de soupe!
AHHHH HAHAHAHA! Elle est bien bonne celle-là!
Et en plus il fait semblant de pas m'écouter... Il attend quoi? Que je lui sorte les yeux de ses orbites avec mes doigts?
Qu'est-ce que je peux vous servir, Monsieur?
D'abord tu vas me donner une clé à une de tes chambres, ensuite, je veux ta plus grosse assiette. J'ai une faim de colosse!
Alors une chambre et un repas pour Monsieur! Vous mangez ici ou dans votre chambre?
Faites donc livrer ça. J'ai pas envie de redescendre pour bouffer...
L'homme me donna une clé de chambre: 28. Je partis donc au second étage et me rendis à ma chambre les mains dans les poches. Alors que je mis la clé dans la serrure, j'entendis une voix familière provenant de la chambre juste à côté. Je fronçai les sourcils et tendis l'oreille. La personne semblait se parler toute seule... ou à un appareil téléphonique peut-être? Elle racontait sa défaite au tournoi, mais qu'elle avait apprécié y participer. Si au moins elle pouvait mettre plus amples compliments sur ma personne, j'en serais plus que content. Je l'entendis raccrocher et marcher jusqu'à sa porte. Je me surpris à être soudainement sur les nerfs à vouloir me précipiter dans ma chambre. Il me fallait que tourner la clé et j'étais entré. Qu'est-ce qui me prenait tout d'un coup? Ça ne me faisait pas d'écouter aux portes ou quoi? Vite... tourne... TOURNE LA CLÉ ENFO*RÉ! Finalement... J'entrai en vitesse dans ma chambre et claquai la porte derrière moi. M'adossant à celle-ci, je soupirai. Comment pouvais-je savoir qu'elle serait dans la même auberge que moi? D'accord c'est la plus proche des lieux, mais je n'avais pas pensé à ça...
Je m'avançai jusqu'à la salle de bain et pris une bonne douche en frottant le sang séché un peu partout. Attachant une serviette autour de ma taille, je fis tremper mes vêtements dans le bain dans le but de les laver par la suite. Ouais, un gars qui utilise son sang pour se battre, c'est pas très pratique pour ses vêtements... Je me rendis dans la pièce d'à côté et m'allongeai sur ce lit qui m'était prêté. À peine avais-je eu le temps de me rendre compte de la douceur des draps, on frappa à ma porte. Déjà? J'allais donc ouvrir. Une jeune adolescente blonde, les joues rougies par la gêne était-là avec un grand plateau. Je la saluai d'un coup de tête, pris le plateau d'une main et refermai la porte alors qu'elle tendait les mains pour du pourboire. Son pourboire, elle allait l'avoir à la toute fin. Qu'elle me prenne pas pour un con celle-là! Je m'installai au centre de la chambre, parterre et mangeai comme un porc. C'était vraiment gigantesque comme plat, mais tout finit par entrer par le bon trou. Ceci terminé, j'ouvris la porte de ma chambre et cherchai la place pour déposer le plateau: c'était à l'autre bout du couloir. À la seconde où je passais devant la porte de Fred, celle-ci ouvrit sa porte, me voyant avec une simple serviette autour de la taille. J'essayais de l'ignorer de mon mieux, mais elle était bornée et décida de me parler:
Corbeau!
Yô!
Félicitations encore pour ta victoire.
Pas la peine de me féliciter. Je savais que j'allais gagner de toutes manières.
Ah... ah bon?
Bah oui, tu me prends pour qui? J'suis pas un deux de pique!
Je ne sais pas. Il faut dire qu'on ne se connaît même pas...
Justement, je retourne dans ma chambre, il fait frisquet un peu habillé comme ça...
Tu veux entrer? Je t'offre une tasse de thé!
Sans façon Fred...
La déception se lut sur son visage, mais je n'étais pas à l'aise d'accepter une offre pareille. J'entrai dans ma chambre sans regret. Seiren avait raison, j'étais gras, barbare et sans manière, mais j'étais comme ça de nature. Je ne voulais pas faire d'exception à qui que ce soit. C'est pas pour rien que je n'avais pas eu d'amis par le passé... non, la véritable raison, c'était que je m'isolais par moi-même, loin de tout le monde. On m'enfermait dans une cage et on me laissait pourrir. Était-ce vraiment ce que je voulais au final? Je soupirai et retournai à la salle de bain pour nettoyer mes vêtements. Je les accrochai au pôle de la douche et profitai de leur séchage pour me reposer sous les couvertures. Quelques heures passèrent avant que je me réveille. En regardant dehors, il faisait sombre. Je vérifiai l'état de mes vêtements. Ils me semblaient humides, mais suffisament secs pour les porter. Je mis mon argent dans mes poches et ma clé dans une autre et sortis de ma chambre.
Arrivé tout en bas, les gens faisaient encore la fête. Les plus saouls avaient déserté, mais il en restait encore quelques uns. Je me rendis au comptoir où je pris place sur un tabouret et commandai une choppe. Heureusement, l'aubergiste n'avait plus ces blagues ridicules à écouter et je fus servi de suite. Je bus la moitié de ma choppe d'une traite et m'essuyai les lèvres du revers de la main. J'étais concentré à regarder les bulles qui remontaient. Une femme vint s'asseoir à mes côtés et commanda un cocktail raffiné. Je posai mon coude sur le comptoir et mis mon visage sur mon poing en continuant de regarder dans le vide. La femme se tourna vers moi. Je me sentis observé, alors il fallait bien que j'affronte celle qui me rendait mal à l'aise. Elle avait une longue chevelure rousse qui lui arrivait aux hanches. Elle était habillée d'une robe de soirée scintillante, un rouge à lèvres éclatant et un maquillage qui met ses yeux bleus en valeur. C'était de sa voix de séductrice qu'elle me demandait:
On se sent seul? Je peux remédier à cela...
Dégage feignasse. Je préfère rester seul que de côtoyer des sangsues dans ton genre...
Oh! Mais quel barbare...
La femme quitta son siège et changea de proie. Le reste de ma soirée s'avérait tranquille. Je terminais ma choppe de bière et retournai à ma chambre. Je verrouillai la porte, me dévêtis et retournai dormir jusqu'au lendemain matin. Remis de ma dure journée d'hier, j'allai porter l'argent à l'aubergiste pour payer mes dépenses. Je tournai la tête vers la salle à manger où je vis Fred en train de manger silencieusement son déjeûner. Je soupirai et allai m'asseoir à sa table, en face d'elle. Elle sursauta en me voyant. Elle mâchouilla sa bouchée avant de commencer à parler. Pendant qu'elle était concentrée à manger, je me servis dans son assiette en déchirant une tranche de bacon avec mes dents:
Te gêne pas surtout, hein!
C'est ce que je fais, tu vois pas? Il est salé ce bacon dis donc...
Alors euh... Tu comptes repartir quand?
J'en sais rien, mais c'était ma seule journée dans cette auberge. Je compte m'entraîner après avoir mangé.
Oh! Est-ce que... tu crois que je peux venir avec toi?
Si tu crois que tu seras utile, pourquoi pas...
Tu ne t'arrêtes donc jamais?
Jamais.
Appelle-moi Melissa!
Senji.
Elle me présenta sa main pour que je la serre. Je ne pris que son index et fis comme si c'était sa main entière. Elle semblait bizarrement mal à l'aise de mon confort et de mes manières. Je commandais une assiette de déjeûner et me régalai à ma faim. Je quittai l'auberge en payant mon repas, accompagné de Fred. Ouais, je l'appelais encore Fred parce que c'était sous ce nom que je l'avais connue. Melissa me paraîssait trop féminin pour une jeune femme chauve. Nous nous éloignions donc de l'auberge en nous enfonçant dans le bois où nous serons tranquilles des regards indiscrets. Nous cherchions une clairière des yeux et quand elle fut trouvée, nous pouvions nous mettre à l'action. Au centre de celle-ci, je cherchais bien quel truc je pouvais améliorer et quel truc je pouvais apprendre. Je savais mes lames sensibles aux trucs contondants, alors il fallait que je m'ajuste pour leur enlever cette sensibilité. Fred était l'adversaire idéal pour ce genre de truc.
Dis Fred-
Melissa!
Fred, tu pourrais me bombarder de cailloux?
Grrrr! Et en plus tu fais un jeu de mot pourri avec ce surnom à la noix!
T'avais qu'à choisir autre chose...
Je m'ouvris les avant-bras et fis sortir mes lames. Fred comprit qu'elle devait se tenir prête. Je lui fis un signal avec un hochement de tête. Elle comprit et me bombarda comme prévu de roches. J'essayai de les faire arriver sur le plat de ma lame. Parfois j'y arrivais, parfois non. Mes lames se brisèrent à chaque fois. C'était bien ce que je craignais. Fred était aussi douée que moi magiquement, alors le risque de bris était élevé. À chaque lame brisée, une autre la remplaça avec une constitution plus solide. Il me fallait faire cela à répétition jusqu'à ce que la bonne formule soit employée. Fred étaient moins fatiguée que moi et elle s'en rendit compte. Elle décida pour équivaloir ma fatigue de faire des pompes tout en utilisant sa magie pour augmenter sa concentration. Bien pensé... Le truc maîtrisé, je nous permis de prendre une pause bien méritée. Assis sur une grosse pierre, je me mis à réfléchir à un autre truc que je pouvais améliorer. J'haussai les épaules puisque rien ne me vint en tête.
La pause terminée, nous pouvions reprendre l'entraînement. Fred commençait déjà à s'inquiéter sur mon cas. Elle m'avait envoyé des centaines de caillous en même temps, mais que dix d'entre eux atteignaient mes lames. Le reste, c'était ma peau qui recevait. Je lui dis qu'elle n'avait pas à s'en faire et que j'en avais subi des pires que cela. Elle ne changeait pourtant pas l'expression de son visage, mais elle ne dit rien de plus. La prochaine étape, j'y avais réfléchi longuement. Mon combat contre Fred et l'attente au tounoi m'ont donné des idées. Fred avait tenté de m'enfermer dans une boîte de rochers. Le tournoi m'avait fait enfermé pour l'attente des combats. Pourquoi pas fabriquer une cage de lames? De quoi m'inspirer pour faire un truc pareil? Je regardais le paysage et vis une toile d'araignée... bingo! Je m'installais donc dans un espace restreint et essayai de donner une propriété adhésive à mon sang. Je m'essayais à plusieurs reprises d'envoyer mes lames s'accrocher contre les arbres, mais elles se contentaient de transpercer.Fred me regardait faire sans rien dire. Je m'essouflais pour rien d'après elle. Je voulais trop en faire? Tch! Pas question d'abandonner! Justement, en me disant cela, mes lames finirent par coller aux arbres. Je m'assurai qu'elles avaient un point d'appui pour les analyser. La surface plane était collante et les extrémités étaient coupantes... intéressant...
Fred, j'ai encore besoin de toi.
Que puis-je faire ô votre Altesse Royale?
Arrête, j'ai pas le temps de jouer. Lance une roche dans les airs, j'essaierai mon adhésif dessus.
Elle s'exécuta et je lançai cette lame adhésive à sa poursuite et essayai d'utiliser la lame comme un lasso. Je ne savais pas si c'était de la chance, mais l'adhésif était suffisant pour faire tenir la roche. Je demandai donc à Fred de continuer ce genre de trucs à répétition afin de m'habituer à la chose. Les deux à bout de souffle, il nous fallait prendre une pause. Fred m'invita à prendre un café avec elle. Je lui dis que c'était bien parce qu'elle m'avait aidé, sinon j'aurais pas accepté. Assis à notre table, je sirotai lentement le liquide. Je remarquais que Fred était pensive. À quoi pensait-elle?
Qu'est-ce que t'as? Tu voulais que je refuse à nouveau ton offre?
Non, ce n'est pas ça...
Alors c'est quoi?
J'ai rarement eu de la compagnie... et... et ne plus jamais te revoir m'attriste un peu.
Ah les femmes! Écoute, ça ne veut pas dire qu'on ne se reverra pas. Je compte voyager énormément, alors t'en fais pas pour ça gamine!
Gamine? hi hi...
Quoi?
Rien... Heureuse d'avoir fait ta connaissance Crow... alias Senji...
Notre café terminé, la jeune femme se leva et quitta la place en cachant son visage, sans regarder derrière elle. Je la regardais partir à travers la vitrine. Je soupirais et allai payer l'addition. Fred avait contribué à mon succès, à mon évolution personnelle. Elle m'avait aidé pour le Barrier's Web et m'avait ouvert les yeux. Ce pays, Fiore, c'était pas juste des enc*lés...
|