Quand on aime quelqu'un, on nourrit pour lui des craintes et des rêves. Il cristallise nos peurs et nos espoirs. Nos plus beaux élans naissent de cela. Ce lien nous anime, nous motive, nous porte, nous construit. La seule chose qui compte, c'est d'avoir quelqu'un pour qui espérer mieux. L'essentiel, c'est d'avoir quelqu'un pour qui trembler. Δ Gilles Legardinier.
Tes yeux font des allers-retours dans les différents de noms de plats et le sourire presque faux d’Adrien. Mais comment lui en vouloir ? Et puis, il n’est pas le genre de personne à qui tu pourrais dire « l’hypocrisie me tue », non. Parce que loin d’être hypocrite, il est juste malheureux et il fait de son mieux pour le dissimuler, depuis le début. Il te sourit et vous abordiez toutes sortes de sujets quand vous discutiez mais tu sais qu’il n’entamait pas le sujet le plus important. Il se contentait de l’éviter. De loin. Parler de la Reine était trop tôt encore. Parler du devenir concret de Golden était trop tôt. Parler de ces gens qui viendront pour vous quand la nouvelle de vos activités se propagera, était trop tôt aussi. Tu n’étais pas une de ces « pièces » mais bien une amie et en tant qu’amie du Roi, il y avait mille et une questions qui te posent problèmes.
Autrefois, tu aurais fait semblant, tu serais rentré dans son jeu, tu n’y aurais même pas pensé à tout ça, à l’avenir. Autrefois, tu te serais contentée de rester assise là, le regardant lui souriant et vous auriez eu une bonne journée. Une vraie fausse bonne journée. Parce qu’autrefois, tu ne vivais que pour toi. Toi, ta survie et t’assurer un « demain ». Autrefois tu n’étais que Sara la mercenaire et maintenant…Tu es Sara Taylor, membre de Golden Crown, amie du Roi Adrien Campbell et ça…ça c’est le plus beau des titres que l’on puisse te donner. Ce moment quand il t’as tendu la main dans cette auberge, qu’un homme ne soit pas effrayé par ta ressemblance troublante avec Enya s’approche sans arrières pensées ou sans intentions déguisées, c’était agréable.
Il y en avait peu des gens comme lui. Des êtres comme lui. Alors pendant qu’il parle de la carte, des déserts et des plateaux de fruits de mer, vous vous retournez tous les deux sur l’ombre de Terence arrivant presque essoufflé, le visage inquiet. Il a dû vous cherchez partout.
« - Alors si je suis votre amie et que je peux commander ce que je veux…Permettez-moi. »
Tu te lèves, tout sourire et sort du restaurant. Devant la porte, appuyé contre le mur, l’air boudeur, il y avait Terence.
« - Tu aurais pu prévenir ! - Aaaaah non ! Ne commence pas, je viens en paix. T’as faim ? - J’étais mort d’inquiétude ! Avec tout ce qu’il vient de se passer et… »
Par reflexe pour le faire terre, tu poses ton index sur le bout de ses lèvres et ses yeux te regarde, surpris. Attrapant son bras, tu l’entraînes à l’intérieur, jusqu’à votre table. Il paraissait gêné voire carrément embarrassé.
« - Sara… - Chut ! Pas de chichi, on est entre amis et les temps sont durs pour tout le monde. On a besoin de se serrer les coudes non ? Adrien est notre Roi et nous…ses amis donc on va faire un repas entre amis. Je ne prendrais aucune objection ! Pas même venant du Roi ! - Mais je ne peux… - Serveur ! Un couvert en plus s’il vous plaît ! Tais-toi et mange ce que tu veux ! Ce n’est pas tous les jours que tu auras une telle occasion. »
Terence avait presque un visage aussi rouge et couvert de gêné que le tien la première fois que tu as rencontré Zadig. C’est mignon. Une autre facette de lui que tu ne connais que peu.
« - Bien ! Maintenant qu’on est tous à table…Mangeons ! »
Quand on aime quelqu'un, on nourrit pour lui des craintes et des rêves. Il cristallise nos peurs et nos espoirs. Nos plus beaux élans naissent de cela. Ce lien nous anime, nous motive, nous porte, nous construit. La seule chose qui compte, c'est d'avoir quelqu'un pour qui espérer mieux. L'essentiel, c'est d'avoir quelqu'un pour qui trembler. Δ Gilles Legardinier.
Vous l’aviez compris. D’un regard échangé, discrètement tandis que vous étiez ainsi l’un à côté de l’autre, faisant face à Adrien. Il mange mais peu. Il boit mais peu. Il joue, il se donne un genre et peut-être était-il tout à fait capable de tromper les gens au manoir mais pas vous. Vous l’aviez deviné. Il n’a pas faim et n’a envie de rien et pourtant, vous deux, vous l’étiez là, sans gêne. Dans les yeux de Terence qui te fixes depuis quelques minutes maintenant tu devines sa gêne, ses insultes à ton égard et tu lui adresses en retour qu’un léger sourire coquin en lui tirant la langue.
Certains disent que vous étiez bien ensemble mais vous ne vous accorderez certainement jamais ce privilège. Il n’y a aucun amour sauf peut-être s’il est vache. Vous vous entendiez bien, certes et vous aviez parfois des moments où vos intérêts convergeaient vers Adrien mais jusqu’à présent, ça s’arrêtait à ça. Non de l’amour. Non de l’amitié. Disons juste, une relation basée sur une presque confiance mutuelle. C’était déjà beaucoup.
Les plats défilent sous ton nez et les deux hommes te regarde amusés, surpris, aller savoir qui pense quoi à cet instant puis finalement l’heure du repas se termine et tout le monde se lève de la table, direction la sortie.
Vous laissez le Roi payer la note et vous sortez quelques instants tous les deux.
« - Tu exagères vraiment… - Ose me dire que ça ne t’as pas plus et dans ce cas, je m’excuserais. - …… - C’est bien ce que je pensais. Tu sais, on a déjà assez à faire avec un Roi nous donnant de l’inquiétude, il ne manquerait plus que tu t’ajoutes à la liste. - Oh ? Je t’inquiète ? - Non ! Non, non, non, ce n’est pas ce que je voulais dire. - Tu l’as dit pourtant. - Tu sais ce que je veux dire, ne me provoque pas ! - Je veille sur moi-même aussi bien que tu veilles sur lui si cela peut te rassurer. - Est-ce un compliment Monsieur le Garde du Corps ? - Non. Une simple constatation. - Ahahaha c’était un compliment ! Tu m’as complimenté ! Je suis choqué ! - Ce que tu peux être bruyante ! »
Adrien revient et tu tentes de réprimer tant bien que mal un sourire tandis que Terence fait mine de regarder ailleurs.
« - En tout cas, merci pour ce moment. Ça fait tellement du bien de manger ! On devrait faire ça plus souvent. »
Et c’est là que l’idée te vient.
« - Ah mais c’est ça ! Pourquoi ne pas organiser un bal au manoir ? - Sara ! Tu crois vraiment que c’est le moment ? - Non mais justement ! Ce n’est pas en restant dans cette atmosphère qu’on s’en sortira et cela démontrera également que malgré la perte que nous venons de subir, Golden reste forte et cela dissuadera bien des gens de venir nous chercher des problèmes. - Et quel genre de bal est-ce là madame l’organisatrice d’évènement farfelus ? - Un bal masqué ! »
Tu regardes alors ton Roi, les yeux pleins d’espoirs, le suppliant de tout ton être.
Quand on aime quelqu'un, on nourrit pour lui des craintes et des rêves. Il cristallise nos peurs et nos espoirs. Nos plus beaux élans naissent de cela. Ce lien nous anime, nous motive, nous porte, nous construit. La seule chose qui compte, c'est d'avoir quelqu'un pour qui espérer mieux. L'essentiel, c'est d'avoir quelqu'un pour qui trembler. Δ Gilles Legardinier.
L’idée marche. L’idée fonctionne et il y aurait un soupçon de légèreté dans l’air. Ils ont compris tes intentions, tu le sais et tu ne t’en es jamais caché, bien au contraire mais même si la Reine venait tout juste de mourir, il fallait avancer.
Toi plus que n’importe qui, sans doute, comprends sa douleur, sa peine et la difficulté qu’il y aura dans cette épreuve. Devant lui se dressera un mur presque infranchissable mais s’il y arrive, s’il passe que ce soit au-dessus, à côté ou en fonçant dedans…Peu importe la manière, s’il passe ce mur, c’est qu’il avance. Tu seras sa corde, son échelle ou juste une main l’aidant à grimper dessus mais quoi qu’il puisse arriver, tu seras là, avant lui. Avec eux.
Tu n’as jamais eu la prétention de vouloir aider le monde, ou les petites gens de Golden mais Adrien, c’était autre chose. Adrien était destiné à de grandes choses contrairement à beaucoup d’entre vous et t’as envie de l’aider parce qu’il a été cette main pour toi. Il a été celui qui s’est approché sans avoir peur. Il est celui qui est arrivé devant toi, sans crainte et sans arrière-pensée et il est celui qui t’as murmuré tout bas : « Vient avec moi » Alors naturellement, tu l’as suivis.
Tu continueras à le suivre. Malgré ce qu’il fera, malgré ce qu’il dira, malgré ce qu’il se passera.
Les difficultés ne t’ont jamais fait peur. Elles ne t’ont jamais effrayée et tu n’as jamais détournés les yeux quand elles se présentaient à toi. Alors pourquoi maintenant ?
Le bal se mets en place petit à petit et tu essayes plusieurs masques, plusieurs formes, plusieurs couleurs devant le regard à la fois amusé et agacé de Terence.
« - Et celui-là ? T’en dis quoi ? Il me va ? - Tu ne pourrais pas juste en prendre un et faire avec ? Ce n’est pas comme si tu allais être la Reine du bal. A choisir, tu serais plutôt la citrouille. - Ce que tu peux être désagréable quand tu t’y mets ! - Je sais, ça fait malheureusement partie de mon charme. - T’aimerais tellement y croire hein ? »
Adrien en appelle aux curieux et aux curieuses s’étant amassés à l’étage et autour de vous et petit à petit certains sourires apparaissent et certains rires éclatent. Les gens ont besoin de ça.
Ils ont besoin de légèreté.
Parce que dorénavant, tout sera plus difficile. Tout sera plus horrible. Tout sera différent.
L’orage gronde dans le ciel, une tempête se prépare et arrive sur vous. Quelque chose de terrible va se produire et vous ne serez plus spectateurs de ce monde tombant en lambeaux. Vous serez ceux qui tiendront le navire à flot. Vous serez ceux qui arriveront à survivre, bien malgré eux …parce que c’est ce qu’il faut faire.
Peut importe qui viendra demain devant votre porte.