Une ville peu accueillante ... [ Adrien Campbell]

♦ Une ville peu accueillante... ♦

♠ Ohatsu Takumi / Adrien Campbell ♠

Il pleuvait averse ce jour-là. Le ciel était gris, le soleil ne s'était pas montré depuis deux semaines. Comme le temps, le moral d'Ohatsu ne semblait pas radieux. Voilà bien longtemps qu'elle errait dans Fiore sans trouver de nouvelles clefs et n'avait pas eu vraiment d'occasion pour rejoindre une guilde.

Avec comme seul bagage un sac à dos, la constellationiste entrait dans la ville. De ses longs cheveux roses, tombaient des perles de pluie tandis que l'eau ruisselait de son débardeur et de son mini-short.
Elle laissait tomber son sac au sol un instant, afin de soulager son dos endolori. A cause du mauvais temps, la ville semblait totalement déserte, aucune âme qui vive dans les rues commerçantes ni sur la place principale.

Tremblante de froid, Ohatsu reprit sa route, parcourant la ville à la recherche d'un endroit où se réchauffer voir passer la nuit. Dans chacune des rues qu'elle empruntait, aucun des commerces n'étaient ouverts. On pourrait croire à une ville complètement fantôme. Elle trouvait cet endroit vraiment terrifiant. Tous ses sens en alerte, elle continuait son exploration. Enfin, elle trouvait quelque chose d'intéressant : un bâtiment avec de grandes vitrines, on pouvait apercevoir de la lumière, signe qu'il était ouvert. Une pancarte, accroché au-dessus de la porte indiquait la nature de cet établissement. Ohatsu lâchait un soupire de soulagement...

D'un pas lent, la mage se dirigeait vers le bâtiment qui semblait être une taverne. Lorsqu'elle poussait la porte, un éclair retentit suivi d'un violent coup de tonnerre. En voyant la nouvelle arrivante, tout le monde se tut et tous les regards étaient fixés sur elle. Un peu gênée, elle s'avançait vers le bar derrière lequel un homme semblait s'occuper d'une commande. Elle s'asseyait sur un de ses grands tabourets.

« Alors, ma jolie, qu’est ce que je vous sers ? »

Dans son dos, elle sentait tous les regards pesés sur elle. Qu’avaient-ils ? N’avaient-ils jamais vu une fille chercher un peu de chaleur et de confort ? Elle ne se sentait pas très à l’aise au milieu de cette foule. Peut-être valait-il mieux partir et continuer son chemin, mais un seul regard par la fenêtre la dissuada de retourner sous l’orage…

« Un thé… s’il vous plait.»

Ses paroles étaient semblables à un murmure, à peine audible pour le tavernier. Elle baissait légèrement la tête, le regard fixé sur ses cuisses, quelques mèches de ses cheveux lui tombaient sur le visage, le dissimulant partiellement.

« Pardon ma petite dame, mais si tu veux que je t'entende, va falloir parler plus fort. »

Elle resserrait ses poings. Ces regards et ces chuchotements qu'elle entendait derrière elle, l'énervaient au plus haut point, pourtant elle tentait de rester calme. Elle relevait la tête vers le barman et répéta sa commande, un peu plus fort cette fois.

« Un thé, s'il vous plait »

« Un thé pour la demoiselle, un ! »

Il s'exécuta, pris un godet à thé, le plaçait devant la mage et le remplit d'une boisson chaude quelques instants plus tard. Ohatsu bu quelques gorgées qui la réchauffèrent de l'intérieur.
Alors qu'elle buvait tranquillement son thé et que la vie dans la taverne semblait reprendre son cours, la constellationniste sentit une main se poser violemment sur son épaule. On la fit se tourner, afin qu'elle fasse face aux deux inconnus qui sont venus l'aborder. La jeune fille regardait l'homme qui avait encore sa main sur son épaule, dans les yeux.

«Retirez cette main»

Elle donnait cet ordre sans plus de cérémonie, elle n'appréciait pas avoir un contact physique, encore moins avec un inconnu. L'homme se mit à rire et à resserrer son étreinte.

« Hé bien, quoi ? Tu ne veux pas venir passer un peu de bon temps là-haut avec nous ? »

La mage inspirait au maximum, signe de son agacement. Son regard, ses paroles se faisaient froid. Elle n'aimait pas provoquer de querelle, surtout pas avec deux idiots pareils. Sans hausser la voix, elle reprit la parole.

« Je répète une dernière fois, retire ta main, tout de suite. »

Malgré son avertissement, l'intrus semblait se moquer. Ohatsu attrapa le bras qui la retenait. Mais l'homme avait plus de force qu'elle. Elle décida de planter ses ongles dans la chair, afin de le faire lâcher prise suite à la douleur. Son plan fonctionne, il retira en grimaçant de douleur.

« Petite peste ! » Ces mots furent suivis d'une gifle monumentale qui fit tomber la mage du tabouret. Elle se relevait en se tenant la joue, manifestement mécontente. L'un d'eux avait sorti ses griffes, Ohatsu n'avait aucun doute sur le faits qu'elles étaient empoisonnée, alors que l'autre semblait faire tourner du vent autour de son bras. Deux mages... Comme si ca ne suffisait pas qu'ils soient stupides... La constellationiste allait prendre la parole, mais le mage du vent la projeta à l'autre bout de la pièce. Elle se relevait des débris de tables avec déjà quelques blessures. Certains clients s'en allaient par peur de se faire blesser, tandis que certains s'écartaient pour admirer « le spectacle ». Déterminée, elle se rapprochait d'eux, retirant les quelques échardes plantées dans sa main.

« Je vous conseille de partir, avant que je ne m'énerve, réellement »

« Sinon quoi poupée ?! Tu vas nous frapper ? Nous griffer ? »

Ohatsu eu un sourire en coin et attrapa son trousseau de clef qu'elle avait accroché à sa ceinture.

« Ouvre -toi Porte du tigre, Tigris »

Un portail s'ouvrit et de ce portail, sortit une jeune fille blonde. Des oreilles de tigres couronnaient sa tête. Elle était vêtue d'une petite robe blanche et noire tigrée. Son regard vert blasé était fixée sur la constellationniste qui l'avait invoquée.

« Nya ... » Dit -elle suivi d'un soupir. Elle ne semblait pas très joyeuse d'avoir été invoquée et espérait une chose : Retourner dans le monde des esprits le plus vite possible. Elle se retournait afin de voir les potentiels adversaires.

« Donne leur une bonne leçon Tigris. »

Un nouveau soupir venant de l'esprit qui se mit à courir à vive allure vers les deux mages adverses.

« Sharp Claw ! »

L'esprit du Tigre leur infligea de violents coups de griffe, qu'ils esquivèrent et contre-attaquèrent, tous les deux en même temps vers la constellationniste, voulant éliminer la source du problème. Pourtant, Tigris ne lâchait pas prise et finit par réussir à blesser le mage du vent qui hurlait de douleur. Son boulot fait, Tigris reparti dans son monde, au grand regret d'Ohatsu qui cette fois fut seule. Un des mages s'empressa de lui prendre ses clefs, tandis que l'autre l'immobilisait au sol.

« On fait moins la maligne, maintenant ? » Ils riaient. La mage n'osait pas imaginer ce que ces deux-là avaient en tête, mais elle allait très vite le savoir... Ils l'obligèrent à se remettre debout. Mais alors qu'ils étaient prêts à arracher le t-shirt de la jeune femme, la porte de la taverne s'ouvrit violemment ...
.

♦ ♠ ♦ ♠

L'obscurité avait enseveli la lumière du jour dans une tempête de nuages noirs, laissant tomber sur nous des gouttes de pluie sans répit. Le ciel craquait dans un bruit de grincement du tonnerre, seule lumière naturelle qui éclairait nos pas. Jack m'avait laissé avec moi-même, me disant qu'il avait quelque chose à faire un peu plus au nord. Une voix, il disait, une voix l'interpellait, une voix familière qu'il croyait avoir perdue à jamais: Candice. Je ne la connaissais pas, mais il me dit brièvement qu'elle avait collaboré avec lui et qu'elle lui avait été toujours fidèle. C'était sa quête et j'allais le laisser la retrouver. Il savait que je le suivrais, il savait que je n'accepterais aucun autre maître et que lui seul pouvait me dicter des ordres.

J'arrivais à Oshibana, une ville désertée où tous s'étaient réfugiés au fond de leur demeure, près d'un foyer, où tous évitaient tout contact avec la tristesse de Mère Nature. J'affrontais la tempête. Accroupi sur une corniche, sous un toit élancé, je veillais, je veillais sur la ville et sur ce qu'elle pouvait m'offrir. Qu'avait-elle à offrir? Le calme, la tranquillité, le zen du contact de la pluie contre les parois, contre ma peau, glissant jusqu'à retomber encore plus bas, éclatant au sol, se divisant avant de freiner sa course. Les auberges, les tavernes étaient ouvertes, permettant aux hommes les plus puants du secteur de s'offrir quelque chose à boire... ou un lieu pour dormir.

Puis, des bruits de pas, lents, parfois rapides, légers, mais lourds à la fois. Je tournais la tête pour voir la mince silhouette porter un sac pratiquement aussi gros qu'elle. Elle ne me voyait pas. Elle cherchait quelque chose... un endroit sûrement? À une heure pareille, à un temps pareil, c'était la seule chose qu'une jeune femme pouvait chercher. Elle trouva ce qu'elle cherchait et j'en fus rassuré... mais pas bien longtemps. À peine avais-je détourné la tête que les ennuis commençaient. J'entendais le vacarme jusqu'à l'extérieur et vis ces civils fuir la place. J'entendais leur voix grasse jusqu'à moi... Ils s'en prenaient à elle. Probablement inoffensive, future souffrante, je n'avais pas le choix d'intervenir, je devais l'aider. Je bondis de mon poste et me rendis à la taverne, poussant sèchement la porte avec mon épaule, créant un nouveau vacarme. Mes iris jaunes parcouraient la pièce, évaluant la situation. La plupart des regards rivés sur moi, ce qui m'intéressait était prisonnière de mains grasses et perverses. Celui qui tenait les clefs les fit tournoyer autour de son doigt et souriait avec une certaine marque de dégoût en me voyant.

Barbed Wire

Les clefs avaient quelque chose de spécial. Une magie les ensorcelait... les constellations. Il lui avait volées. Une de mes cicatrices s'illumina et un fil barbelé en sortit et s'élança sur l'homme sans rater sa proie, l'étranglant et le soulevant, manié par la simple pensée. Les bruits d'étouffement attirèrent l'attention du complice qui lâchait la jeune femme. Au même moment, le porteur de clés se vit décapité par les barbelés qui furent tournés dans sa chaire. D'abord la frayeur, puis une tentative de vengeance se lut dans les yeux du second. Il se mit à souffler dans ma direction dans le but de m'immobiliser contre la porte close, mais je résistais, restant sur place. Mon arme longea le plafond et se rendit jusqu'à lui, s'entortillant de tout son long.

Je fus libéré de l'emprise du vent et m'avançais lentement, au son de chaque battement de l'horloge, annonçant sa mort à grands pas. Il me suppliait, mais je l'ignorais, les barbelés s'enfonçant un peu plus creux dans sa chaire. Il criait, mais cela non plus, je ne l'entendais pas. Je m'accroupis près de la jeune femme et lui tendis ses clefs en souriant. Je me relevais et croisais le regard du mage qui tentait de se libérer. Ma main se posa entre deux barbelés et je traînais ma victime à l'extérieur en prenant la tête du premier dans l'autre main qui décorait le plancher. Rendu à l'extérieur, le fil barbelé agit comme il était censé le faire et découpant l'homme en plusieurs parties, le défigurant au passage. Il criait encore plus fort, mais personne n'osait mettre le nez dehors. Débarrassé du criminel, je retournais à l'intérieur de la taverne pour jeter un dernier coup d'oeil à la scène. Mon regard s'arrêta sur la jeune femme et je lui demandais d'un ton doux, mais tout de même caverneux:

Adrien :
«Ça va aller? Vous n'êtes pas blessée?»

Suite à sa réponse, j'allais m'asseoir au bar sans commander quoi que ce soit. Le barman était embêté, un corps au milieu de sa taverne, cela n'allait pas attirer des foules. D'un sens il était soulagé que sa cliente avait été sauvée, mais d'un autre, j'avais repeint une partie des lieux avec le sang de mes victimes...

♦ Une ville peu accueillante... ♦

♠ Ohatsu Takumi / Adrien Campbell ♠

Lorsque la porte fut totalement ouverte, la constellationiste pouvait apercevoir une silhouette. Son corps n'était pas celui d'une femme, pourtant, elle pouvait nettement distinguer une longue chevelure. Comme beaucoup dans la taverne, Ohatsu regardait le nouveau venu. Il ne lui inspirait confiance et elle n'aurait pas été surprise qu'il soit l'un de ces deux pervers qui la retiennent. Pourtant, à son grand étonnement, il en était rien. Très rapidement un fil barbelé vient se loger autour du cou du mage complice, qui lui avait dérobé ses clefs. Des cris étouffés et des gémissements de plaintes sortirent de la bouche de l'homme. Puis, il eut un cri aigüe et strident que les autres, des éclaboussures de sang partout dans la taverne et le bruit sourd qu'avait fait le corps en tombant... Ohatsu regardait le cadavre effrayée voir même choquée. Jamais elle n'avait vu quelqu'un mourir de si près et encore moins d'une mort aussi violente. Des gouttes de sang glissaient sur son visage totalement pétrifié. Avec tous ces événements, elle n'avait même pas remarqué que plus personne ne la retenait.
Sa longue chevelure s'envolait lorsque le mage de vent attaqua l'assassin de son complice. Mais en vain, devant les yeux ébahit d'Ohatsu, le ravisseur était déjà entouré de ce fil démoniaque. La mage tombait à genoux, son corps ne voulant plus répondre à aucun de ses ordres sous l'effet de la peur. Elle sentait son cœur battre la chamade lorsqu'elle vit l'homme aux cheveux longs se rapprocher. Il s'approchait encore, cette fois, il venait vers elle, son cœur battait de plus en plus vite, qu'allait-il lui faire ? L'heure était déjà venue pour elle ? Pourquoi ? Qu'avait-elle fait pour mériter cela ? Elle n'avait rien fait de mal, rien fait de mal... Elle fermait les yeux pour ne pas voir la mort en face. Elle ne sentait rien, pas de fil autour d'elle, elle entendait juste un cliquetis familier. Lorsqu'elle ouvrait les yeux, l'homme lui tendait ses clefs. Elle les prit, hochant la tête en guise de remerciement, encore incapable de prononcer quoi que ce soit...
Les cris et les plaintes, cet homme semblait totalement les ignorer, ni même les entendre. La jeune femme se demandait comment était-ce possible d'ôter la vie à quelqu'un sans même éprouver aucun remord, sans avoir aucune hésitation ? A cette pensée, un frisson remontait le long de sa colonne vertébrale pour finir jusqu'à sa nuque.

Enfin, il quitta l’établissement et emmena sa proie avec lui. Dehors, la demoiselle pouvait encore les cris de douleur venant du criminel. Elle portait ses mains à sa bouche n’osant lancer un seul regard par les fenêtres afin de voir ce qu’il se passait à l’extérieur, sans qu’elle ne sache pourquoi, des larmes perlaient le long de ses joues. Soudain, le silence s’emparait à nouveau des lieux, il était mort, aucun doute possible. Pourtant, l’inconnu revient dans la taverne et semblait observer son carnage avant d’arrêter son regard sur Ohatsu qui n’avait cessé de le fixer.

«Ça va aller? Vous n'êtes pas blessée?»

« T… Tout va bien »

Après ces quelques mots échangés, l'homme allait se poser au bar. La demoiselle ne se releva pas tout de suite, méditant sur ce qui venait de se passer. Elle séchait ses larmes et ressentait une étrange sensation : un mélange entre la peur, l'admiration et ... la satisfaction. Kaichiko, sa mère adoptive l'avait bien prévenu que sur les terres de Fiore, elle risquait de voir ... des horreurs, mais Ohatsu ne se doutait pas un seul instant que ce sera ainsi... Elle sait qu'elle ne serait jamais capable de tuer quelqu'un de sang froid comme l'avait fait cet inconnu. Les combats à mort, ce n'est pas pour elle. Cela étant, n'avaient-ils pas mérité leur mort ? Leurs actes étaient indécents et irrespectueux ! La mage semblait trop perdue pour émettre un jugement...
Ainsi, elle se relevait et s'approchait du héros qui l'avait sauvée. Ohatsu n'a jamais été douée pour les remerciements. Au fond d'elle, elle savait très bien qu'un simple merci ne suffirait pas. Mais elle n'avait pas grand-chose à offrir...
« Je vous ... remercie de m'avoir aidé » Dit-elle, en étant à environ deux mètres derrière lui. Elle marquait une pause, réfléchissant à chacun de ses mots.

« Puis-je vous offrir un verre en guise de remerciement ? »

Elle finit par retourner sur le tabouret qu'elle occupait quelques instants avant l'incident. Elle se retrouvait donc assise à côté de lui. Pourtant, elle n'osait pas le regarder. Au de là de son visage meurtri, son âme intimidait la constellationiste. Ne sachant pas de quoi il était capable réellement, il valait mieux garder ses distances...

♦ ♠ ♦ ♠

Elle avait du mal à digérer sa vengeance, elle avait du mal à avaler ce qu'elle venait de voir. La mort la faisait trembler, la paralysait: Elle était loin d'être la seule. Chaque personne à qui je rends service se sent mal. Impulsivement ils souhaitent la mort, ils souhaitent que justice soit rendue, mais après réflexion ils sont prêts à pardonner, prêts à donner une seconde chance même si la douleur eut été intense et insupportable. Je ne comprendrai jamais les humains avec leurs manies de changer sans cesse d'avis. Comment peuvent-ils grandir sur des bases qui tiennent à peine debout parce qu'ils changeraient d'idée à chaque étage?

L'odeur de sang me donnait faim. J'avais faim. Plusieurs jours sans me nourrir, plusieurs jours à marcher sans m'arrêter, à obéir, à dépenser le peu d'énergie en ma possession pour protéger Jack, à rester éveillé plusieurs nuits d'affilées, je devais reprendre des forces. Le corps qui décorait le sol était tentant et j'en salivais. J'avalais sans arrêt, mais pourtant,il en restait toujours. Celui-là n'allait pas tarder à être digéré, oh non, il allait être englouti avant même qu'on en entende parlé. La voix de la jeune femme me coupa sec mon élan de cannibalisme. Elle me remerciait, se rendant finalement compte du service que je lui avais rendu. Je ne réagis pas, je ne répondis pas, agissais comme si j'avais la sourde oreille, comme si elle n'existait plus. Elle fit acte de présence tout de même en prenant place à mes côtés. Je scrutais rapidement la tasse de thé et repérais ses traces de lèvres au bord du contenant: Elle était assise à cet endroit avant mon arrivée. Elle me demandait si elle pouvait m'offrir quelque chose pour me remercier, mais je secouais le tête. Puis, mes yeux fixèrent le barman qui tentait de m'ignorer, tentait de masquer sa peur, mais pourtant, il empestait la frayeur, transpirait à grosses gouttes. Mon index eut le réflexe de glisser sur le comptoir. Lisse, doté de quelques imperfections, mais agréable au toucher.

Adrien :
«Un couteau.»

Une ville peu accueillante ... [ Adrien Campbell] 11127

Barman :
«AH! Euh... Pardon?»

Adrien :
«Donnez-moi... un couteau.»

Le barman s'empressa de se diriger vers les cuisines et jusqu'ici, on l'entendait farfouiller son tiroir pour me combler de ce dont je désirais. Il passa près de trébucher et nous balancer le couteau en pleine figure, mais il se reprit et le déposa juste devant moi. Je me levais de mon siège, couteau en main et pris une assiette vide qui traînait sur une table et me pencha sur le cadavre. Je me mis à le tâter à quelques endroits avant d'opter pour le bras. De plusieurs coups de couteau, je séparais mon morceau du reste en me débarrassant de l'avant-bras et déposais le morceau dans mon assiette et retournais m'asseoir à côté de la jeune fille. Je plantais le couteau dans le comptoir et me servis à même le membre, lacérant la chaire avec mes dents et mâchouillais avec appétit. Ce n'était guère la plus tendre des viandes, mais je faisais avec ce que j'avais. Entre deux bouchées, je m'essuyai du revers de la main:

Adrien :
«Servez-lui ce qu'elle désire, je paierai pour elle...»

Nerveux ils l'étaient tous et nul ne pouvait le nier. Plus personne n'osait sortir de la taverne, maintenant qu'ils savaient que le cadavre de ma victime était mon repas. Ils supposaient toutes sortes d'histoire de malédiction à eux-mêmes s'ils oseraient toucher mon cadavre. Mais si ils savaient à quel point je n'en avais rien à faire et que si je voulais, je pouvais me servir à même le buffet et prendre ce que je désirais. Un d'entre eux se rappelait de l'affiche accrochée par le Conseil qui stipulait qu'on voulait ma tête sur un plateau, qu'on voulait ma mort... juste parce que j'étais différent, juste parce que je n'étais pas humain...

♦ Une ville peu accueillante... ♦

♠ Ohatsu Takumi / Adrien Campbell ♠

Il ne lui avait pas répondu, elle n’avait donc pas insisté. Un long silence pesant s’installait dans toute l’auberge. Ohatsu méditait, elle méditait sur ce qui venait de se produire, elle méditait sur ce qu’elle devait faire. Tuer un homme de la sorte, c’était clairement un meurtre. Rapporter les faits aux autorités ? Non … Non ce serait injuste et irrespectueux envers lui.

Le silence fut brisé par sa voix, il demanda au Barman un couteau. Pourquoi faire ? La jeune fille le regardait intriguée, se demandant ce qu’il allait bien pouvoir en faire. Elle avait bien une petite idée, mais elle espérait qu’il ne ferait pas ça. La mage regardait les cicatrices d’où étaient sortis les fils qui avaient servi au crime.

«*Non, je me fais des idées, il n’a pas besoin d’un couteau pour tuer quelqu’un … * »

Silencieusement, il se dirigeait vers le cadavre décapité. Ohatsu entendait la chair se faire découper depuis son tabouret. Ses yeux s'écarquillaient de surprise, ne comprenant pas pourquoi il tranchait la chair de sa victime. Prenait-il un trophée ou une sorte de souvenir ? Que nenni, le voilà qu'il revenait avec un bon morceau de viande dans son assiette. La demoiselle n’osait imaginer la suite, jamais elle n'aurait cru une telle chose possible ! L'inconnu dévorait le bras de sa victime, comme on dévorait une cuisse de poulet. Elle n'en croyait pas ses yeux, ébahie et bouche-bée, la constellationiste commençait à se sentir mal... Quelque chose remontait de l'intérieur.

Prise de terrible nausées, elle portait sa main à sa bouche. L'aubergiste posa un sceau sur le comptoir devant elle. Elle l'attrapa et filait dans un coin de la pièce, dans la pénombre afin de ne pas offrir un nouveau spectacle aux clients de l’auberge, de plus elle ne trouvait pas cela convenable de gerber devant une foule ... Surtout quand quelqu'un mange à côté. Toute pâle, d'un pas lent, elle revint au comptoir, évitant au maximum de regarder le cadavre au sol ainsi que le festin de son « sauveur ».

« Servez-lui ce qu'elle désire, je paierai pour elle...»

Le barman acquiesçait et reportait son attention sur la jeune fille, qui au passage avait posé son menton sur le comptoir, en se tenant le ventre, essayant de penser à autre chose afin de calmer les nausées.

« Hé bien ma p'tite dame, ça n'a pas l'air d'être la grande forme !»

« Ca se voit tant que ça ? »

« Tu aussi pâles que les fesses de Bob ! Tu veux un petit remontant ? »

Ohatsu ne savait pas qui était Bob, mais en tout cas, elle avait appris qu'il avait les fesses aussi blanches que son visage... Elle accepta le petit remontant du barman avec un petit hochement de tête. Elle ne savait pas comment il faisait pour garder son sang froid. En tout cas, elle remarquait qu’il restait le plus loin du mage possible. L’aubergiste prit un petit verre qu'il remplit à ras bord et le posa violemment devant sa cliente. Elle le prit péniblement le verre et le but cul sec !

« Alors, ma jolie, ça va mieux ? »

Elle ne savait pas trop si elle allait mieux. Elle avait l'impression d'avoir la gorge enflammée, tandis que deux petites pommettes rosées se formèrent sous ses yeux. Un gargouillement bruyant se fit entendre, puis elle se dirigea en courant à son sceau posé toujours dans le même coin.
Alors que la jeune mage gerbait ses tripes et ses boyaux, quelqu'un osa enfin prendre la parole dans la taverne, qui jusqu'à présent avait été silencieuse. Un homme se leva, pointant du doigt le mage aux cicatrices.

« Ce type ! Il est recherché par le Conseil Magique !! J'ai vu une affiche avec sa tête l'aut'jour ! Il doit valoir un paquet de Jewels ! »

Ohatsu essuyait sa bouche avec un mouchoir qu'une dame compatissante de son état lui avait donné. Elle observait la réaction de chacun présent dans la pièce, le barman, le mage assis aux comptoirs, les gens installés aux tables... Les voix s'élevaient, créant un brouhaha incompréhensible. La mage lâchait un soupire et se rapprochait des tables.
Elle haussa la voix plus haute que l'assemblée.

« Condamnerez vous une personne qui a sauvé la vie d'une autre ? Alors qu'aucun de vous, n'a levé le petit doigt pour tenter de m'aider ? »

Le silence revient quelques secondes dans la pièce, les citoyens se regardaient se demandant quoi penser.

« Tu l'as bien vu, gamine, ce mec est complètement cinglé ! Il est ... il est ... »

« Différent ?»

« IGNOBLE ! »

Ohatsu regardait cet homme d'un regard méprisant. Comment osaient-ils penser ainsi ? Comment osaient-ils vouloir de telles choses alors qu'eux-même n'ont rien fait ? Bon, elle savait bien qu'il était différent, qu'il ne semblait pas avoir les mêmes goûts que tout le monde, mais quelqu'un qui donne son aide sans rien demander en retour, même s'il est effrayant, à d'autres habitudes que la société actuelle, cet être ne pouvait pas avoir un mauvais fond...

♦ ♠ ♦ ♠

S'accomoder à un meurtrier, à une créature assoiffée de sang ne pouvait qu'être difficile. Quand la peur s'empare de vos entrailles, quand on vous éduque dans cette normalité médiatisée, on traite les gens différents autrement. J'ai été traité autrement par mes parents et je les ai tués lorsque j'eus la magie sur le bout des doigts. Mes parents ne m'avaient été d'aucun secours. Leur peinture avait empoisonné ma peau au fil du temps et je dus me retirer à froid les pustules que cela m'avait crée. Je m'étais fait gronder de ne pas jouer avec les couteaux, mais pourtant,je travaillais sur mon propre bien et eux, passaient leur temps à ignorer de ce que faisais de bien, les améliorations dont je faisais preuve en art. Parce qu'il faut dire qu'au départ, j'étais né pour être un artiste et je le suis devenu temporairement. La malédiction s'était levée et je me retrouvais dans ce corps, à la case départ de mon oeuvre. J'avais été en mesure d'oublier cette facette de ma vie et contre mon gré, je dus continuer à parcourir l'obscurité.Ma tête était déjà mise à prix et pour continuer à vivre en liberté, j'ai tenté de me racheter en sauvant des innocents et en intégrant Silver Fang. Je les ai quittés pour une cause qui me touchait d'avantage, une cause qui comme moi, voulait abréger ses souffrances...

Pendant que je dégustais mon repas, la jeune femme fut prise de nausées et alla se vider la bile ailleurs. C'était probablement par respect pour les gens qui mangeaient. Elle revint, blanche, encore plus blanche que ma peau et à cause de ce liquide, elle dut retourner utiliser le seau. Derrière nous, j'entendais ces chuchotements qui se demandaient s'ils devaient protester haut et fort. Ils étaient loin d'être subtiles, comme j'étais loin d'être stupide. Un homme se leva, pris d'un courage qui ne tenait qu'à un fil. Il protesta ma présence et disait m'avoir vu sur une des affiches de recherche du Conseil. Je cessais de mastiquer, cessais de bouger carrément pour voir de quoi cet échange avec la jeune femme aurait l'air.

L'homme parlait de faire des profits sur ma tête et la jeune femme me défendait en disant que j'étais le seul à avoir bouger pour la sauver des violeurs. Devant tous, elle était sur le point de se faire violer et tous restaient assis à regarder comme si c'était normal. On me traitait de cinglé et d'ignoble et d'une autre part, on disait simplement que j'étais différent. Je souris en coin, faisant éclater une veine qui me coulait au bord des lèvres. Du revers de la main, j'essuyais le gâchis et me levais de mon tabouret pour me poster entre la jeune femme et cet homme qui ne voyait que du profit, cet homme dont des vies humaines ne lui disaient rien de bon puisque cela ne rentrait pas dans ses poches. Il fit un pas vers l'arrière en me voyant, transpirant comme un porc.

Adrien :
«J'ai sauvé une jeune femme de l'emprise de violeurs devant vous tous et cela, la voir se faire malmener vous a semblé normal? Vous êtes tous aussi coupables les uns que les autres, aussi coupables que moi à propos de mes nombreux crimes. Je ne sais plus dans quel monde on vit si c'est pour vous mener le bout du nez avec de l'argent, mais l'envie de tous vous tuer, ce n'est pas cela qui manque...»

Je les regardais, les uns après les autres. Ils avaient tous le profil de complice, complice d'actes criminels. La mine basse, ils n'étaient pas fier d'eux, mais d'un autre côté, il y avait cette prime sur ma tête qui brillait. Je ne me gênerai pas pour les tuer, je ne me retiendrai pas, tant que la seule non-coupable de ces lieux serait en sécurité. Ils se levèrent, les uns après les autres, n'ayant aucun remord de ce qu'ils venaient de faire, ignorant totalement ce que nous leur avions dit. Tous furent debout et empoignèrent l'arme la plus prêt: fourchette, couteau, crayon, tout était permis, mais nul ne survivrait face à un mage.

Adrien :
«Vous courrez droit vers votre mort, citoyens.»

Dans un élan commun, ils poussèrent table et chaise pour venir jusqu'à nous. Ils avaient l'air de véritables chiens enragés et tout ce qu'ils voyaient, c'était une poignée de jewels, la richesse dont ces pauvres hommes ne possèderaient jamais puisque leur heure avait sonné à eux aussi. Mes sourcils se froncèrent, pris d'une colère à mon tour. C'était dans ces moments-là que j'étais fier de ne plus faire partie de l'humanité, d'être devenu une créature de la nuit. L'or a toujours mené les hommes et malgré cela, ils sont menés vers la folie.

Ripping Spikes

toutes mes cicatrices illuminèrent en même temps dans cette lumière jaunâtre. De là, naissaient des shurikens dont je contrôlais pour que ceux qui devaient voler derrière moi soient projetés vers l'avant. Ils fusillèrent dans leur gorge, dans leur cuisse, leur bras et leur crâne. Pour les survivants, c'était le cri de douleur, pour les morts, ce sera des funérailles. J'avais donné cette attaque en signe d'avertissement, mais il semblerait que cela les avait rendus encore plus furieux. Je les attendais de pied ferme, sachant que le corps à corps serait suffisant pour contrer de simples villageois...

♦ Une ville peu accueillante... ♦

♠ Ohatsu Takumi / Adrien Campbell ♠

Tous ces cris, tout ce sang… Ohatsu semblait impuissante, ne sachant quoi faire. Pourquoi … Pourquoi faisait-il cela ? Pourquoi tout devait toujours se régler dans des conflits et dans le sang ? Tout semblait se bousculer dans sa tête. Elle ne savait pas quoi faire. Chaque seconde, une nouvelle victime, chaque seconde, un nouveau corps tombait à terre.
Qui devait-elle défendre ? Qui devait-elle aider ? Pourquoi ne pas partir ? La porte était grande ouverte et n’attendait qu’elle. Partir, loin de ce vacarme et de ce bain de sang. Loin de tous ces cris et de toute cette haine. Ce serait tellement plus simple, plus facile.

* Non, je ne suis pas une lâche… Je ne dois pas m’enfuir.*

Elle finit par ne plus entendre les cris, son regard devenait vide. Sa tête, elle avait l’impression qu’elle allait exploser. Devenait-elle folle ? Probablement … Ses mains, ses jambes tremblaient, tandis que ses poignets se resserraient. Les larmes au bord des yeux, elle voulait crier, crier pour tout arrêter …

Soudainement, dans son esprit, elle pensait à quelqu’un. A un homme qu’elle avait rencontré quelques semaines auparavant. Elle se souvenait de son visage, de sa voix et elle se souvenait d’une promesse qu’elle avait faite à cet homme…

* * *

Ohatsu enlevait le bandage qui lui entourait le bras. La blessure était complètement guérie, seules deux petites cicatrices étaient encore visible.

« Tu as eu de la chance, cela aurait pu être plus grave ! Mais ça à bien guéri, je pense que d’ici quelques jours tu ne verras plus rien.

« Oui … Merci»

La jeune mage était consciente qu’un simple « merci » ne suffira pas à effacer la dette qu’elle devait à cet homme.
«Par contre … Je n’ai pas d’argent »

Haiko riait face à cette remarque et tapotait amicalement sur la tête de la jeune mage

« De l’argent ? qu’est-ce que je pourrai bien en faire ? Non, non, c’est encore une de vos choses inutiles. Une promesse que tu me feras suffira. »
« Une promesse ? »

Le mage acquiesçait en laissant un silence s’installer quelques secondes.

« Je veux que tu me promettes de ne jamais t’attaquer à la forêt et de tout faire pour toujours préserver la vie. »

La constellationiste se demandait si cet homme n’avait pas trop consommé sa propre herbe. Mais dans tous les cas, il l’avait quand même sauvée. Donc, elle pouvait bien faire cela pour lui.

« Euh … très bien. Je vous promets de toujours préserver la vie et de ne jamais m’en prendre sciemment ni à la faune ni à la flore et de respecter les forêts. »

* * *

« Arrêtez … »

Personne n’avait entendu ses mots à peine murmurés. La mage posait ses mains sur ses oreilles. Sa respiration était saccadée, elle avait de plus en plus de mal à respirer.

« ARRÊTEZ !!!» Hurla-t-elle.

Cette fois, elle fut entendue. Les villageois s’immobilisèrent, abasourdis. Ohatsu était toujours derrière le mage aux cicatrices, elle n’avait pas bougé.

♦ ♠ ♦ ♠

Les corps, les cris, les bruits d'acier et de sang, dans un vacarme ensanglanté, causa un boucan qui ne devait guère plaire le voisinage. Je n'éprouvais aucun plaisir à tous les tuer, aucune émotion ne pouvait être ressentie, seulement une âme noire, faucheuse de ces corps meurtris. J'hésitais, attendant qu'ils franchissent cette ligne invisible, attendant le moment pour frapper, le moment pour leur faire réaliser qu'ils marchaient tout droit vers leur mort. L'aveuglement causé par cette mine d'or fit chuter les corps, les uns après les autres. La colère monta en moi, la colère, la honte, la rage de voir tous ces insouciants s'aveugler pour une poignée, se tuer dans un combat déjà perdu. Je les tuais pour me défendre, la défendre elle. Elle n'avait rien à voir avec ma situation, n'avait rien à voir avec ces cadavres à en devenir.

Puis, un cri, aigüe, simple mais efficace. La cohue s'arrêta nette, les couteaux furent baissés. Tous se tournèrent vers elle, l'illumination de leurs soucis. Ils constatent, s'interrogent et pleurent, crient les défunts, prennent la fuite. Tant mieux. Je ne voulais plus salire ma magie sur des êtres aussi infâmes, sur des âmes damnées vers la luxure. Je me retournais vers elle et lui adressais un dernier sourire, un dernier regard. Je me rendis au comptoir et déposais une somme considérable d'argent sur le comptoir, suffisamment élevée pour que le barman garde sa langue pour les quelques jours de ma visite. Je pris le bras d'une main et traîna le corps de l'autre vers la sortie. Je ne me sentais plus utile à ce moment-là. J'avais rempli mes objectifs. La pluie n'avait guère cessée et la tempête, la véritable tempête commençait.

Éclairs, tonnerre. Les traces laissées par le corps pouvaient s'effacer dans les minutes qui suivaient. Je trouvais une ruelle tout près et balançais le corps contre le mur. Je commençais à dévorer le bras. Arrivé à l'os, j'entamais le reste du corps dans un acte de cannibalisme intense. Longtemps, longtemps avait été ce moment où je n'avais pas assouvi ma faim jusqu'au bout, longtemps où je n'avais pas été dérangé pendant un repas. Le ventre plein, je restais accroupi, adossé à un mur. Les dernières gouttes de sang dégoulinant de ma bouche, se mélangeant à la pluie. Seul, j'étais loin de penser que j'aurais de la compagnie. Je fermais les yeux et profitais de ce bon moment, qui sait combien de temps il dura...

♦ Une ville peu accueillante... ♦

♠ Ohatsu Takumi / Adrien Campbell ♠

Tout s’était terminé… Le fracas des lames avait cessé. Tous semblaient voir les conséquences de leurs actes. Le vacarme du combat fut remplacé par des pleures et des cris de lamentations. Le mage quitta les lieux, emmenant avec lui un des cadavres, sous les yeux effarés des derniers villageois encore debout. La constellationiste ne savait pas vraiment quoi faire…. Partir ? Rester, donner un coup de main ? Oui, c’était probablement le mieux à faire. Alors qu’elle s’avançait pour prêter main forte, une des villageoises l’arrêtait.

« NON !! Ne t’approche PAS ! »

La mage s’arrêta net, se demandant pourquoi ils refusaient quelconque aide de sa part.

« Tout ça, c’est de ta faute à toi et ton ami ! »

« Mon ami … ? »

Ohatsu ne comprenait pas la réaction de ces gens. Ne comprenaient-ils pas que la haine n’engendre que la haine ? Elle décidait de pas riposter, de laisser tomber, de toute façon, aucun d’eux ne valaient la peine de déranger les esprits.
Elle se dirigeait vers la porte, sans regarder derrière, voulant oublier cette journée affreuse, à tout jamais.
Seulement, eux, ne semblait pas vouloir tourner la page, au grand regret d’Ohatsu.

« Toi là ! Ne pense pas que tu vas t’en tirer comme ça ! Emmenons là aux autorités, pour qu’elle réponde de ses crimes !!! »

* Mes crimes … Qu’ai-je fais mise a part chercher un peu de chaleur ? *

Les armes furent reprises, mais la mage décidait de s’enfuir dans la pluie battante. Elle allait se dissimulée dans la première ruelle qu’elle croisait. Elle se réfugiait derrière une grande benne à ordure. Accroupie, la tête enfouie dans ses bras, elle espérait qu’aucuns de ces imbéciles ne la retrouverait.
Elle ne se rendit compte que plus tard qu’elle n’était pas seule dans cette ruelle sombre. Lorsqu’elle relevait la tête, elle aperçu que le destin avait à nouveau mit les deux mages sur la même route. Ohatsu se sentait mieux loin de cette foule acharnée. « Emmenons là aux autorités… » Cette phrase lui tournait en boucle dans sa tête. Et s’ils le faisaient vraiment ? S’ils racontaient leur propre version des faits ? Serait-elle aussi recherchée ? Plus aucune guilde ne voudrait d’elle ?! L’un de ces rêves serait donc réduit à néant ?!

Elle soupire et posa sa tête sur ses bras, eux même posés sur ses genoux repliés contre elle. Et maintenant, qu’allait-elle devenir ?

♦ ♠ ♦ ♠

La pluie tapait fort, éclatant sur les dalles de pierre, sur les toits en tôle, sur le métal léger de la poubelle. Je n’entendais rien d’anormal dans les parages… sauf ces cris. Des cris de poursuivants, de citoyens avares et blasés. J’écoutais, bien que moi-même blasé de leur comportement, je portais attention à leurs paroles. Ils parlaient d’une fille, l’enfermer elle aussi, la dénoncer au Conseil. Je les trouvais ridicule, eux et leurs raisons minables, eux et leurs excuses qui ne feraient pas broncher le plus minable des poissons de l’étang. Je me relevais pour mieux me camoufler dans l’ombre et les regardais passer ma ruelle à toute vitesse comme s’ils n’avaient jamais songé à venir y jeter un œil. Je profitais de l’effet de surprise pour les attaquer dans leur dos. Un coup de fil barbelé pour tous les étrangler et le tour était joué, le futur de la fille allait être sauvé.

Justement en me retournant, je vis sa silhouette recroquevillée derrière la poubelle, probablement apeuré ou triste. Je m’avançais dans sa direction et m’accroupis en lui passant mon grand manteau noir sur ses épaules. Il n’était pas chaud, mes pores de peau avaient cessé de provoquer de la chaleur humaine, mais ça la protègerait de cette froide pluie qui nous martelait depuis un moment. Je tentais de lire sur son visage un quelconque sentiment que je pourrais identifier. La voilà qui levait les yeux vers moi, surprise que je sois si près d’elle. Je fronçais les sourcils et lui demandais avec inquiétude :

Adrien :
«Que se passe-t-il? Pourquoi es-tu si triste? »

J’attendais sa réponse avec un brin de sympathie. À son âge, elle avait tout devant elle, tout qui pourrait faire son bonheur. La beauté, bien que ce soit objectif, n’était pas donnée à tout le monde. Pour ma part, je m’étais moi-même défiguré au couteau, défiguré de cette maladie qui me poussait au visage, écorché par le savoir-faire de mes parents. Triste, mais je m’en suis remis. En tuant ces citoyens mécontents, j’avais peut-être aidé le futur de la jeune fille. Peut-être pour la rassurer, mais d’abord par politesse, je lui chuchotais doucement mon nom :

Adrien :
«Je me nomme Adrien. Et toi qui es-tu, mage aux clés brillantes?»

Rechercher

Résultats par : Messages Sujets
Recherche avancée