Suite à la paralysie totale qui avait suivie sa mission avec Miku, Solis avait décidé de faire une "pause magique". En somme, prendre une mission vraiment à son niveau, et fuir Obaba. En l'occurrence, une mission sympa sur les côtes ouest de Fiore, potentiellement facile. Il s'agissait juste d'enquêter sur des vols qu'on attribuait à des sirènes. En gros, 78% de chances que ce soit des ivrognes qui avaient paumé la marchandise, et qui complètement ivres avait tiré des feux d'artifice toute la nuit et baratiné une histoire de sirène sexy le lendemain. Et puis, c'était chouette d'aller à la plage en pleine campagne comme ça.

Il avait tout d'abord rendez vous avec une des victimes, Mme Fiora Casta. Grande. Très forte. Les cheveux blancs laqués en une sorte de flamme sur la tête. Lourdement maquillée. Avec des bijoux clinquants et une robe rouge écarlate. Tata Antlia, mais en vrai. Ah nan, elle a un défaut en plus. Elle chante en parlant. Mais pas juste une voix musicale, nan. La voix façon cantatrice. On dirait une perruche qui roucoule. Mme Casta chanta donc sa triste mésaventure. L'intégralité de sa collection de bijoux avait été dérobée à bord de son yacht, par trois hideuses femmes truites qui avaient assommé l'équipage de leur choeur épouvantable. Hanyah... Deux interprétations possibles, soit les femmes devaient VRAIMENT être moches et chanter faux... Soit Fiora avait une notion de la beauté très nombriliste, et donc très à côté de la plaque... Prenant enfin congé de l'énorme perruche rutilante, et trois aspirines plus tard, Solis avait rendez vous avec la créatrice de l'annonce.

C'était une petite femme brune, agitée, et portant d'épais verres pour ses énormes lunettes, lui donnant vaguement l'air d'un gros insecte. Antiquaire, elle avait vite notée qu'un nombre anormal d'objets rares ou précieux avaient disparus, d'autant qu'elle avait elle même été victime de vols. Dont une collection de miroirs anciens. Du coup, elle avait interrogé toutes les victimes, et était arrivée à la conclusion qu'un groupe de sirènes dissimulées dans la falaise proche attaquait les gens pour voler tous les objets brillants alentours. Elle semblait particulièrement fière de son brillant talent de détective. Pour le coup, ce n'était pas idiot, mais restait que les sirènes avaient tenu tout les équipages en respect jusqu'à présent. Du coup, une attaque frontale semblait difficile.
Mais la petite antiquaire avait plus d'un neurone derrière ses lunettes d'insecte. Elle allait sous peu expédier une cargaison de vases précieux à Harujion, où ils seraient ensuite revendus. Du coup, elle allait les envoyer par caisses, dans un cargo l'après midi même. Et dans une des caisses, il suffirait de cacher le jeune homme, et qu'il se laisse emporter avec les marchandises volées... Puis il battait les sirènes, et l'antiquaire devenait une enquêtrice célèbre.



C'est ainsi que le premier blond envoyé par collissimo naquit. Coincé dans une caisse en bois. Encore heureux que Solis était mince, parce que la caisse était petite, et lui grand. Du coup, quiconque se serait rendu dans les cales froides du bateau aurait sans doute remarqué qu'une des caisses vrombissait de râlage contenu. La voyage fut long. Genre très long. Z'avez déjà fait un voyage coincé en boîte? Et bizarrement, plus c'est inconfortable, plus c'est long. Une histoire de cerveau qui du coup est plus attentif à l'avancement des choses pour savoir quand faire pousser un petit cri de soulagement pour fessier endolori. Il faillit se casser le nez quand la caisse fut brutalement poussée.
Le jeune homme remarqua soudain qu'il n'y avait plus aucun bruit dans la cale. Plus de marin qui siffle, plus de rat qui ronge un truc quelconque. Et la caisse qui lentement s'élève... Avec un lent mouvement allant de haut en bas... La marée? Il y avait de l'eau dans les cales? Puis il entendit la chanson. Douce, susurrante, suave et envoûtante. Accompagnée des doux pincements d'une lyre, sur le murmure enjôleur de la flûte. La caisse racla sur le sol en bois du pont, avant de monter légèrement en passant par dessus bord. Solis roula dans la caisse en couinant, finissant tête en bas. Il y eu un éclair de lumière dans la caisse.

Yataaaaa! Mais... Pourquoi il fait noir...?

...Carina?


Solis? Mais qu'est ce que... Mais pourquoi tu es tête en bas, et...?

Ne bouge pas. Vu la largeur de la caisse, c'est un miracle qu'on tienne à deux. Donc bouge pas trop.

...Oh, d'accord.

Se retrouver soudain à deux, collés dans cette boîte qui voguait sous la houlette des sirènes, c'était décidément pas extra. Outre la proximité gênante, à chaque roulis ils étaient envoyés dans un chaos de membres contre un coin de la boîte.

...Je crois que j'ai le mal de mer...

...Quoi...? Mais... t'es pas l'esprit des océans...?

Si, mais d'habitude, je flotte sur l'eau, je navigue pas... Uuh, me sens mal...

...Pitié, attend qu'on ait accosté pour vomir hors de la boîte...

Hanyahnyah, c'était pas gagné... Dire que ça devait être une mission tranquille... Après une demi heure de hauts et de bas, de roulés boulés avec Carina, et de hauts le coeur paniqués, ils s'écrasèrent enfin sur une plaque rocheuse.

Chut!

Solis tendit soigneusement l'oreille. Il entendait ricaner. Trois voix de femmes apparemment.

Encore une cargaison réussie!

Notre Mermaid Symphonia fait des merveilles sur ces pauvres marins sans cervelle!

Ils se rendent à peine compte de ce qui se passe, leur vue altérée par nos accords merveilleux.

Solis réfléchit. Ceci expliquait qu'il n'ait pas été affecté par le sort sur le bateau, puisqu'il ne voyait rien dans sa caisse. Les sirènes devaient se contenter d'apparaître à la fin pour flatter leur égo avec l'air ébahi des marins. Solis souleva légèrement le couvercle de la caisse. Il vit des paréos. Trois. Avec dedans des jambes. Hanyah, pas normal ça pour des sirènes.

ON EST A TERRE?! MAIS T'ATTENDAIS QUOI POUR ME LE DIRE?!

Carina jaillit de la boîte, fila entre les trois femmes, et parti soulager son mal de mer entre les rochers. Les trois femmes regardaient alternativement l'esprit puis Solis. Une petite blonde rondouillarde, une grande rousse avec des dents immenses, et une brune qui louchait. Bon, bah pour la surprise, on repassera.
Carina releva la tête, et remarqua enfin les voleuses.

Ouh qu'elles sont moches!

Mais... Quelle...

La brune regardait Solis avec des yeux de mérou. Enfin remarque pour une sirène...? Les trois femmes poussèrent un cri en choeur. Le niveau de la mer monta brusquement, noyant la galerie jusqu'à la taille de Solis. Celui ci sortit rapidement de la caisse, mais il était trop tard. Les jambes des voleuses s'étaient soudées, et couvertes d'écailles, et elles avaient plongé. Solis sentit soudain qu'on le tirait par la cheville, et il bascula dans l'eau. Il tomba nez à nez avec la rousse aux dents de cheval. Qui avait plutôt des dents de requin maintenant. C'est vrai qu'elle était vilaine en fait... Elle se reçut une étoile dans le nez, ce qui n'allait certainement pas améliorer son profil.
Solis resortit de l'eau, et prit une grande goulée d'air. Il fut accueilli par une véritable bataille armée. Carina tirait avec sa conque de l'écume contre la brune louche qui poussait des hurlements soniques.

La blonde grassouillette surgit soudain devant Solis, avec l'air satisfait d'une grenouille qui vient de trouver une mouche juteuse. Elle lança un geyser sur le jeune homme qui fut projeter contre la paroi de la caverne. Il étouffa un gémissement.

Mais elle va me lâcher la moche?!

Nan mais tu t'es vue espèce de thon?!

Vieille morue!

Boudin!

Sorcière!

Euh Carina...?

JE VAIS ME LA FAIRE CETTE GROSSE TRUITE!

D'accord, d'accord...

Règle numéro un de survie, ne pas se mêler d'une dispute entre filles impliquant le physique de l'une d'entre elles. La rousse et la blonde revinrent nager devant lui, alors que Carina attaquait un tirage de cheveux en règle avec la brune. Pour commencer, il fallait être éviter une nouvelle attaque par en dessous. Solis révéla ses étoiles. Aussitôt, les deux sirènes plongèrent.

Celestial Starsign, Scorpio: Star Dust!

Le sceau du scorpion illumina le poignet du jeune homme. L'eau autour de lui se remplie alors de poussière d'or. Le mouvement lent des vagues propageait la poudre d'étoile corrosive qu'il émettait. Non seulement cela illuminait l'eau, mais en plus le fait de répandre ainsi la poussière l'arrangeait. La rousse avec la mâchoire de requin fonça dans l'eau illuminée, puis jaillit soudain dans un hurlement de douleur. Elle fuit rapidement des eaux claires, fixant Solis avec un regard hargneux depuis une zone encore sauve. De son côté, Carina fuyait avec ce qui semblait être un haut de maillot de bain.

AHA, C'EST QUI LA VRAIE REINE DE LA PLAGE ICI?!

La brune était vissée dans l'eau jusqu'au coup, et bouillait littéralement de rage. Elle lança un hurlement perçant qui fit tomber Carina. Quelque part, ces femmes étaient fascinantes sur le plan magique. Fondamentalement, elles avaient la même magie, tirée des sirènes. Cependant, les voies de fonctionnement étaient différentes pour chacune. La voix de la sirène, son pouvoir sur la mer, et son existence à mis chemin entre l'humain et la bête marine. En parlant de bête, la rousse lança un bras sous forme de long tentacule pour tenter de déloger Solis de sa mare d'eau protégée.

Carina, utilise cette eau là!

SUS AUX BALEINES!

Carina invoqua sa flûte du typhon, puis entama un petit air joyeux. Au centre de la caverne, l'eau se mit lentement à tourner, à tourner, encore et encore, suivant la mélodie qui allait crescendo. L'eau remplie poussière d'or se retrouva attirée vers le vortex, mais aussi tout ce qui se trouvait encore dans l'eau... C'est à dire les sirènes et Solis. Ils se retrouvèrent bientôt tout les quatre à tourner comme des toupies, dans des eaux d'or et de bleu mêlé. Encore heureux que Solis ne soit pas vulnérable à sa propre poussière. La blonde grassouillette était cramponnée à son cou, et elle ululait de terreur en tournoyant.

Naoooooooon!

Ocean's Symphonia! Viens à moi, mon violon des vagues!

Carina passa au violon, provoquant de larges vagues, allant et revenant avec les inflexions de son bras. Solis réussit à s'échouer sur un rocher, et à couper le sortilège qui le liait à l'Impur. Les sirènes semblaient avoir le tournis, mais elles étaient des créatures de la mer, des vagues ne suffiraient pas.

Ouvre toi, porte du dragon, Draco!


Hmm... Un peu étroit ici...

Vrai que maintenant qu'il le disait, invoquer Draco dans une grotte était conceptuel...

Je vais nous sortir d'ici.

Non, mais ça va...

Draken Blizzard

Hanw...

Draco forma un cercle avec son corps, suivant parfaitement les parois de la cavernes. Solis ferma les yeux. Le corps de Draco s'illumina, et le cercle conçut par le dragon se changea en monumental canon à blizzard. Et comme il occupait toute la surface de la caverne...
Quand Solis rouvrit les yeux, il flottait dans les airs à côté de la rousse médusée. Ils s'écrasèrent tous dans un plat monumental sur l'eau. Les femmes flottaient, inconscientes après avoir servi de munitions. Carina les regardait avec mépris, cherchant accessoirement une tongue perdue au cours du vol plané. Draco sortit de la caverne, les yeux brillants.

J'ai flairé de l'or au fond!

... Tu renifles l'or toi maintenant...?

Je suis un dragon, je suis naturellement dédié à la recherche d'or.

Ah...

Après avoir repêché les trois... femmes truites/thons/mérous, et tout les poissons que Carina connaissait (à votre avis combien en connait un esprit des océans?), Solis récupéra leur butin au fond de la caverne. Sacré butin par ailleurs. En effet, elles avaient une passion pour tout ce qui brillait...

Les trois femmes furent arrêtées, et les objets volés rendus à leurs propriétaires. Ce qui valut d'ailleurs à Solis un claquant baiser sur la joue de Mme Casta, qui songeait à lui chanter un petit air pour le remercier. Elle commença un air d'opéra affirmant rire à se voir si belle en un miroir. Solis se demanda vaguement de quel miroir elle parlait, mais surtout, surtout, il avait hâte de filer. Finalement, il avait changé d'avis. La province en bord de mer, c'est nul. Vraiment. Les gens étaient à moitié fous.