AuparavantLes yeux rivés sur les cerisiers qui constellent l'allée, Abigail siégeait sur un banc. Un faible courant d'air secouait les pétales qui s'élèvaient dans une complainte poétique. Ses cheveux blonds se soulèvaient, dévoilant l'icône du pégase bleue incrusté dans la chair de sa nuque gracile. A cette saison qu'est le printemps, des rêves inavoués éclosent et des inédites convictions fleurissent. Ses bras se soulèvent dans une grâce insouciante et désinvolte, sa tête vacille vers l'arrière et un sourire étire lentement ses lèvres.
Abigail n'était qu'un amas de chair épuisée, fervente à accomplir des fantasmes inexistants qu'elle pensait juste. Mais ça, elle ne l'avait pas remarqué. Ca, elle ne l'avait pas compris. Elle n'avait pas compris à quel point c'était dur, lorsque les rêves se heurtent à la réalité, laissant dans leurs sillages une bouillie d'Abigail écrasée.Avant, elle avait été heureuse. Puis des événements envoûtants ont cisaillés ses convictions en de vulgaires lambeaux de déception. Son sourire se mua en rictus, et le rictus se mua dans une profonde colère contre elle-même. Elle s'en voulait d'avoir été si sotte, d'avoir cru en des hautains idéaux ratés. L'espoir existe, mais il est comme un idéal inaccessible. Abigail venait de brûler ses ailes, broyé dans des émotions qui la dépassent. Cette tornade avait laissé une marée de plumes brûlées.
Maintenant ; En cette matinée printanière, tu marches dans une direction aléatoirement choisie. Tu ne sais pas ce que tu veux faire et ne désire pas en savoir. Tu vas là ou t'emportes le vent et c'est mieux comme ça. Deux personnes ont perturbés ta petite existence que tu pensais toi même factice. Deux êtres que tu estimes suffisamment pour avoir l'hautain désir incontrôlable de les revoir. Deux êtres charismatiques qui t'attirent indéniablement vers eux. Peut-être parce qu'ils ont la faculté de te comprendre. Ca avait commencé avec Senji nommé The Crow. Les prémices de cette rencontre avait été complexes au tout début et avait faillit dégénéré en combat. Mais sa présence t'avais rassuré, parce qu'il comprenait. Et la manière de te couver par son regard de brute t'avais fait jaillir une heureuse sympathie pour lui. Enfin, il y avait eu Erza Scarlet. Une mage puissante aux allures d'ange. Elle aurait pu te comprendre, mais la rencontre avait été coupé prématurément, mais Abigail désirait revoir cette jeune femme apte à s'adapter à n'importe quelle situation.
Erza Scarlet et Senji Kiyomisa. Abigail sourit.
Maintenant au fond d'elle, à part de la peur ou du dégoût, Abigail surprenait autre chose. Un sentiment de pureté qui l'emplissait de la tête aux pieds. Une neige brillante, sans l'ombre d'une trace, tapissait les crevasses de son esprit.
Erza Scarlet et Senji Kiyomisa. Abigail sourit.
L'esthétique bâtisse de Blue Pegasus s'étendait devant sa frêle silhouette. Ses pas s'embrasent, s'écrasant dans une fatigante lourdeur sur le bitume. Il n'y a plus de sillons léger sur l'asphalte, désormais il y a la lassitude qui germe dans sa silhouette, puis il y a ses yeux maquillés d'émotions. Son hasardeux choix l'avait conduite en ce lieu précis, comme une empreinte enneigée qui avait été conservé par sa défectueuse mémoire. Sur son visage, on y décelait une hautaine indécision, le mouvement de son corps retentissait dans un vacarme sourd. Elle voulait rejoindre ce qu'elle chérissait le plus ; sa guilde. Mais que serait donc la réaction de ces gens ? Il y aurait-il un mépris palpable quant à son absence improvisée ? Elle n'était plus revenue depuis l'incident de Legion, et elle était intimidée à l'idée d'affronter les durs regards de ses camarades, encore plus ceux de Bob, le maître de guilde. Ils avaient du avoir des nouvelles par le biais médiatique du festival. Quand bien même, elle restait perplexe quant aux réactions de ses congénères qui partageaient le même insigne qu'elle. Avait-elle gagné le droit d'y retourner, en s'offrant comme une jolie fleur après des mois d'absences ? Elle en doutait sérieusement. La bâtisse se dressait devant elle, prête à l'étouffer de l'immense bienveillance qui s'en émanait. Elle entendait déjà les discussions privées, les conquêtes faites, les amitiés naissantes et les départs de missions précipités. Ce trop de vie qui se heurtait contre ce petit bout de fleur desséchée.
Et enfin, le doute s'immisce par les pores de sa chair, s'infuse dans son esprit ; la peur d'être rejetée. Et s'ils te regardaient, et que toi, tu serais incapable de répondre à leurs honnêtes interrogations ? Petite Abigail, tu parais bien anxieuse tout à coup. Ne penses-tu pas que ta présence a été démarquée ? Personne ne s'affectionne de ta petite personne. Tout le monde s'en moque, et toi tu resteras seule. Comme tu l'as toujours pensé, parce que ta vie est un cycle infernal, et tout ça recommencera toujours. Toujours. Hésitation, ses mains se posent sur la poignée qui refroidit ses tumultueuses pensées. Sa lèvre inférieure se fait prisonnière de ses dents, ses paupières se scellent, et dans une ultime respiration, elle entrouvrit la porte avant d'y loger sa tête dans le petit espace. Les mages étaient présents et n'avaient pas encore capté son invisible présence. Statufiée dans ses questions, elle reste devant le seuil, sans avoir le courage de s'avancer et d'assumer ses foutues responsabilités. Elle s'apprêtait à fermer la porte, quand une douce voix s'échappa, volant dans l'air.
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Abigail ?Elle se retourna, légèrement surprise qu'on l'a reconnaisse. Son éphémère stupeur se mua en une émotion plus rassurante et mystérieuse. Son auditeur semblait heureux de la revoir, et la réciproque était vraie.
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Maître..._
Je suis heureux de te revoir et rassuré aussi, mais nous savons que tu allais bien et que t'es amélioré. Qui plus est, tu étais avec Erza Scarlet, une partenaire non négligeable pour l'un de tes premiers duos. J'ai pu discerner une amitié naissante entre vous deux, c'était dommage que tu fus disqualifié. Enfin, passons. Ton acte était irresponsable, Abigail, et tout le monde s'est inquiété pour toi.Sa fin de phrase s'était envolé, heurté contre les sens d'Abigail qui se contenta de baisser la tête en signe d'acquiescement. Il avait raison. Bob avait raison sur toute la ligne. C'était une onde d'indéniable reproches, et elle l'acceptait. Elle n'avait prévenu personne et avait fuit, elle l'acceptait . Elle avait abandonné sa guilde au détriment de certains mages qu'elle affectionnait, et ça, elle l'acceptait aussi. Les mouvements de Bob s'étirèrent, prêt à lui jetait une sentence à la figure, mais elle ne pouvait rien dire pour sa défense, car elle était coupable, et entièrement. Ses yeux se fermèrent, prêts à accepter son départ. Le silence lui trouait l'âme, des ulcères parcouraient son crâne, imposant une abominable migraine.
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Tu sais, Abigail...Sur ses épaules s'abattirent les deux mains de Bob qui lui souriait chaleureusement, il l'attira contre lui pour donner une rapide étreinte.
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Tu nous as manqués, Aby, bon retour parmi nous.Ce trop de chaleur, ces amicales paroles donna un frisson à la jeune mage qui se contenta d'acquiescer pour ne pas se laisser submerger par cette trop grande vague d'émotion incontrôlable. Sa vision fut noyée par les larmes qui s'abattaient silencieusement au sol. Bob s'avança vers la guilde, ou plusieurs mages épiaient la conversation. Bob leur fit un signe de tête et un nombre de magiciens sortirent pour s'approcher de Phoibos. Phoibos qui s'était égarée dans ses larmes de joie. Ce trop de vie qui s'oppressait contre elle, ces sourires qui la rassurait, ces paroles qui soulageaient son cœur. Elle sentit un poids lourd s'ôter de ses épaules, et bientôt, un sourire sincère écrasa sa tristesse, et elle enlaça autant de mages qu'elle ne le put.
***
Je ne pensais pas que ça se serait passé de cette manière, et je m'en réjouis. Je m'en réjouis énormément. Ils ne m'ont pas questionnés sur mon absence, mais sur mon état actuel. J'aime Blue Pegasus et les gens qui constituent notre guilde. Ils m'ont sourit, m'ont rassurés et m'ont dit que je n'avais pas à m’inquiétai, qu'ils étaient là pour moi. Alors j'ai souri, j'ai souri parce que j'ai vu qu'on ne m'avait pas oublié. C'était un sentiment égoïste après mon absence, mais j'étais rassuré. Rassurée que tout ceci se passe comme ça.
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Les fleurs de cerisiers se décrochent des branches, se déposant dans une valse lente, dans les cheveux ternes d'Abigail. On la voit sourire, broyé entre ses larmes et ses sourires. Et elle se heurta à une scène, la scène de sa vie qui se dévoilait sous ses yeux aveugles. Elle laissa son esprit dériver un temps, et distingua que cette vie, s'ancrait indéniablement dans ce qu'elle chérissait le plus ; Blue Pegasus.