| Sujet: [Mission Lewyn] Défense de la ville Lun 21 Mar - 0:17 | |
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| Lewyn regardait la ville comme un gigantesque terrain de jeu. Fort de ses nouvelles capacités, il attendait fébrilement l’occasion de les utiliser. Il avait passé quelques jours à jouer au déforesteur et se sentait bien plus à l’aise avec sa magie. Il lui fallait une sensation nouvelle, il était gourmand d’un nouveau frisson ; celui qui caresse son échine quand son œuvre d’anéantissement s’accomplissait. Pour ce jour en particulier, il ne voulait plus s’attaquer à un végétal amorphe, mais à un être humain. De ce fait, il rodait dans la ville à la recherche d’inspiration. Ce qu’il vit ne lui plaisait pas : des gamins qui couraient dans les jupons de leur mère, des femmes qui s’accrochaient aux bras de leur époux et des hommes qui se montraient serviles à souhait pour quelques Jewels de plus.
* Ridicule, tout ceci me dégoûte. Je voudrais bien graver dans vos âmes la peur, celle qui vous feraient ouvrir les yeux, mais vous n’êtes pas intéressants.*
Il marchait encore dans les ruelles pendant ce début de matinée quand il se fit aborder par un garde :
« Vous êtes l’instructeur pour aujourd’hui ? »
*Instruire ? Ce serait une bonne idée. Depuis que j’ai compris la réalité des choses, je meure d’envie de transmettre mon savoir. En plus, je vais peut-être trouver le moyen d’être payé pour cette distraction.*
Lewyn renforça le regard dur qui ne le quittait plus désormais. Il ajouta avec aplomb :
« Oui, arrête de traîner et guide-moi. »
Le garde ne fut pas surpris de la dureté de ses paroles et prit le chemin vers la cour en silence, le dos presque courbé d’humilité.
* Il suffit qu’on vous hurle dessus pour que vous rentriez la queue, vous n’êtes que des déchets. Aujourd’hui, je vais me défouler sur vous et vous allez même me remercier pour cela.*
Sur les lèvres de l’instructeur se formait un sourire sadique, il préparait minutieusement le discours qu’il comptait faire à ses vis-à-vis en choisissant des termes choquants et blessants. Il voulait voir si, comme prévu, ces hommes dont il ne savait rien allaient courber le dos pour rentrer dans le moule. Les concessions que ces hommes du commun faisaient, à savoir abdiquer face à la loi, à la politesse, à la morale et toutes ces obligations qui faisaient que l’individu passe d’un être indépendant à un simple outil horripilaient Lewyn depuis cet évènement, cet incident qui l’avait enfin rendu lucide. Ils ne marchèrent pas longtemps et se retrouvèrent bientôt face à une bande de militaires en tenue débraillée, baillant sans retenue. Certains se grattaient ostensiblement leurs cheveux pouilleux, d’autres le regardaient avec les mirettes d’un poisson mis au soleil pendant quinze jours. Le jeune homme commençait à regretter de s’être fait imposteur, il s’attendait à quelque chose de plus prestigieux ou au moins captivant.
« C’est notre instructeur pour la journée, monsieur Laplume ! En rang ! »
Cette phrase avait fusé de la direction de mon accompagnateur.
* Laplume, c’est mon nom on dirait. Tâchons de savoir si ça vaut le coup de rester, parce que je m’emmerde.*
« Nous sommes prêts pour l’entraînement, monsieur. »
Ils étaient gentils les militaires : alignés comme des quilles, ils attendaient le Strike. Ils étaient là, avec leur bassesse écœurante, prêts à se faire réduire en charpie tout en chantant l’hymne nationale :
- Citation :
Eh patrie de mon cœur Je te sacrifie mon bonheur Je verse pour toi mon sang Je me fais ton humble servant Mon corps piétiné par la guerre Retournera nourrir ta terre Ainsi par-delà la mort Tu seras seule maîtresse de mon sort Il les imaginait se sentir honorés de servir de repas aux asticots de la mère patrie ces pathétiques imbéciles engoncés dans des uniformes dégoûtants. Il comptait pousser le jeu aussi loin que possible et se mit à balancer son laïus avec toute le fiel dont il se sentait capable :
« Bande de sous-merdes. Si je suis ici aujourd’hui, c’est parce que vous vous conchiez le froc à l’idée de rencontrer un ennemi qui vous en fasse baver. Vous faîtes pas d’idées les glandus, je vais vous dresser et tenter de faire de vous autre chose que les limaces dégénérés que vous êtes. Si vous survivez à cet entraînement, il est possible que vous arrêtiez de me donner des hauts de cœurs, sinon vous serez mis à décomposer au soleil, sans sépultures et vos camarades viendront vous pisser dessus chaque matin parce que c’est ce que vous valez ! »
Et voilà, leur attention lui était enfin acquise, ils venaient de ranger les trompettes les imbéciles. La matinée lui fut un délice inconcevable : il inventait au fur et à mesure des épreuves qui les monteraient les uns contre les autres. Celui qui traînait à telle course, recevait un Light Pistol pour le remotiver. Parfois, il réservait à ceux qui réussissaient à une épreuve le privilège de mettre une raclée aux retardataires. Très vite, la nonchalance générale laissa place à une motivation sans faille. Ils en avaient besoin, les salauds, qu’on leur mette des coups pour se bouger. Plus ils se faisaient torturer, plus ils devenaient obséquieux ; Lewyn fit pleuvoir de nombreuses fois son sort sous le regard craintif, mais approbateur de ceux qui le recevaient. Il fallait vraiment être masochiste pour cette fonction, en tout cas ces spécimens-là l’étaient.
L’après-midi vint et le laborantin en herbe éloigna le groupe de la ville pour continuer son méfait rémunéré loin des yeux indiscrets des passants. Il allait s’attaquer à son moment préféré, celui qui lui permettrait d’abandonner ceux qui n’en pouvaient plus à leur sort sans grand espoir de retour. Courir, encaisser des attaques magiques et même se battre entre eux, les participants enchaînaient les activités pour le plus grand plaisir de leur maître sadique, Sade en pâlirait de jalousie. Plus ce qu’il leur demandait paraissait cruel et injustifié, plus il gagnait de leur respect et de leur soumission.
Au crépuscule, Lewyn était émoustillé par la débauche d’énergie à laquelle il venait d’assister. Seuls deux membres étaient arrivés à passer les inutiles tests à qui ils les avaient soumis encore que l’un d’entre eux toussait à s’en répandre les tripes par terre. Il encaissa non sans un sourire de satisfaction son salaire ; c’était drôlement agréable de se faire porter aux nues pour avoir pris son pied à piétiner des sous-hommes. Qui sait ce que le lendemain réservait comme surprises à Lewyn, tyran en formation continue ?
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