Un coup à droite. Un coup à gauche. L’oreiller sur la tête, rien ne semble pouvoir arrêter cet agaçant bruit de couinement. Ca couine et ça couine encore et toujours depuis plus d’une heure maintenant. Ca couine et ça hurle de plaisir, tu l’entends. Cela va faire une heure maintenant que la fille de joie d’accoté est avec un de ces clients et tu ne sais probablement pas quand est-ce qu’elle en aura fini avec lui. D’ailleurs c’est seulement possible de faire durer ça toute une nuit ? Ils ne sont pas fatigués ?

Tu te retournes sur ton lit en essayant de fermer un œil mais il n’y a pas moyen. Ça t’agaces, ça te fais chier, alors tu te redresses, les cheveux en bataille et tu frappes contre le mur à grand coup de poing.

« - Oooooh ! C’est pas bientôt finit vos cochonneries oui !!! Y’a des gens qui voudrait dormir ici putain ! »

L’espace d’un instant, le silence revient. Tu te recouches. Tu fermes un œil. On frappe à ta porte. Plusieurs fois. T’as l’impression que les boulons vont céder.

En ouvrant, tu eus la surprise de voir un homme à moitié torse-nu sur le seuil de ta porte et ta tête ne devait même pas lui arriver au niveau du torse. Il est tellement imposant que lui-même doit se baisser pour te faire face. Sa longue barbe rouquine te chatouille le bout du nez et soudain, tu comprends que le client d’accoté….C’est certainement cet homme.

« - Que me vaut l’honneur de votre visite mon ami ?
- T’as dérangé Lisa. On dérange pas Lisa quand Lisa travaille.
- Ah…Lisa..La jolie demoiselle de la chambre 123 ? Charmante jeune femme non ? »

Non pas charmante du tout. Lisa elle est tellement vieille et hideuse que t’es sûr que dans sa foune, y’a des bêtes préhistoriques. On ne lui fait pas l’amour à Lisa, on fait de la spéléologie…Exploration de grottes ou de cavernes. Beurk ! Rien que l’image suffit à te traumatiser et t’en as un frisson qui te parcours tout le dos.

« - Dis donc minus…Si tu cherches des ennuis à ma Lisa…
- Noooon, pas du tout, je vous en prie. Finissez donc ce que vous faisiez. Après tout ça doit être tellement dur de faire rentrer votre énorme…engin dans un si petit…Trou. »

Il lui fait pas mal au moins ? Enfin quoi que…C’est assez extensible apparemment, selon ce que t’as entendu des gars qui racontaient leurs conquêtes d’un soir alors que ce genre de chose ne t’as jamais vraiment intéressé.

Le géant barbe rousse te regardes d’un œil noir et t’attrapes par le haut du pantalon avant de te soulever sans aucune difficulté du sol. L’espace de quelques secondes, t’eus l’impression qu’il pouvait aplatir ta tête avec ses énormes mains.

Il t’emmène avec lui, plus loin dans le couloir, ouvre la minuscule fenêtre du troisième étage de l’auberge et t’y jettes en te donnant presque assez d’élan pour pouvoir voler. L’espace de quelques secondes avant que tu n’atterrisses à l’eau.

Tu l’entends alors se marrer tellement fort tandis qu’on jette ton sac et toutes tes affaires avec. Tu l’entends rire lui et plusieurs autres alors que tu regardes le ponton sur lequel plusieurs bateaux semblent amarrés.

« - Ah !Ah !Ah ! Trop drôle…Je suis MORT de rire… »

Récupérant le tout, tu ressors trempé de la tête aux pieds, tes bottes couinant à leurs tours. Oh tiens, y’a même un bout d’algue dedans. Sympathique dis donc.

« - Bah alors on fait trempette ? AHAHAHAHAHAH !
- C’est ça…Foutez-vous de ma gueule…C’est tellement drôle.
- T’as l’air d’un poisson clown comme ça… »

Tu passes devant chaque bistrot encore ouvert et tous dans le quartier ont la même réaction en te voyant égoutter de partout. Sur le chemin, tu finis par rencontrer Mélodie. Mélodie tu ne la connaissais pas vraiment, elle travaillait dans un bar aussi, elle était danseuse. Danseuse la nuit et plongeuse la journée.

« - T’as encore cherché les ennuis ?
- Pour une fois que je n’ai rien fais.
- Tu devrais vraiment faire attention à toi Killian…Un de ces jours, ça va te jouer un mauvais tour.
- Mais je te dis que j’ai rien fais ! Toi aussi tu ne me crois pas c’est ça ?
- Aller viens, je vais te prêter une serviette. »

Elle t’emmène dans l’arrière-boutique de son bistrot et alors que tu sèches, les fesses posées sur une caisse en bois, enroulé dans une serviette à peine trop petite pour toi, Melodie revient avec une assiette bien garnie.

« - Tiens…Je me suis dit que t’aurais peut-être faim. Tu repars demain c’est ça ?
- Ouais ! Je vais aller vers le Nord du Pays.
- Bonne chance..En tout cas.
- Merci ! »

Tu lui souris et vous passez la majeure partie de la nuit à discuter.

Aux premiers rayons du soleil, tu disparais à l’horizon, loin de tout ça, loin de ce monde. Mais jamais loin de la mer. Jamais. L’océan restera ton premier et dernier amour. Pour toujours.