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Now That I'm Older
 MessageSujet: Now That I'm Older   Now That I'm Older EmptyDim 10 Nov - 16:12

Jiro Yu
Jiro Yu

Eagle's Claw

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Now That I'm Older

Jiro se réveilla au beau milieu de la nuit, il s’était totalement reposé et n’avait plus sommeil. En se penchant vers sa fenêtre, il voyait la clarté floue de la lune éclairer un minimum sa chambre. Il se leva, s’étira de bas en haut, s’habilla tranquillement, et sortit de la pièce. Du couloir qui menait des chambres au salon de la guilde, il pouvait imaginer ses camarades dormir dans leurs propres chambres, derrière les portes en bois. Il marcha sans un bruit jusqu’au salon vide, n’ayant aucun problème pour se déplacer dans l’obscurité. Qu’allait-il faire cette journée ? Voilà quelques semaines qu’il avait rejoint la guilde, et il n’avait jamais encore fait de missions tout seul, alors que c’était normalement son rôle premier. Il s’approcha du panneau de mission, son nez balayant les affiches éparpillées ici et là. Il s’en empara d’une, intrigué. Un noble voulait du spectacle pour une soirée qu’il organisait. Jiro n’aimait pas les nobles. Sa famille qui adoptait leur mode de vie les rejetait de même. C’étaient eux qu’ils tuaient le plus souvent, dans leurs contrats. Amusé par ce relent de souvenir, Jiro quitta la guilde, l’avis à la main, puis entama son voyage jusqu’à Paldora, la ville où se déroulait la réception. Il prit le train de nuit, seul passager malmené par les rails.

Etait-il sincère quand il disait partir en mission uniquement pour faire la mission ? Il n’avait pas besoin d’argent, il n’avait pas besoin de quelconque reconnaissance à la guilde. Sa seule vocation actuelle avait été issue du souvenir de sa famille, amené par l’écriture penchée du noble qui lui avait rappelé les missives qu’il recevait à l’époque où il n’habitait pas encore à Fiore. C’étaient des nobles qui contactaient secrètement les Yu pour leur demander de tuer leurs rivaux, leurs maitresses, ceux qui entravaient leurs montée sociale, ou simplement ceux qu’ils n’aimaient pas. Les Yu s’exécutaient, bien sûr, et recevaient de l’argent après leur travail bien fait. Jiro, après ses premiers meurtres, quand il commença à participer lui aussi à cette activité lucrative propre à sa famille, sentit un gêne étrange l’habiter quand il exécutait les personnes que les nobles demandaient. Il était rare qu’il ait une entrevue avec le commanditaire de mission, mais dans la majeure partie des situations dans ce cas, il se retrouvait face à un personnage malhabile, hargneux, empli de dédain. Jiro se sentait hypocrite d’accepter un travail venant d’une personne qu’il méprisait alors. Il en fit part à sa famille, mais on lui demanda d’accepter ce qu’on lui demandait de faire sans protester ; qu’importaient les commanditaires, ils étaient là pour suivre des ordres et les respecter, c’était là tout ce qui faisait leur prestige. Pourtant, le jeune homme, lors d’une énième convocation par un noble avide de voir quelques personnes mortes sur son chemin, perdit son sang-froid. Alors que l’homme dédaigneux, sans même l’observer, lui demandait de faire le travail à la perfection sans quoi il sévirait, Jiro, malmené par le peu d’égard qu’on lui offrait, se leva, sauta par-dessus le bureau qui les séparait, et planta deux aiguilles dans le visage de l’homme, crevant ses deux yeux simultanément. Cet acte de folie fut grandement réprimé par les Yu quand ils apprirent la nouvelle. Jiro s’était débarrassé du corps, faisant en sorte qu’on ne puisse remonter jusqu’à lui, mais il avait ressenti le désir immuable de raconter l’affaire à ses parents. Il savait qu’il allait être puni, mais il avait l’envie de leur montrer sa présence, qu’il avait ses propres idées, parfois non conformes à celles de sa famille, et qu’il pouvait être en désaccord avec eux. Son père, en écoutant le récit du garçon, se leva, et alla calmer sa colère en quittant la pièce. Sa mère le prit par le cou, le souleva du sol, et le gifla de son autre main. Jiro était humilié, mais il ne pouvait répliquer devant sa mère, car c’était son modèle, mais il était par la même occasion excité par l’idée de déroger aux règles de la famille et d’établir ses propres règles, de tuer les commanditaires insatisfaits. Sa mère l’emmena dans les combles du manoir et le laissa attaché à une chaîne pendant un mois. Il ne reçut la visite en cachette que de son frère, Taro. Il se faisait nourrir par les domestiques. Jiro reçut sa punition avec humilité, car il savait qu’il avait dérogé à une règle fondamentale, et qu’il avait failli entacher son nom de famille si reconnu. Mais surtout car il savait, qu’en lui, naissait ce désir nouveau. Ce désir de satisfaire à la fois sa famille et ses propres pulsions. En allant au rendez-vous fixé par le noble commanditaire, Jiro avait fait la fierté de sa famille car il devenait un réel assassin comme il était destiné à le devenir. Mais sur place, déjà bercé par une propre fierté narcissique découlant immédiatement de celle de ses parents, il atteint l’extase encore plus profondément qu’il ne pouvait l’imaginer en écoutant ses propres envies. Si la satisfaction de ses parents faisait la sienne, désormais il comprit qu’il était aussi parfois plus terrifiant de gouter à une satisfaction beaucoup plus forte. C’était une étape de son émancipation en tant que fils, c’était une expérience qu’il ne répéta jamais plus pour contenter ses parents. Mais désormais ses parents morts, il vivait dans son esprit avec deux crédo moralisateurs : d’une part le souvenir de la voix de ses parents lui insufflaient un code de conduite exemplaire qu’il devait suivre – écouter les ordres, exécuter les ordres et puis disparaitre – mais une autre voix, plus timide, ajoutait une quatrième étape. S’occuper de son commanditaire s’il le méritait.

En arrivant à Fiore, sa qualité de mage lui avait permis de faire quelques missions. Même si elles n’avaient pas de rapport avec le meurtre, le fait d’exécuter les ordres lui procurait un léger plaisir car il respectait par ainsi la volonté de ses parents. Il s’était par ailleurs confronté à Fiore en la vision néfaste du meurtre, et répudié par la nation, il s’était recroquevillé sur lui-même pour songer à la mort. Eagle’s Claw a été sa renaissance. La guilde était un moyen unique d’avoir des missives, donc de combler les attentes de ses parents en respectant un protocole à la lettre, puis une fois les conditions respectées, libre à lui d’écouter ses propres désirs et de s’occuper du commanditaire à sa manière. Il était un Yu, alors il acceptait n’importe quel travail. Mais il était aussi Jiro, et une fois le travail bien fait, il s’offrirait sa propre récompense.

Il arriva à Paldora, la ville tranquille, au matin. Il se rendit à l’adresse indiquée et le noble le reçu dans son propre bureau. Il l’invita à s’asseoir face à lui. Jiro se mit à haïr le commanditaire au premier regard. Le commanditaire n’était qu’une personne abjecte qui se contentait de vivre du malheur des autres – non pas que Jiro prétendait enfin vouloir défendre des valeurs morales sincères, mais il n’aimait pas la façon du noble de considérer le monde autour de lui. Il organisait une fête en compagnie de plusieurs autres ducs et barons, et voulait que Jiro leur fasse un spectacle de magie pour égayer la soirée. Jiro demanda quel spectacle il souhaitait, mais l’homme se contenta avec un regard faussement malicieux de lui demander de patienter, qu’il verrait en temps et en heure. Jiro, écoutant succinctement la voix éphémère de ses parents lui demander d’accepter, acquiesça d’un signe de tête et le baron lui offrit un appartement pour attendre que la journée s’écoule jusqu’au soir. Jiro, faisant fi de la luxueuse demeure, se contenta de lire un bouquin trouvé dans une bibliothèque jusqu’au soir, où on frappa à la porte pour l’avertir que la soirée débutait et qu’on avait besoin de sa présence.

Il arriva dans un couloir et un majordome lui dit qu’il se déroulait un tournoi de mages de l’autre côté de la porte. Jiro pouvait en effet entendre des bruits relatifs à un combat et l’encouragement assoiffés qui l’accompagnaient. Le majordome lui dit que désormais, c’était à son tour d’entre. Jiro passa la porte et arriva directement sur une scène. Face à lui se trouvait un homme ensanglanté, mais toujours debout, les poings levés. Des femmes se contentaient de trainer le corps d’un homme sur le côté, et une foule un peu restreinte de nobles se contentaient du spectacle. Un arbitre nomma Jiro « Combattant Six » et lui dit qu’il s’était engagé dans un combat à mort, que s’il voulait survivre il allait devoir tuer son adversaire, et ceux qui suivraient. Tous les moyens étaient permis, et le combat fut lancé.

Dans un cri de fureur, l’adversaire de Jiro fonça à toute vitesse sur lui, le poing prêt à s’abattre sur son visage. Jiro se contenta de sauter en l’air pour apparaitre dans le dos de l’homme, puis lança trois aiguilles à l’arrière du crâne de l’homme, qui tomba sur le côté. Il fut applaudit, mais Jiro répugnait à ce travail, car il était venu dans l’optique de tuer le noble commanditaire, mais voilà qu’on lui assignait la tâche de tuer des mages sans valeurs. Un nouveau combattant, le « Combattant Sept », entra. C’était une femme, souple, musclée et agile. Elle lança quelques poignards vers Jiro, qui les évita tout en lançant ses propres aiguilles vers elle, mais elle était tout aussi agile. Aucun n’ayant d’armes en réserves, elle prit alors une grande inspiration et cracha alors un souffle enflammé en direction du marionnettiste. Ce dernier esquiva la flamme, mais se rendit compte qu’elle le suivait, totalement magique, et il courut de part et d’autre de la scène, tentant de semer le feu qu’on ne pouvait semer. Il voulut s’approcher de la femme pour retourner son attaque sur elle-même, mais elle bougeait tout en maniant son sort pour l’empêcher de l’approcher et c’était difficile. Pour empêcher d’épuiser trop de son énergie, il se mit en position de garde et attendit que l’attaque le frappe. Il fut frappé en plein fouet par le feu et fut projeté, ses vêtements, ses cheveux cramés, contre le mur du fond. Profitant de l’occasion, la femme lui fonça dessus, un ultime poignard en main, et le posa contre la gorge de Jiro pour la lui trancher. Mais elle ne parvint jamais à terminer son geste, car une salve de flèches l’attaqua dans son dos, ce qui la bloqua l’espace d’une seconde. Jiro en profita pour lui donner un coup de genou dans le ventre, lui cassa le bras pour qu’elle lâche le poignard et trancha sa gorge comme elle voulait le lui faire. Il essuya le sang qu’il avait sur son visage et alla retrouver sa panthère, Sheena, au milieu du terrain, pour la caresser un peu. C’était sa marionnette animale qui avait craché ces flèches.

On annonça « le dernier combattant, le Combattant Huit », et Jiro comprit alors que c’était la fin. Un homme maigre et taciturne entra à son tour. Il salua Jiro d’un sourire, et claqua des doigts. Une explosion envoya Sheena au trépas et Jiro à terre. L’homme sauta sur le corps à terre de Jiro, riant déjà de sa victoire, et arracha les deux bras du marionnettiste. Mais ce qu’il ne savait pas, c’était que le marionnettiste était lui-même une marionnette. Sur le ton de la confidence, comme pour s’excuser d’enlever toute joie à son adversaire, il parla : « Ce ne sont pas mes bras que tu as arraché, les miens sont bien cachés dans mon corps », et à peine terminé, il dégagea son adversaire de lui en l’attaquant avec ses jambes. Il se remit sur pied, défiant à nouveau l’adversaire, quand ses bras détachés volèrent jusqu’à son corps pour se rattacher.

« Je suis marionnettiste, mes fils magiques suffiront à rattacher ces bras le temps du combat. Maintenant laisse-moi m’occuper de toi », se justifia-t-il, puis il fonça à son tour vers son adversaire, le taclant pour le renverser, puis récupérant son visage dans sa main, il le frappa suffisamment fort contre le sol pour briser son crane d’un seul coup. Jiro se releva, épuisé. Ces combats avaient été inutile, il était de mauvaise humeur et se mit, l’air grave, face aux nobles qui l’applaudissaient, debout. « Bravo, bravo ! C’était excellent ! » le félicita-t-on. « Où est ma récompense ? » demanda-t-il en retour, et le noble lui lança une énorme bourse à ses pieds. Jiro, énervé par ce manque de considération répété, donna un violent coup de pied dans la bourse qui alla exploser au visage du noble. « Maintenant, on joue avec mes règles. » Il leva les bras, de chacun de ses doigts des dizaines, voire des centaines de fils sortirent et vinrent s’attacher partout dans la pièce qui devint une véritable toile d’araignée géante, à hauteur humaine, mais invisible. Les fils touchaient tous les endroits, et toutes les personnes. Tout était relié à Jiro, absolument tout. Un noble sortit un révolver, tira en direction de Jiro, mais ce dernier se contenta de stopper la balle en l’air en l’attrapant avec plusieurs fils magiques pour la renvoyer dans le front de son auteur, qui tomba raide mort en arrière. Les autres nobles s’agitèrent, apeuré, mais Jiro les calma. « Stoppez ! Un seul geste et vous mourrez tous, vos gorges sont toutes reliées entre elles, et si l’un de vous fait un geste, vous serez tous décapités dans la même seconde. Un seul d’entre vous peut bouger, ce cher noble, votre hôte. Il a le choix. Il accepte un combat contre moi, sous vos yeux et vos encouragements, un combat à mort. Ou alors il peut s’enfuir, je le laisserais quitter la pièce, mais en partant, il tirera sur les fils qui sont reliés à vous et il s’en ira en vous tuant tous. Ne bougez surtout pas où vous mourrez ; alors, monsieur le noble, quel est votre choix ? »

Totalement apeuré, le noble n’hésita pas une seconde pour s’enfuir. Quand il passa la porte de sortie en courant, les fils qui enlaçaient les gorges de ses invités se serrèrent jusqu’à leur rompre le cou, et dans un même mouvement ils furent tués. Jiro descendit alors de la scène, passa à côté des corps sans s’en soucier, puis alla, calmement, à la poursuite du noble qu’il entendait courir au loin, gémissant par la peur. Le noble courait, fuyait la mort, mais il n’était pas apte à une course, son physique ingrat l’en empêchait, et Jiro le rattrapa bientôt, retrouvant le noble suant, à terre, haletant dix fois plus qu’un animal des plus malades. Jiro s’accroupit aux côtés du noble, lui adressant un sourire courtois. « N’ayez craintes, la mort ne dure qu’un instant. » Il transperça alors de sa main la poitrine grasse du noble pour transpercer son cœur, et il laissa le corps retomber lourdement. C’était une mort sale, mais il ne pouvait pas espérer avoir une belle mort à cause de ce qu’il avait fait endurer à Jiro, à ses invités, à tous ses majordomes. Ces derniers, en voyant le massacre orchestré par le marionnettiste, contactèrent les autorités, mais Jiro bloqua toutes les issues de la maison et alla se cacher tranquillement dans la salle d’eau, se coulant un bain pour se nettoyer.

Le majordome entra dans la salle, interrompant la toilette du mage. « Les servants sont effrayés, à l’intérieur, car toutes les issues sont bloquées. Les autorités vont arriver d’une minute à l’autre. Personne n’a vu votre visage à part moi. » Jiro le contempla, amusé. « Alors vous comptez me dénoncer ? » demanda-t-il en connaissant déjà la réponse. Le majordome eu à son tour un sourire, puis ferma les yeux. « Vous êtes tous libres, désormais. Quand les gardes fouilleront la maison, ils ne trouveront pas de trace de moi ». Et, pour cause, il utilisa la magie de Sayuki pour se transformer en femme et revêtit un habit de servante. Les gardes arrivèrent dans le manoir, constatèrent l’immondice de l’état des lieux, regroupèrent les cadavres, interrogèrent le majordome et toutes les servantes qui devaient rester dans les cuisines pendant que le noble organisait ses soirées. Personne n’avait vu l’assassin, ils avaient seulement entendu le noble courir et hurler à sa mort. Tous étaient persuadés que l’assassin était encore là, car les issues avaient été bloquées, mais après des heures de recherches, les gardes durent se rendre à l’évidence qu’il avait dû s’enfuir. En découvrant les activités illicites, les meurtres organisés en tant que spectacle du noble, ils bâclèrent leur travail, n’ayant pas envie de faire justice à un homme désavoué. Ils laissèrent alors les servantes rentrer toutes chez elles. L’une d’entre elles partit de son propre côté, puis une fois suffisamment éloignée, croqua un caramel pour annuler le sort et retrouver sa véritable apparence. La silhouette du marionnettiste s’éloignait tranquillement pour rentrer à la guilde.
   
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