Le souffle sur ma peau, humide et chaud dans un sursaut, tressaut. Un battement qui s’accélère, une pression des reins dans un gémissement pour lui plaire. Le frisson dans mes os, le plaisir et le vice dans ma chaire. Lui plaire, déplaire. Une respiration qui s'emballe dans la douleur incisive qui s'installe. L'illusion d'une carnation, rengaine la chanson sous le contact froid, explose en moi dans le hurlement strident qui bat. Une simple question dans l'extase d'une douleur sans nom, comment en suis-je arrivée là ?
***
14 heures plus tôt.
Je sens ses yeux rivés sur moi, ce regard frémissant de miles éclats, des désirs malsains dansant entre ses reins. Gerbant. Sa main me frôle dans un geste des plus déplacés, rester d'acier malgré cette envie impérieuse de le castrer d'un coup bien placé, glacé alors que je tais le frémissement qu'il cherche à provoquer au contact de mon épiderme. Serpent méprisable faisant durer l'instant, alors j'attends. L'attente tout simplement, on a toujours le choix me direz-vous. Je choisis d'attendre qu'il finisse son jeu pervers, je choisis d'attendre qu'il énonce la mission. J'en viens presque à regretter la froideur carnassière de celui qui m'avait recruté, je ne l'aimais pas, je ne le haïssais pas, le meilleur rapport qui soit, l'indifférence totale de deux êtres travaillant ensemble. Simplement. J'ai du néanmoins me résoudre à le quitter, changer mon affectation, une simple demande qui fut accepter, prétexte désué pour fuir cette magie qui pouvait me faire chuter. N'y a-t-il pas plus dangereux que quelqu'un capable de sonder vos pensées ? Qui plus ai quand vous savez vous-même qu'elles sont en contradiction de ce que l'on attend de vous, toujours cette réflexion sur ma place au sein de cette institution. Comme pour reproduire encore, et toujours le même schéma consternant.
"Pathétique" pensez-vous certainement. Pourtant aujourd'hui tout est différent et il sera bientôt temps de fixer mes idées sur un jugement. Mal nécessaire ou nuisance aliénante ? Tout résidait en cette question, tout. Alors en attendant, en accords avec le choix de servir dans cet enfer, j'agis et j'obéis, un soldat tant que cela ne contre pas ma vision du monde. Je choisis. Pauvre tarée, pensez-vous certainement... C'est peut-être vrai, néanmoins j'observe avant de juger, observer avant de condamner, réfléchir avant de se fixer. Raisonner. J'agis pour continuer de vivre dans le présent, pour un idéal évoluant, j'agis ici et maintenant, et vous, en faites-vous autant ?
Il parle enfin alors qu'elle affiche toujours cette expression gelée sur son visage voilée du tissu couleur de jais. Il parle et son supplice prend fin dans l’énoncé tant attendue d'une mission pour la tester. Elle peut sentir se regard carnassier, elle peut sentir cette jouissance perverse alors qu'il lui demande de lui prouver que malgré cette tare tâchant ses si beaux yeux elle est capable de servir le conseil comme il l'attendait. Pars, cherches, ramènes. Elle veut le gifler, le gifler d'un coup à lui décocher la mâchoire de son poing venue se refermer au moment de l'impact dans un bruit d'os éclater. Elle reste de marbre, trop intelligente pour rentrer dans la provocation, trop fier pour tomber dans le vulgaire piège qu'il lui tendait. Partir, chercher, trouver. Cela serait fait, elle trouverai le traître à démasquer. Et elle avait d'ors et déjà sa petite idée.
09 heures plus tôt.
Le temps continue de filer, poupée d'ivoire déambulant dans les allées, semblant perdue dans ses pensées. Une seule pensée, faire ce qui doit être fait et dans l'image véhiculée d'une jeune femme rêveuse elle capte chaque son, chaque parole prononcé, chaque intonation de voix. Écoute sur son passage, cherche celui qui ment dans l’accélération d'une pulsation, dans le stress de petits secrets dissimulés ou échangés. Elle traque de ses sens aiguisées. Trouvé. Une simple question posée... Simple question suscitant l’accélération d'une pulsation. Il ment. " Je ne sais pas."
Tu sais.
Le mensonge est une chose étrange et pernicieuse vous ne trouvez-pas ? L'ont peut mentir en croyant dire la vérité, auquel nous disons la vérité. Nous pouvons mentir par omission, auquel car nous nous berçons de l'illusion que nous n'avons pas mentis en taisant l'information. Savoir c'est pouvoir. Je sais sur qui se porte les soupçons, je sais aussi que celui m'ayant confier ces dits soupçons est un serpent.
Et il y'a le mensonge dans la peur. Menteur dans la terreur, il ment certes. Il ment, mais plus important il est terrifié. Sa voix, son cœur, tout trahie cette volonté, il veut parler. Il ne le fait pas par ce sentiment qui le stresse jusqu'à faire perler les goutes salées sur son front. Il a peur.
Elle s'approche, interrompant l'échange mourant entre les deux hommes, ils la fixent d'un regard surpris. Elle feint de chercher le bureau dont elle était sortie quelques heures plus tôt.
Il est terrifié. Un seul nom pour manquer de le faire chuter, faible et terrorisé, simple enfant qui en sait trop, et par cette simple conviction, par cette sensation je sais ce qui doit être fait pour le faire parler.
Elle lève sa main avec une lenteur aérienne, douce et ferme pour venir caresser son bras de son touché, une simple question que ses lèvres font jaillir. Une simple question pour le conquérir.
" Votre voix est sublime. "
L'autre s'éloigne devant ce que ses yeux voient naître, ne voulant pas interrompre un coup potentiellement superbe pour cet ami qui semblait en avoir plus que besoin ses derniers temps.
" Vous accepteriez de boire un verre avec moi ? "
Il se calme, sensiblement et son corps entier trahie le changement d'émotions, il n'a plus peur, il n'est plus stressé. Non. Il est excité. Parfait.
***
L'explosion de sensation alors que son poids s'affale sur le miens. Lentement, fermement dans l’essoufflement. Essoufflé alors que je le sens se retirer, que je l'ai amené où je voulais.
Pensez ce que vous voulez. Je ne suis coupable que d'un crime, le combler en faisant ce qui doit être fait.
Il s'allonge prêt d'elle dans une respiration haletante, corps luisant de sueur après les heures qui les avaient vue se rapprocher. Comblé. Son regard vert ne peut s'empêcher d'admirer les courbes dénudées avant qu'elle ne commence à parler. Entre dans le vif du sujet pour le mener là ou elle le voulait. Il a confiance elle le sait, il a toujours peur, elle le sait, et pourtant ce rapprochement fut ce qu'il suffit à le faire parler, se confier, se décharger de ce poids d'un document qu'il n'aurait jamais dût voir.
Les heures continuent de s'écouler, lentement, mais surement dans la froideur et le calme qu'elle a sut maintenir sur son visage et dans sa voix elle a réussit à le convaincre, le convaincre d'une seule chose : témoigner. Il est sa preuve, le document est le moyen de le faire tomber. Serpent ayant confié la mission de le démasquer, auto-suffisance face à la cécité qui venait de le condamner, car elle savait à qui parler, elle savait qui la croirait et agirait.
***
Le jour commence à peine à se lever alors que son ancien supérieur sort du bureau devant les yeux bandés. La lettre chiffonnée emprisonnée dans son poing d'acier alors que la garde suit son mouvement vers l’immense hall d'entrée, qu'il va en personne chercher le traître à condamner.