Arsher a un look de clochard. De je m'en foutiste. Le genre de type capable de vous regarder vous faire bouffer par des bêtes sauvages sans lever le petit doigt. Le genre de mec avec un regard totalement vide et inexpressif. Mais Arsh a juste sa propre façon de voir les choses. Arsh a juste une relation aux gens un peu spéciale. Arsh méprise le monde. Arsh aimerait cracher à la gueule des habitants de villes entières. Parce qu'Arsh vit dans la rue. Arsh a connu les nuits sous les ponts, avec pour seule couverture un ou deux cartons. Alors Arsh déteste ces gens qui se plaignent sans cesse. Ces gens qui rechignent à aller travailler. Ces gens qui se plaignent de leur condition. Ces gens qui ne voient pas la misère des autres. Alors Arsh a une conception du monde assez personnelle. Donc, il voit les gens différemment de la normale. Et vous, il s'en fout. De ce que vous êtes. De ce que vous pouvez devenir. Dans vos beaux vêtements, avec vos airs arrogants, votre mine bien portante... Il sait que vous n'avez peut être pas eu de chance auparavant, mais il aimerait vous cracher tout son mépris au visage malgré tout. Toutefois... Toutefois, il ne le fera pas.

Parce qu'Arsher tient à rester discret. Il a certains... Secrets qu'il ne tient pas à dévoiler. Arsh a vécu ses propres tragédies. Il a eu ses propres malheurs. Et puis, il sait bien ce qu'il est. Il sait bien qu'il n'est qu'un clochard aux yeux du monde. Il sait bien qu'aux yeux de la « Justice », il sera en tort. Oui, Arsh reste réaliste. Il reste lucide. Et dans un sens, il se déteste. Il hait ce qu'il est devenu. Ce qu'il était. Un lâche. Il sait qu'il se trouve des excuses. Il sait qu'il devrait se révolter. Mais il s'y refuse. Il n'arrive pas à rassembler ce peu de courage qu'il voudrait obtenir. Car Arsh est en continuel débat avec lui même.

Mais Arsh aimerait parfois fuir la réalité. Il se trouve parfois naïf. Parfois idiot. Parfois pathétique. Il a une très mauvaise image de lui même. Il se traite parfois de pur looser. Il voudrait s'asseoir et ne jamais se redresser. Mais il ne renonce pas. Parce qu'il sait que même s'il est irrattrapable, il peut encore aider quelques pauvres hères autour de lui. Il sait que s'il n'accorde pas plus d'importance que ça à son existence, sa carcasse peut encore servir. Encore un peu. Alors il sort une cigarette. Il tire un nuage de fumée. Il ferme les yeux. Il adresse une prière aux cieux. Et il se relève, pour repartir. Comme il l'a fait hier. Comme il le fera demain.

La malchance frappe toujours au mauvais moment. Et ça, tu ne le sais que trop bien. Savoir. Prévoir. Tout ça te dépassait. Toi qui avait eu une vie tranquille, tout a basculé du jour au lendemain. Tu n'étais pas grand chose. Un pauvre ouvrier sans ambitions. Un charpentier sur un chantier naval, à plusieurs lieues de chez toi. Tu n'avais rien demandé à personne. Tu avais tracé ta route petit à petit, comme beaucoup de tes collègues. Tu avais gagné ta place, tu avais façonné ta vie, avec ta sueur et tes efforts. Mais comment aurais-tu deviné que tout s'effondrerait ainsi ? Tu ne pouvais pas deviner que les choses se passeraient ainsi... Tu ne pouvais pas prévoir cet incendie.

Criminel. Accidentel. Tu n'as jamais pu le savoir. Et le fait est que tes pensées étaient tournées vers des sujets plus importants. Tu as tout perdu ce jour là. Tu n'y croyais pas lorsque tu as reçu la lettre t'annonçant la catastrophe. Tu pensais que c'était une mauvaise blague. Du moins, tu voulais t'en convaincre. Tu es tout de même reparti aussi rapidement que possible. Et le spectacle qui t'attendait là-bas n'avait rien de plaisant. Tu n'avais plus rien. Tu avais perdu ta maison. Tu avais perdu ta femme. Tu avais perdu ton fils. Tu n'avais plus rien. Rien, à part tes yeux pour pleurer.

Tu as alors pris les quelques affaires que tu avais emportées, et tu es parti. Demander leur aide à tes voisins ? Hors de question. Eux aussi avaient perdu durant l'accident. Tu n'allais pas aller leur donner un poids supplémentaire. Alors tu es parti. Sans un mot. Comme un voleur, accordant simplement une prière aux âmes de ta femme et de ton fils. Tu es parti errer. Tu as tenté de survivre du mieux que tu pouvais. Jusqu'à les rencontrer.

Un simple groupe de clochards. Des clochards, oui. Des rebuts. Du moins, c'est ce que tu pensais d'eux. Mais ton opinion a changé. Ils ont vu ta misère. Ils t'ont aidé à garder la tête hors de l'eau. Ils t'ont accueilli. Et c'est principalement grâce à eux que tu as pu t'en sortir les premiers mois. Tu leur es redevable pour longtemps. Et encore aujourd'hui, tu payes ta dette envers eux. Ils t'ont appris à garder tes affaires à l'abri, à faire quelques poches les jours de marché, ou même récupérer de quoi manger sur les étalages des marchands trop distraits. Tu as du t'adapter rapidement. Il faut dire que tu n'avais pas vraiment le choix...

Tout allait bien. Enfin, si l'on peut dire que la situation était convenable. Mais tu t'habituais à ta nouvelle condition. Seulement... Le manque d'expérience t'a perdu. Tu fus pris la main dans le sac, en train de faire les poches à un noble de la ville. Alors tu as du courir. Tu ne sais pas combien de temps les gardes t'ont poursuivi. Tu as du quitter la ville, et tu t'es enfoncé dans la forêt la plus proche de la ville, dans l'optique de revenir lorsque les choses se seraient calmées.

Revers de fortune ou acharnement du destin ? Tu ne saurais le dire. Tu ne te souviens plus vraiment de ce qui s'est passé à mesure que tu avançais entre les arbres. Tu te souviens d'une lueur verte. D'un mal de crâne atroce. Et tout s'est troublé. Tu t'es réveillé par la suite, sans savoir où tu te trouvais. Tu ne te souvenais que de la poursuite dans les rues de la ville, et de la façon dont tu avais fui. Tu pensais t'être cogné la tête dans ta course, au vu de tes maux de tête dérangeant. Tu es retourné en ville la nuit tombée. Du moins, tu as essayé. Tu ressentais une violente démangeaison dans tout le corps alors que tu approchais. Jusqu'à vouloir te gratter la joue, te rendant alors compte que tes doigts s'était changés en écorce. Ton bras en branche. Et qu'une force invisible semblait pomper ton énergie. Tu as alors fait demi tour, courant te remettre à l'abri sous le couvert des arbres. Tu ne comprenais pas. Tu étais perdu.

Ce n'est qu'au réveil, le lendemain, que ton état s'était arrangé. Tu as voulu te lever, quittant le matelas de mousse que tu avais improvisé. C'est en t'étirant que tu fus frappé de stupeur. A chacun de tes mouvements, tu voyais une racine bouger, ou un morceau de lierre remuer. Et a chaque mouvement, tu ressentais cette même impression de te faire pomper ton énergie. C'est à ce moment que tu as compris. Tu avais hérité de pouvoir magiques. Comment. Pourquoi. Tu ne le savais pas. La seule chose que tu savais, c'est que ces pouvoirs te seraient utiles. Pour remonter la pente. Pour les aider à se relever. Et c'est pour toi tout ce qui comptait.

Une malédiction, voilà ce qu'est sa magie à la base. Il ne l'a pas choisie. Il ne l'a pas voulue. Mais il a été choisi. Victime d'une force dépassant son entendement. Il s'agit en réalité d'une magie considérée comme noire, et donc interdite. Elle a agit sur son organisme, entraînant des modifications irréversibles, ce qui explique qu'elle ait été proscrite. Il pensait au départ qu'il s'agissait d'une malédiction lambda, qui aurait simplement altéré son être, mais il s'est finalement avéré qu'elle lui avait offert des pouvoirs magiques, liés à la nature, évidemment.