Ma dernière mission datait d'hier. J'avais revu Miku et je ne savais pas quoi en penser. Je pensais à Suzu et à ce troisième homme dont je n'ai pas vu le visage s'avancer vers elle. D'un côté je me disais que j'avais été lâche. De l'autre ? J'en avais strictement rien à faire. C'est le problème de ses alliés d'Angel's Sky, pas le mien.
Pour tout avouer, si je n'étais pas encore rentré ce n'était pas parce que j'avais eu la flemme de rentrer pour faire mon rapport à Maître Bob mais parce que j'étais fatigué ! Bon... Ok ça revient au même... Mais je n'avais pas réussi à prendre une photo de Miku. En vrai, j'avais surtout oublié. Et d'ailleurs, comment j'aurais fait ? Il est fou.

J'avais passé la nuit dans un simple hôtel de Shirotsume qui se trouvait au dessus d'un bar. Là, je descendais les escaliers. Le prix de la chambre avait été payé la veille. Du coup, ni bonjour ni au revoir : je sortais directement par la porte principale.


Une voix un maximum grave et trébuchant dans sa manière de s'exclamer. Deux mots qui suivaient d'un signe de hoquet. Je ne prenais pas la peine de me retourner ; le gars était déjà ivre à dix heure du matin.
Je coupais directement vers la droite, dans une ruelle sombre longeant le bâtiment pour essayer de fuir tout en calme. Bizarrement le minuscule chemin se finissait dans un grand carrefour d'environ dix mètres de côté. Devant ? A gauche ? A droite ? Non : en faut. Au lieu de réfléchir à la faire au « mec mega fort et intelligent qui va calculer quel côté et le plus sûr » je préférais grimper par la tuyauterie de la vieille maison qui faisait l'angle du mur.


Plus ivre que ça, tu meurs. Il me montrait sa bouteille de vers qui laissait un fond de vin rosé couler à l’intérieur tout en se grattant son postérieur et le devant du corps de la même zone. Assez écœuré, je tournais la tête pour marcher sur les différents toits et ainsi me déplacer pour ne pas donner plus d'attention à ce qui semblait être un alcoolique.

Plus tard, pied devant l'autre, mains dans les poches et écharpe au cou - temps d'hiver oblige – je retombais encore une fois nez à nez avec l'alcoolique sur le toit. Toute façon, c'était le dernier toit de la rue. Et la dernière maison sur l'allée du village. Je sautais des tuiles et finissais sur la terre de la route. Je levais doucement la tête pour être témoin de ce petit moment pathétique qui s'offrait à moi. L'alcoolique s'amusait à sauter avec un pied sur les tuiles du dessus et le voilà bientôt en train de s'écraser par terre devant moi.
Au milieu de la route, son corps, en plus d'attirer le pathétisme et surtout la pitié, gênait énormément le passage. Je l'attrapai par le col et le traîna pour le jeter contre le mur. Geste non violet, je me sentais pourtant épié.


Je sortais de la ville en ayant en tête l'objectif de rentrer à la guilde. Je longeais le rivage, regardant mes côtés de travers : j'étais suivi.

Effectivement j’étais suivi. Et la colère de cette chose se faisait ressentir à plusieurs mètres. Au moment où je me tournis pour regarder derrière moi, je sentis quelque chose d’énormément lourd se diriger vers moi. Dans les quelques minuscules secondes de réaction qui m’étaient données, je para l’objet avec mon bras gauche, poussant sur celui-ci avec la main droite afin de ne pas recevoir le coup au visage.
Ce qui venait de me frapper semblait être une simple souche d’arbre. Bizarrement je me demandais pourquoi elle n’avait pas été détruite voire coupée en deux face au tranchant de mon bras.
Miracle Lens… Mon œil se mit à pleurer une larme qui se coucha sur mon œil, prenant la forme d’une simple lentille incolore. Ok, problème réglé, j’avais affaire à un mage qui transférait sa magie dans les objets, à première vue. Quoi que le « à première vue » était un peu abusé comme expression pour le moyen utilisé non ? Surtout que cette expression aurait dû être positionnée sur autre chose. Laquelle ?
Je baissais les yeux pour regarder sous la souche qui appuyait sur mon bras. Le manteau bleu de l’homme me rappelait vaguement quelque chose. L’emblème qui était dessiné dessus était rond, blanc et bleu s’échangeaient leurs places. Non, sérieusement, c’est qui lui ? L’objet avait eu un lourd impact sur mon bras. Heureusement que j’y cache toujours mon épée sinon une partie de mon corps ne serait sans doute plus sur mon corps. Déjà, j’imaginais le sang couler mais en prenant l’idiot pour cobaye voire mannequin en fait. Bête de ma part cette idée m’avait fait rire et m’avait déconcentre surtout (humour noir bonjour). J’exerçais une pression sur ma jambe pour sortir de l’affrontement.

Nous étions côte à côte, à quelques mètres chacun de l’autre. Ce fou me regardait. Je me demandais surtout pourquoi il faisait ça. Et à ce moment, je me rappelai de ce que signifiait ce manteau : Le Conseil de la Magie. Problème résolu. Quoi que non. Qu’est-ce qu’un mage du conseil faisait ici ? Qu’est-ce qu’un mage du Conseil me voulait ? Et surtout, qu’est-ce qu’un mage du Conseil avec une super-branche-presque-indestructible aussi dure que du béton voulait m’attaquer sans raison ?
Le Conseil c’est un ensemble de mages qui sont chargés de la politique du royaume de Fiore. Si j’ai bien compris, les guildes travaillent pour les civils mais sont hautement digérées par le Conseil non ? Alors, mais, qu’est-ce que ce con foutait ici !?
J’essayais de me rappeler ce que je pourrais me reprocher. Rien… Rien… Et : rien. J’ai même rendu service en mettant le gars saoul qui disait que je n’avais pas payé sur le coin de la route pour permettre aux transports de passer. Eh attends… C’est peut-être pour ça en fin de compte : il croyait vraiment que je n’avais pas payé. Bon, j’allais donc jouer à son jeu.

Un mage du corps à corps ? J’avais le choix entre le garder à distance avec ma magie ou le combattre au corps à corps. Comme d’habitude, je pris le choix le plus débile mais surtout le plus tordu : je plongeai ma main dans ma manche et en fit descendre mon katana. Ni une, ni deux, je posais le fourreau à terre et je fonçais sur lui, tentant l’option du leurre en faisant mine de l’attaquer directement à la tête alors que je n’allais que poser ma main sur son torse et directement le faire basculer par terre.

C’est parti…

Il rageait. C’était certain. J’étais là, et je le voyais s’énerver tout seul. Je commençais à rire en me demandant dans combien de minutes il allait perdre son sang-froid. Il lâcha sa massue et sortit de son manteau une épée comme si c’était l’objet du pouvoir, l’objet du sacre qui allait lui permettre de gagner ce stupide combat. Nous n’avions pas attendu longtemps pour nous sauter dessus, arme à la main, donnant des coups et essayant de parer l’attaque adversaire. Le rythme des échanges s’étaient maintenant pendant quelques secondes. Je serais les dents. J’avais peut-être un katana mais son utilisation et son maniement ne m’était pas du tout connu, pur feeling. Je ne savais pas s’il avait remarqué cette difficulté, mais le mage du Conseil profita d’une petite pause pour briser le rythme directement.

L’homme se courba vers l’arrière et, garda son épée à la main, le mouvement ascendant qu’il commençait semblait dangereux pour moi.
Pendant ces quelques échanges j’avais eu le temps de la regarder. Je ne voulais pas, mais il fallait. Une seconde pour rentrer ma main non utilisée dans ma veste, et j’en sortais une deuxième arme : la réplique parfaite de l’épée que tenait mon adversaire. Utilisant mes deux katanas, je bloquai la lame adverse en la frappant des deux côtés. On aurait dit un sandwich, ouais. Mes deux armes étaient le pain, et l’arme adversaire c’était la garniture.
Il était fort. Alors que je repoussais l’attaque et fit un saut en arrière, ma première arme vola loin dans le bosquet derrière moi. Sous la pensée que les deux mêmes armes allaient s’affronter, un sourire naissait sur le bas de mon visage. Moi, je savais que ce n’était que du bluff. Son arme était la vraie et avait bien toutes les caractéristiques de celle-ci. Alors que la mienne n’était qu’une copie : elle avait les caractères physiques, mais le reste n’était rien. Si son arme était ensorcelée la mienne ne l’était pas. J’avais un désavantage certain au niveau de la puissance et de l’utilisation, mais pourquoi ne pas utiliser ce moment de surprise pour attaquer ?

J’avais un point d’eau à côté et j’avais aussi la gourde à ma ceinture. Mais pour le moment je n’avais pas envie d’utiliser la magie. Quoi que je l’avais déjà utilisé. Mais il n’avait pas vu. Bon ? On y va franco ? Plusieurs possibilités. L’attaque directe, diminuer l’endurance de l’adversaire en y allant avec la défense, ou allier magie et confrontation physique… Oui, je savais quelle décision prendre
Water Cane
Un filet d’eau sortit à grande vitesse de la rivière pour se rendre directement sur l’Homme. Je me m’y à courir en sa direction pour être au bon moment au bon endroit. Le but était tout simplement de lui agripper la jambe avec le lasso fait d’eau et de le basculer vers le sol. Le reste : une suite de confrontation physique. Et si en plus je pouvais le repousser jusqu’à la descente pour finir dans l’eau, je n’aurais pas eût à me fatiguer.
J'ai dit que j'y allais sérieusement. Un autre filet d'eau s'extirpa de la masse aqueuse et s'enrouler sur le premier avec le but d'attraper l'autre jambe. D'ailleurs, il ne m’avait pas agressé pour rien ?


Alors que deux fouets sortaient de l’eau, l’un fonçant droit, l’autre tourna autour du premier pour attaquer la deuxième jambe, j’ouvrais agressivement la gourde magique accrochée à ma ceinture pour en sortir une masse aqueuse et la diviser en deux parties. Ces deux parties prenaient rapidement le physique de deux lames en demi-cercle et coupées sur le milieu pour foncer sur l’adversaire. Elles n’avaient pas de qualité tranchante à proprement parler sur le corps humain, certes, mais sur les vêtements ou le reste c’était totalement le cas. Et même si elles ne coupaient pas la peau, l’impact était réel.
Attaqué des deux côtés et moi qui commençait à courir vers lui en même temps, j’avais une sorte de pitié pour lui. D’ailleurs, il semblait y avoir un petit problème avec une des deux lames d’eau… Je devais garder le contrôle de la réplique du katana alors la deuxième lame avait vraiment une stabilité… zéro ?

Le temps filait aussi bien qu’une larme sur une joue. Il coulait tels les grains de sable dans un sablier, tel ta lame fendant l’air qui t’entourait et tes bras qui brassaient celui-ci. Pour moi tu n’étais rien. Un passe-temps, un ennuie : un bouche-trou ? J’aime casser ma poésie par un mot déplacé. Ce mot qui te désigne, présent ou passé, celui qui te regarde de haut, toi qui ne le vois, toi qui ne le voyais que de bas. Ce que je pense de toi aujourd’hui et comme ce que je pensais de toi ce jour-là, quand tu t’es posé devant moi. Tu m’énervais. Tu m’exaspérais. Tes cheveux foncés tombant sur ton visage ne me donnaient que l’envie d’en finir avec toi. Je n’aurais pas eu cet éphémère en main – car ce n’est qu’un rêve, tu l’as vu – mais la vérité qui aurait reflété ton visage lors du coup de grâce, tu serais mort. Mort.

Ce combat durait depuis beaucoup trop longtemps. Les attaques fusaient, frappaient – sur la cible ou sur la terre -, s’échangeaient, s’écrasaient… Tout partait. Tout volait. Il semblerait que nous en aurions encore pour longtemps si personne ne faisait rien. Il s’était dit la même chose. Enfin, sans doute. Il réfléchissait, il bougeait : il attaquait. Venant de se prendre les quelques attaques envoyées tout à l’heure, il en coupait d’autres et esquivait le reste.
Il réfléchit, il bougea : il attaqua. Les mêmes scènes, les mêmes mouvements, les mêmes claquements, son pied frotta le sol et le deuxième se posa devant. Tel un disque ou une lame, il s’approchait de moi, sûr de lui. Un clin d’œil. Je fermai un œil, pleura une larme gardée dans mon œil ; invoquai la magie.
C’était bleu. Une aura dansait doucement, flottait dans l’air, tel le brouillard. De la magie ? Il agrippait l’épée que j’avais copiée avec ses deux mains et semblait y insuffler de la magie. La copie n’a pas les mêmes capacités. J’étais désavantagé. Il était amoché. Il ne me fallait qu’une petite ruse, un petit instant, une grosse attaque pour le mettre à terre et sans doute l’obliger de s’excuser – voire l’obliger de s’expliquer – avant de partir d’ici. Cette épée était créée à base d’eau, certes, mais elle en reste une épée.

Je regardais vite derrière moi en direction de ma véritable arme qui était tombée il y a peu. Il était trop tard pour la chercher. Je n’avais le temps, et je l’utilisais, que pour faire quelques sauts en arrière pour avoir l’infime chance de m’en rapprocher. La toucher ? Aucune chance. L’épée ennemie arrivait vers moi. C’était net. J’essayais de parer avec la copie mais je sentais que quelque chose n’allait pas. Elle se coupa comme du caoutchouc : en deux, net. Tombant au sol, elle s’effritait petit à petit. L’arme se rapprochait dangereusement de mon cou. La parer ? L’esquiver ? Trop d’énergie demandée. Apparemment, aucune utilité. La soit disant lame s’évapora au toucher de ma chair, ressortant de l’autre côté. Je m’avançais, comprenant que cette attaque n’avait pour but que de détruire la copie, et je me baissais à la hauteur de son bas-ventre. J’armais mon bras vers l’arrière, ouvrit ma main, colla mes doigts les uns près des autres, les plia en ayant but de mettre en parallèle la première et dernière phalange – la deuxième n’étant que connexion – et chargea tout. Tout. Mon bras prit de court l’ennemi, de l’arrière et se retrouva à brasser l’air à grande vitesse pour aller de l’avant. Ma main alla de la hauteur de ses genoux, passa par ses jambes, puis le dessous du ventre, et s’arrêta net sur celui-ci en l’écrasant. Une attaque physique ? Non. Un cercle magique se détacha de ma main et grandit pour prendre l’ampleur et la taille de mon corps.


Quelques secondes. Seulement quelques secondes. Avant que le milieu du cercle ne s’autodétruise avec un énorme canon aquatique exploser à quelques millimètres du corps musclé – oui. Quoi ? – de l’homme couvert de cicatrice. Je mettais tout là-dedans. Sans doute. Ou pas… To be continued ?

La magie s’activa et le canon d’eau percuta violemment l’estomac du mage du conseil. Il se fit propulser dans le ciel et s’écrasa de tout son poids contre une énorme branche qui ne craqua pas vu son volume. Le corps resta, basculant sur la branche, puis tomba sur le dos. Il respirait mais ne bougeait plus, de fatigue sûrement… Je décidais tout simplement de partir.