Kuro était paniqué. Oméga était stable, mais son état ne présager rien de bon. Et le conseil débarquerait sous peu. Néanmoins, le chat fut heureux de voir que des gens s'approchaient. Dommage pour le petit chat, c'était des gens armés de fourches et de torches. Mais Oméga se releva, le visage d'un fantôme. Trop tard. Le manche d'une fourche vint s'éclater contre son menton. Il vola en arrière. Et le groupe de villageois en colère s'avança en ignorant le chat qui ne comprenait pas ce qui se passait. Oméga, lentement, tenta de se relever. Il fut violemment plaqué à nouveau au sol. Des pieds vinrent le frapper ensuite. Encore. De nombreuses fois. Ils le piétinèrent avec toute la haine qu'ils éprouvaient pour ceux qui avaient détruit leur village. Puis, voyant qu'il ne bougeait plus, ils se décidèrent à le lever. Oméga, le visage bouffi, ne bougeait plus. Mais les poings ne s’arrêtèrent pas pour autant. L'un des villageois, armé d'une épée, lui flanqua un coup sur la cuisse. Puis sur l'autre. Puis sur les bras. Mais ils furent contraints de fuir, quand le petit Kuro était désormais deux à trois fois plus grand. Kuro regarda son maitre blessé, allongé au sol.
Il était si impuissant. Il ne pouvait rien faire. Alors, Kuro, attrapa son maitre et le plaça sur son dos et ils repartirent tous deux vers Oshibana.Le chemin était silencieux. Oméga pleurait, mais ne sanglotait pas. Son corps tout entier pleurait. Que ce soit du sang ou des larmes, d'ailleurs. Il avait froid. Et puis, il se mit à pleuvoir.
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Je ... Je me demande ... Vraiment... Pourquoi je .. Me .. Bats ... Pour rester ici...▬ Oméga-sama ...
Kuro ne savait pas quoi dire. Il ne comprenait pas les humains. Il ne comprenait pas pourquoi son maître restait ici. Amaymon l'avait dit. Les humains, par bien des manières, pouvaient être plus fourbes qu'eux. Et la situation de son maitre était bien particulière. Le concept même qu'un Diable puisse obtenir un cœur humain était fou et faisait d'Oméga un être unique. Mais pour quelqu'un qui n'était habitué qu'à des sentiments de haine et de plaisir, l'ajout soudain d'un concept de souffrance morale était dévastateur. Combien de fois ?
Trahi ? Jeté ? Abandonné ? Sa propre cruauté. Ania. Bastian. Le conseil. Il avait été un outil jusqu'au bout. Un magnifique outil. Qui faisait très bien son travail. Atios qui l'avait manipulé. Cela n'avait que trop durer. Il fermerait son cœur au restant de l'univers. Atios pouvait très bien vouloir comprendre tout le monde, celui-ci était aussi constamment en train de se cacher derrière les autres. Et lui, ne se cacherait derrière personne. Sauf derrière lui-même.
Et c'est ainsi qu'Oméga, agonisant, coupa son âme au reste du monde. Peu importe qui tenterait de les lire à présent, il les attendait. Qu'ils essayent de lire en lui. Il avait une magnifique armure désormais, contre eux. Une armure qui attaquerait ceux qui tenteraient de lire en lui. Une armure pour leur faire ressentir ce que c'était, de se faire piétiner sans aucune forme de pitié, de l'intérieur.
Plus jamais, il ne laisserait son cœur exposé à la meurtrissure des autres.
Il en avait assez de souffrir. Assez d'être déçu. De faire confiance. De croire en l'espoir que ce monde n'était pas aussi noir. Il avait régné sur les enfers. Maintenant il comprenait mieux ce que signifiait ce terme. Son corps battu était moins douloureux que cette souffrance qu'il s'était amusé à retenir à l'intérieur de lui tout ce temps. Et désormais, cette souffrance lui servirait de bouclier pour se défendre des autres. Mais il savait aussi une chose .. Il n'avait pas fini de souffrir. En fait, quelque part, il avait l'impression que ses souffrances n'allaient faire que commencer. Parce que c'était dans ces moments où l'on croyait que la situation ne pouvait pas être pire, qu'elle le devenait. Chienne de vie.