| Sujet: Ambivalence Mer 26 Déc - 22:32 | |
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Oméa K. Shizuka
| Je grelotais. La neige tombait dru sur Crocus alors que je venais de sortir de la sombre ruelle où je me terrais. Grand diable qu’il faisait froid aujourd’hui. J’avais vraiment eu du mal à m’habiller convenablement pour aller dans cette foutue soirée mondaine mais j’avais au moins gagné un sacré butin. Mon sac bandoulière heurtait doucement ma hanche alors que je marchais dans les rues. Un beau paquet bien serti de pierre, de rubis et de plein d’autre chose tout aussi belles qu’elles étaient chères. Je n’avais plus qu’à aller poser tout ça chez mon ami gageur. Un homme charmant qui m’avait toujours bien aimé. Il voyageait beaucoup et nous envoyait, du temps de Sylva, les adresses de ses différentes boutiques. J’en avais reçu une il y a peu, où il me conviait à une petite visite. C’était donc l’occasion ou jamais.
Je poussais doucement la porte de la boutique aux couleurs sobres. Autour de moi, il y avait des dizaines, des centaines, des milliers d’objets divers et variés. Un vrai régal pour les chercheurs de babioles rares.
- Que puis-je pour … Shizuka ma petite lady préféré ! - Matheus ! m’écriais-je - En personne ma grande, répondit ce dernier en souriant jusqu’aux oreilles, alors comment tu vas ? - Je ne dirais pas que je vais bien mais je ne suis pas mal non plus. - Oooh je vois. C’est ton nouveau maitre ? - Non, Bastian est très gentil. Peut-être un peu trop intéressé mais très gentil. - Hé bien alors ? Qu’est ce qui tourmente ma dame de Pique favorite ?
Il posa sa main sur mon épaule et m’attira doucement à lui, dans une étreinte paternelle. Je reste ainsi pendant quelques instants avant de me détacher de lui.
- Rien du tout. Alors ? Tu avais quelque chose pour moi ? - Oui, figure toi que j’ai mis la main sur l’emplacement d’un démon qui devrait … - Baal je parie. - Raté, il s’agit de Vassago. - Les démons des choses cachées ? Qu’est-ce qu’il foutrait dans les parages ? - A toi de me le dire ma fille.
Je me mords la lèvre en réfléchissant. S’il apparaissait c’est que quelque chose de grave s’était produis. Quelque chose en rapport avec …
- Excuse-moi Matheus, je vais repartir. J’ai besoin de vérifier que je me suis trompée.
Je repartis en coup de vent, faisant claquer la porte derrière moi. J’avais peur. Qu’est ce qui s’était passé bon sang ? Je courrais à toute allure pour rentrer à la guilde, bousculant un peu tout le monde sur mon passage. Un milicien fit mine de s’interposer mais je ne lui en laissais pas le temps. Mammon le poignarda en plein cœur. Une chose chère venait de disparaitre. Si Vassago pointait le bout de son nez c’est qu’il voulait m’aider à la retrouver mais à quel prix ? Et puis qu’avais-je perdu d’abord ?
* J’ouvre bien grand la porte de la guilde. Les mages qui discutaient dans l’entrée me fixent et stoppent aussitôt leur conversation. Le silence de mort et leur regard désolé me brule alors que je continu dans ma lancée, me dirigeant vers le bar. J’apparais devant le barman, le sang de ma victime sur la joue, la dague de mon forfait dans la main.
- Qu’est ce qui se passe ici ? - Ah te voilà enfin ? J’ai une lettre pour toi.
Il posa des gants et une enveloppe sous mon nez. Il me fait alors signe d’ouvrir. Je marque un temps d’arrêt devant les gants tachés de sang. Des gants que j’aurais reconnus entre mille. Ceux de Bastian. Anxieuse, je me saisis de la lettre et en extrait son contenu.
Bastian est mort. Son corps n’est que cendre… Eskesio, son meurtrier. Je reste bloquée sur le début de la lettre. Il est mort. Comme Sylva. Juste … Mort. Le collier ensanglanté de Bastian tombe alors de l’enveloppe. Je le ramasse dans un geste mécanique, la mine indéchiffrable et le passe autour de mon cou.
- Shizuka ?
La voix du barman me tire de mon immobilité nouvelle. J’attrape la paire de gants restée sur le bar avant de répondre.
- Tu peux garder ma chambre et vendre toute mes affaires. J’ai été ravie de travailler avec toi. Salut Clifford de ma part.
Je lui tourne le dos et dévisage la foule qui m’observe.
- J’ai l’air d’un monstre de foire ? Non ? Alors débarrassez moi le passage que je parte à la recherche du salop qui a fait ça.
Je traverse la guilde en sens inverse. Je revêts les gants de Bastian en sortant, alors que la dent d’argent rougie laisse une trainée rouge sang sur mon vêtement. Je marche pour descendre de la montagne en refoulant les larmes qui menacent de couler à chaque instant. J’ai mal. Deux morts. A cause de moi. Vous allez me dire que ce n’est pas le cas de notre runiste préféré. Pourtant le second message dissimulé selon les codes de l’organisation va vous détromper.
Tu as échoué, tu as été décevante... j'attendais mieux de toi, Connaissant Sylva, tu as certainement échoué avec lui. Je t'ai apparemment surestimé. Adieu Karito Dans un sens, le message lui laissait présager que Bastian était toujours vivant. Non, il ne le présageait pas. Il était toujours vivant, j’en étais persuadée. Il ne pouvait pas mourir comme ça maintenant. Je tombais à genoux sur le chemin, mes mains gantées crispées sur le pendentif qui lui appartenait. J’étais en miette. Je n’avais qu’une envie, c’était de mourir. Mais je ne le ferais pas. Pas avant d’avoir rattrapé l’espèce d’illuminé qui se disait tueur de Tomaso. Il savait quelque chose, j’en étais persuadée. Je me mis à hurler dans la montagne alors que le flot de ma tristesse se déversait sur mes joues.
- Mon prénom c’est Shizuka CRETIN !
* Je fis irruption dans la boutique de Matheus pour la seconde fois de la journée et la première fois de la nuit. Jetant sur le comptoir le sac que j’avais trimballé du début jusqu’à la fin, je m’approchais d’un Matheus sidéré par ma mine.
- Dis-moi tout ce que tu sais sur Vassago. Je veux aussi toutes les infos que tu pourras recueillir sur un dénommé Eskesio. Si j’ai suffisamment de fond, engage un traqueur pour lui. Dis-lui que je le veux vivant et que le reste je n’en ai strictement rien à faire. - Qu’est-ce que … - Ah et débarrasse moi de cette quincaillerie. Je vais avoir besoin de liquide dans les prochains jours alors attend toi à me voir souvent ici. - Mais … - Si tu me cherches, je suis dans une taverne pas loin en train de me souler.
Je me dirige vers la sortie puis marque un temps d’arrêt.
- Dernière chose. A partir d’aujourd’hui, j’honore mes arrangements sous le nom de Shizuka. |
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