Il y a des jours comme ça. Où les gentils font de mauvaises rencontres. Et y a des jours comme ça. Où les méchants font de très mauvaises rencontres. Et dans notre cas, il s'agissait bien de cela. Un mage noir en Fiore ne pourrait pas tomber pire que sur Atios. Le fameux porteur de l'épée sacrée Excalibur. Celui qui avait vaincu en duel l'Ace de Légion. Oui, Atios n'était pas encore le meilleur, disons qu'il était doué dans son domaine. suffisamment pour être un rang S. Suffisamment pour pouvoir casser les rotules de nombreux vilains. Certains l'appelaient Dieu de la mort, certains l'appelaient simplement le porteur de l'épée sacrée. Dans tous les cas, sa venue était en général, peu apprécié des mages noirs. Phénomène de foire, héros pour le peuple d'Earthland, épine dans le pied des mages noirs... Oh, pour ceux qui le connaissaient, Atios n'était pas aussi terrible que l'apparence qu'il se donnait. Sa frêle figure et ses regards impitoyable cachaient beaucoup d'insécurités face à l'avenir, face à sa présence en ce monde. Mais il était rare que la psychologie des gens soit binaire, pas vrai ? Trop complexe. Trop confus. Il ne savait plus quoi faire, ni où allait. Il ne savait plus quoi faire depuis la défaite des légionnaires. Fiore était un pays en paix. Et un héros protecteur de la paix est en général seul lorsqu'il s'agit d'en profiter. Seul, plus trop. Aussi fou que cela puisse paraître, il était tombé amoureux d'une criminelle. Un sombre retournement de situation pour lui, digne de la plus romanesque des histoires d'amour. Il se sentait stupide. Préoccupé aussi. Parce que la demoiselle avec qui il avait partagé ses peurs, risquait fortement d'être jalouse de la présence d'une seconde demoiselle tombée du ciel. Pour un ange de la guilde de Laxus, recevoir ce genre de missive, n'était-ce pas là le comble de toute l'histoire ? Oh, il y avait largement plus que simplement ça. Ceci, n'était que les faits les plus récents.

Mais il ne faut pas trop en révéler d'un coup, pour éviter de gâcher les multiples arômes de la destinée d'un être qui s'était maintenu au-dessus des autres de son époque, jusqu'à maintenant. Oh, il avait eu ses échecs. La mort de Yume. Le départ de Fairy Tail. L'échec dans la formation d'une guilde. Oh. En fait, son plus gros succès jusqu'à maintenant, c'était sûrement de ne pas être sombré dans le désespoir face à ses propres idéaux. Vous avez, quand on est quelqu'un de maléfique, on se reproche en général, très peu de chose. Mais les purs, eux, c'est une autre paire de manches. Il n'était pas du type héros pur égoïste qui avançait en envoyant chier les autres. Sauf peut-être d'apparence, sûrement. Mr.Je sais tout. C'est comme ça que Miku l'avait appelé, la dernière fois, tiens. Et que devait-il faire d'Alice ? Il était responsable d'une partie de son traumatisme. La perfection morale avait toujours un prix à ceux qui s'y essayait. Et il était assez douloureux. Atios en était même venu à se poser des questions concernant une probable partie de lui qui serait masochiste avec ses codes d'honneur, ses codes moraux, le genre de code qui, si vous les suivez à la perfection, vous scarifie lentement de l'intérieur à la moindre petite incartade hors du droit chemin. D'ailleurs, pourquoi avait-il atterri sur les routes du nord ? Eh bien ... En fait, il avait eu une envie de marcher. Comme ça. Histoire de réfléchir. Dans le froid et la bonne humeur. Il faisait plutôt sombre. C'était une belle nuit d'hiver. Le genre de nuit d'hiver où Atios se baladait en chemisette. Parce que ça faisait plus classe. Ou juste parce qu'il n'avait pas froid. Ou juste parce que en fait, il n'avait pas eu le courage de mettre un manteau. Enfin bref, c'est là qu'il vit ce que l'on aurait pu qualifier d'horreur en mouvement, sur les routes. Première question : devait-il ou non atomiser cette verrue en plein milieu du joyeux paysage hivernal ? Mais ce n'était pas poli que de cuire les carottes aussi vite.

Mais disons juste qu'en voyant ça, il s'attendait presque à croiser une sorcière à l'intérieur de ce truc. Quel manque de goût en plus, cette roulotte puait le cadavre à vingt mètres.. Comme quoi, on pouvait trouver de tous, à Earthland. Il venait d'en avoir la confirmation. Atios, prudent, bondit dans l'immondice en mouvement pour se rendre compte que le drap qui servait à recouvrir le contenu du convoi étaient eux aussi, très moches. On se serait cru dans un film de Tim Burton, histoire de décrire l'ambiance :

▬ C'est quoi cette horreur ? Vous vous plaisez à vous balader avec un charnier malodorant sur vous ou quoi ?

Le jeune homme avait encore les mains dans les poches de son pantalon de costumes noirs, tenant l'équilibre par un secret que seuls les personnages de rang S maitrisaient. Oh, il n'avait pas encore correctement distingué un possible interlocuteur et il se contenta pour le moment, d'observer les lieux, prudemment.

Que devait-il faire, avec exactitude ? Activant ses yeux cramoisis, il sonda son interlocuteur. Et fut satisfait d'entendre les doux murmures de la folie. Comprendre Henwayu Xakumu serait compliqué. Mais pas impossible. Il était déjà dangereux. L'odeur de la mort. L'odeur du meurtre. L'odeur du cannibalisme. Ses yeux cramoisis brillèrent d'autant. Un mage noir. Enfin. Il en croisait un. Il était faible. Il était fou. Mais surtout ... Atios venait de retirer une grosse prise. Purple Blugloss n'était pas qu'un mirage. Ils existaient bels et bien. Même s'ils étaient inactifs. Fiore pouvait dormir sur ses deux oreilles. Beaucoup trop de mages à Purple Blugloss lui parurent insignifiants. Celui qui lui faisait face l'était d'autant. Peut-être devait-il le capturer et le ramener à Crocus ? Oui, c'était une bonne idée. Autant empoisonner la vie de Purple autant que possible. Mais dans un premier temps, il fallait le rendre docile. Elisa. Qui était Elisa ? Ah non, Lucile. Cela changeait d'un nécrophile à l'autre. Bref. Lucile. Lucile devait être ce squelette avec le lequel le mage noir s'amusait à danser. Atios continua d'observer les yeux du fou et il tenta d'en dégager l'image claire de sa dulcinée. Cela le mena à une scène tragique où il vit la jeune inerte au sol, sous une pluie battante. La volonté de surmonter la mort. La volonté de faire revenir sa dulcinée. De ces désirs égoïstes était donc née la personne qu'il avait face à lui. Pour un peu, Atios le comprenait. Pour les gens qu'il aimait du fond de son cœur, il aurait été prêt à damner, lui aussi son âme au diable. Il eut une petite idée à les voir danser ainsi. S'assoyant dans l'air en se maintenant par télékinésie, il soupira. Pourquoi pas. Peut-être que cela rendrait le malheureux moins triste et plus coopératif.

▬ Sieur Henwayu. Ne voyez-vous pas ? Ce soir, c'est le grand bal. Pour vous et Lucile, des tas de gens sont venues vous voir et danser avec vous. L'un des plus grands orchestres de Fiore est venu jouer pour vous.

L'encourager dans sa folie ? C'était cruel quelque part. Mais le jeune Atios était bien placé pour savoir à quel point ses illusions pouvaient être parfaites. Née de la suggestion, il manipula les sens du fou. La triste carriole se transforma en grande salle de bal huppée. Boiseries fines, parquet lisse, lumières tamisées et chaudes, lustre doré... Loin sur les côtés, les musiciens étaient là. De leurs instruments naissait une très jolie musique venue accompagner le mage de Blugloss et sa défunte amante qui pour le coup, avait récupéré son visage d'antan, lorsque la chair et la vie surmontaient l'ossature défunte. Bien sûr, ce n'était qu'une illusion. Une illusion que les sens et la mémoire du mage noir affichaient sous l'impulsion de l'ange d'Angel Sky. Elle répondrait à ses désirs les plus fous... Temporairement. Atios, voulait savoir combien de temps le bougre allait s'enfermer dans l'illusion qu'il lui avait infligée. Mais il se doutait que la folie de ce dernier rendrait ce spectacle onirique, caduque. Mais cela l'occuperait alors qu'il cherchait à voir comment celui-ci avait été recruté dans la guilde noire. Mais Atios fut déçu de voir que le mage noir qu'il cuisinait sur le feu psychique, n'était au courant de rien et qu'il n'avait jamais mis les pieds dans le QG de la guilde fantôme. Oh, il prolongerait la valse. Et si le pauvre Henwayu n'en sortait pas, il le mènerait, encore un peu plus, sur une voie fort peu agréable pour un mage noir. Dans les geôles du conseil. Il ne pouvait pas laisser un meurtrier fou et sanguinaire se déchaîner dans la nature, peu importe à quel point il respectait les objectifs de celui-ci. Vaincre la mort ... Même Atios, aurait voulu pouvoir vaincre son propre surnom.

▬ Henwayu ... Mon très cher Sieur Henwayu ... Après ce bal, Dame Lucile et vous allait avoir besoin de repos n'est-ce pas ? La plus belle calèche à été préparée pour vous amener dans les plus brefs délais à la capitale, pour vous y reposer.

Atios avait procédé d'invoquer Sleipnir, son équidé de course à huit pattes, pour tirer la carriole vers Era. Il avait quelque scrupule à agir ainsi, mais un fou aussi dangereux ne pouvait pas être libre de ses mouvements. Il devait le remettre aux mains du conseil.

Bien évidemment, jouer la carte de la raison manipulée n'avait pas fonctionné. Sa folie plus que son humanité, avait le contrôle de cet esprit plein de chancre et celui-ci eut tôt fait de transformer l'illusion du jeune homme en quelque chose d'horriblement plus macabre et ce avec la précision incertaine des aliénés. Ce qui avait d'abord été une magnifique illusion d'une salle de bal qu'Atios avait tiré de ses propres souvenirs, était désormais une sorte de réception morbide à cheval entre l'intérieur d'une charrette où ils se trouvaient dans la réalité. Une charrette puant le macabé. Qu'il cherchait, désormais, incapable de la retrouver. Et très tôt, le mage noir l'agressa après l'avoir menacé de mort. Mais son attaque se heurta à un mur doré qui absorba le choc sans aucune difficulté. Mais l'écran de poussière empêcha Henwayu Xakumu de voir s'il avait réussi ou non à atteindre sa cible. Néanmoins, au vu de ce qu'il entendait, celui-ci croyait qu'il avait pu vaincre Atios, qui avait ressenti juste à temps le changement d'attitude de son interlocuteur. Grave erreur que de croire qu'Atios allait se faire avoir par une attaque de ce genre... Surtout depuis Légion.

L'illusion s'était dissipée. Aussi bon Atios pouvait être le mage légal en la matière, il n'était pas capable de faire de miracle et pratiquer l’illusionnisme sur un fou était aussi compliqué que de le raisonner. Que faire ? La méthode douce avait échoué, désormais. Et la méthode un peu plus musclée risquait fortement de l'agacer. Il aurait préféré ne pas à avoir à frapper sur qui que ce soit. Il n'aimait pas la violence gratuite et même en réponse aux agressions, il répugnait de se venger. Mais Henwayu était dangereux, il venait d'en avoir la preuve. Alors, il n'y avait pas trente-six moyens que de calmer sa cible. Atios soupira alors qu'il se mit en garde dans le nuage de fumé. Une garde à mains nues ; l'épée sacrée n'était pas utile dans un affrontement avec un mage aussi faible. Les poings et quelques une de ses techniques suffiraient pour neutraliser le mage qui était sûrement nécromant.

Première attaque. Le jeune homme sortit du nuage de poussière en le dissipant grâce à sa vitesse. Et avec l'aide de celle-ci et de ses sorts de renforcement physique, il décocha un magnifique uppercut à Henwayu, suivi d'un coup de pied marteau sur le genou du mage. Il se mordit la lèvre, tellement il s'en voulait d'atteindre de telles extrémités. Mais il soupira lorsqu'un des os du mage de Purple Blugloss fit un horrible bruit sous son coup. Il venait de littéralement lui disloquer le genou à coup de pied, l'empêchant donc de se mouvoir avec aisance.

Attrapant celui-ci sous son bras, il décida de le ramener aux autorités du conseil, le plus proche. Il s'envola en tenant son captif avec précaution - il n'était pas à l'abri d'un mauvais coup de la part du dit mage, mais après un tel coup dans le menton, le pauvre Henwayu, peu importe sa résistance, devait avoir désormais un gros problème d'équilibre pour quelque temps. Croisant une patrouille du conseil sur les routes, Atios leur expliqua sa prise et partit sans vraiment chercher à plus réfléchir. Avec ce qu'il lui avait collé, il y avait de très fortes chances pour qu'il se réveille en cellule. Bon, c'était sans compter sur le fait qu'ils feraient mal leur boulot, mais ce n'était pas de son ressort. Après cette rencontre, il ne savait plus trop quoi penser de sa situation avec une certaine blondinette.