| Sujet: L'histoire d'une âme Ven 7 Déc - 17:28 | |
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Misto
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- Dis Brynjolf, et si tu me racontais ton histoire ?
Le loup, qui paressait tranquillement près du feu de camp, leva les oreilles et soutint son regard.
- Il n’y a rien à raconter fillette. - Es-tu bien sûr de toi ? - Ton Cuirassé a affronté mille champ de bataille et tuer des milliers de vies. Il n’a rien de glorieux a raconté. Il est accroché à ta famille par punition pour son comportement. - Qu’as-tu fait pour ça ? Il a trahit son propre Roi.
Le silence s’installa autour du campement. Lourd et oppressant. Misto regardait clairement l’esprit sans pour autant oser parler. Elle ne le forcerait pas à partager ses peines s’il ne le souhaitait pas. Il fallait du temps pour guérir certaines blessures. Elle commençait à s’installer pour dormir quand la voix rauque de son loup la surprit.
- C’était il y a longtemps. Je servais mon pays par les armes. J’étais le bras armée de la mort comme il s’amusait à le clamer sur les champs de bataille. J’accompagnais mon roi et je pourfendais la menace de l’envahisseur. J’ai éliminé des centaines de gens sous l’ordre d’une simple personne. Je ne valais rien. Je ne pensais qu’au prochain combat, à la prochaine odeur du sang. Je réclamais les massacres et on me les offrait toujours plus souvent sans que je puisse m’en satisfaire. Et puis un jour, j’ai vu un des tiens…
La voix du loup s’étrangla. La jeune femme tendit sa main vers lui mais il refusa le contact, fuyant son regard pour fixer le feu. Le silence s’installa. L’adolescente ne savait pas vraiment quoi faire. Devait-elle chercher le contact malgré le rejet de sa précédente tentative ? Brynjolf tentait de reprendre contenance et laissa ses larmes couler sur son museau. Il reprit, hésitant, son récit.
- C’était la seule qui se tenait debout sans trembler. La seule qui me toisait, ses deux épées au poing et l’allure digne d’une grande Dame. Je l’aurais tué comme avec tous les autres si elle n’avait pas eu cet éclat. Cette miséricorde compréhensive et incommensurable que vous possédez tous. Je me souviens à peine de notre affrontement. Mais je sais qu’elle l’a emporté. Sans même utiliser sa magie et en me regardant. Droit dans les yeux. Avant que je réalise ma défaite, elle avait réussie à libérer quelque chose en moi. Elle aurait pu me tuer mais elle a continué son chemin sans même se retourner.
Misto ne put s’empêcher de trouver cette histoire touchante. Elle comprenait ainsi de mieux en mieux pourquoi son âme était si triste. Mais il lui manquait encore l’essentiel. Brynjolf passa rapidement ses membres antérieurs sur son museau, dans un geste presque humain pour chasser les larmes.
- Nous avons tout de même remporté la bataille ce jour-là, au prix de plusieurs des nôtres. Les survivants furent capturés. Imagine ma tête quand je suis rentré dans mon pays et que je suis tombé nez à nez avec elle. Elle était attachée dans les quartiers de mon Roi. Il lui tournait autour en la malmenant et la raillant. J’appris, en observant la scène, qu’elle était le général de l’armée adverse. J’aurais pu sauter de joie, l’insulter de tous les noms comme les autres… mais je ne l’ai pas fait.
Les paroles sortaient sans discontinuer, en un flot ininterrompu de bribe de souvenir et de sentiment mêlé.
- Plusieurs mois passèrent et, avec eux, de nouveaux massacres. Mais ceux-ci devenaient plus distant, moins nécessaire. Je revenais souvent au château pour la voir. On l’avait mise dans une cage près du trône. Elle était plus ou moins bien traitée. Mon Roi la voulait en concubine. Il ne cessait de renouveler les avances et ton ancêtre de les rejeter. Elle utilisait son désir pour qu’il satisfasse ses demandes, me convoquant régulièrement en son nom. Ta parente me parlait alors pendant des heures. De sa famille, de son pays d’origine, de son Don, ravissant mon cœur chaque jour un peu plus. Puis on m’a rappelé sur les champs de bataille. Quand je suis rentré, le vent de son exécution courrait dans toutes les rues.
Elle avait attaqué toute une salle avec uniquement une Uta ? Misto chercha dans sa mémoire et se remémora cette lointaine aïeule. Ardea Shida, la faiseuse de miracle. La première Kashu qui avait prouvé son talent grâce à ses pouvoirs et sa virtuosité à l’Uta.
- Au début je n’y ai pas cru une seconde. J’ai même été voir mon Seigneur en personne pour qu’il lève la sentence sans parvenir à le raisonner. C’est ce jour-là que j’ai trahit. J’ai abandonné ma raison et l’ai étranglé. J’ai désiré rompre l’injustice et je l’ai fait. Sans le moindre remord.
Il se tut et fixa la jeune femme. Son bâillement las contrasta avec la chute de son récit. L’adolescente se leva et l’attrapa. Elle le sera dans ses bras et regarda le ciel nocturne.
- Tu as donc fait vœu à Ardea de réussir là où tu avais échoué. Comme nous tous ma petite. Comme nous tous. - Merci Brynjolf. Les vieilles blessures sont parfois dures à évoquer et encore plus à assumer. - J’assume entièrement tous mes actes. Si je pouvais tout recommencer, je ne changerais rien. Pas même les Kashu que j’ai servis et protéger.
La brunette hocha la tête et s’allongea près du feu. Elle invita l’esprit à se coucher à ses côtés mais celui-ci refusa encore une fois.
- Je vais inspecter les alentours.
Misto le laissa s’éloigner sans protester. Il reviendrait demain matin quand il aurait fait le point avec lui-même. Tout ce dont il avait besoin c’est de solitude. Et surtout de temps.
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