Lund, contrairement à ce qu’on aurait pu éventuellement penser, n’était pas bête. Il n’était pas muet, mais simplement silencieux. Il avait pour habitude d’analyser chaque élément s’offrant à lui, afin de tirer le meilleur partit des informations à sa disposition. Il se contentait donc souvent, d’observer avec calme, et surtout, dans le silence. C’était ainsi qu’il avait pu se former son propre opinion sur Tsukiyo. Et son constat avait été étrange. Elle ne semblait pas être elle-même, mais en étant elle. Et ne l’était pas malgré le fait qu’elle le soit. Un concept étrange, à l’image de son inventeur, mais néanmoins clair aux yeux de Lund : Elle n’était pas ce qu’elle prétendait être. Point. Il remua, une nouvelle fois son thé, et y ajouta un sucre. Puis deux. Et une troisième. Le glucose faisait également parti de ces vices que tant de gens possèdent, dont l’adepte de l’Origami faisait partie.

Il redressa la tête, et observa la situation. Un mage de vent, pas très subtil, qui avait laissé son adversaire lui tourner le dos. Ridicule idée, il n’avait même pas profité de cette quasi-invitation à l’attaque, faiblesse probablement, il porta la tassa à ses lèvres, lié au fait que la Ogawa soit du sexe féminin. Le fameux, Lund pencha la tête, comment appelait-on cela déjà ? Ah oui. La légendaire légende de la « femme est fragile ». Du point vue du lunaire, l’aiglonne était tout, sauf fragile et le mage du vent avait eu tort de laisser passer pareille opportunité. Mais quand on y pensait, ce n’était pas comme s’il avait eu la moindre chance depuis le début du combat. Il porta son regard sur la belette blanche, à savoir la fillette qu’il avait rattrapée. Elle était craintive, peureuse, et probablement aussi naïve, car ses trois adjectifs sont souvent ensembles. Elle avait cependant une magie bien plus intéressante et original que le garçon, et Lund, comme devait le faire aussi la meneuse des aigles, mesurait l’impact que pourrait avoir ce pouvoir dans une bataille. Les deux jeunes gens semblaient se connaître, peut-être étaient-ils frères et sœurs ?, et formaient un duo intéressant. Ils seraient surtout deux atouts pour la guilde. Lund remit un sucre dans sa tasse.

Tsukiyo entama un long récit, que Lund trouva relativement ennuyant, et qu’il occupa à remuer sa cuillère à l’intérieur de sa tasse. Elle y expliquait comment elle qualifiait sa guilde de « libre » et non à la solde du Conseil. Elle était très convaincante et aurait fait à n’en pas juger une marchande formidable. Fort heureusement pour le petit commerce, elle était mage. Dommage pour le Conseil, cela lui aurait fait un ennui de moins. Pour terminer, elle désigna le buveur de thé comme « sauveur ». Lund avait en effet sauvé la guilde : Le sang tachant énormément et séchant très vite, il aurait été difficile de laver les murs de la guilde. Il leur fit un signe, sa main dissimulé sous ses manches trop grandes et parla pour la première fois depuis le début de l’épisode.

Il ne précisa pas spécialement son rôle dans la guilde, parler l’avait déjà trop épuisé pour le moment. Il préféra se ré-intéresser à sa tasse, mais en gardant néanmoins, un certain intérêt pour la conversation.