J'avais vraiment eu l'impression de prendre des vacances. Venant de Minstrel, il était clair que la façon de penser de ces autres pays était complètement différente. Il fallait dire que c'était plutôt spécial. Pourquoi est-ce qu'ils s'acharnaient à perdre leur temps dans une religion? Tous les autres pays n'en ont rien à foutre! C'était des vacances pour mes oreilles et pour mes yeux. Je n'entendais plus ces chants sacrés se chanter un peu n'importe où, je ne voyais plus le même accoutrement porté par n'importe qui. Ça faisait du bien d'enfin voir de la couleur, voir de la diversité. À bien y penser, ces types des services secrets venaient probablement de Minstrel voyant leur allure robotique. J'haussais les épaules et quittais Joya les poches encore plus pleines. J'avais sauvé les minerais d'une compagnie. Ils avaient eu des taupes et mon devoir était de les repérer. J'avais fait mieux que ça, je les avais capturées et amenées aux gars. Leur réaction excessive m'avait réveillé quelque chose intérieurement. Étaient-ils donc tous au courant qu'il s'agissait de leur Chef d'Équipe? C'est vrai que quand s'est le patron le traitre, on ne veut pas le dénoncer pour ne pas perdre son boulot. Et ce gars super nerveux à qui j'avais parlé à bord du train... Il m'avait dit qu'il ne voulait pas perdre son job... Avait-il eu dans l'idée de dénoncer le voleur? Ça ne me surprendrait même pas. Certains craquent, d'autres laissent passer et se disent que le destin fera son travail et qu'il lui arrivera malheur.
Je pris donc la décision de me permettre de réelles vacances sur une petite île tranquille. J'avais envie de passer un peu de temps pour moi-même. J'avais envie d'avoir les pieds dans la mer et sentir les vagues caresser en surface ma peau. J'avais envie de nager, j'avais envie de courir pour la seule raison de sentir le vent pousser sur les gouttes d'eau et ressentir ce frisson de plaisir... Il me fallait définitivement un maillot. Je fis le tour des magasins pour m'en trouver un de potable. Tiens... celui-là était pas mal. Il m'arrivait aux genoux et avait un teint majoritairement rouge. Je fis mon achat avant de me rendre dans ce petit bâtiment touristique où on pouvait poser toutes les questions qu'on voulait. J'entrain et fis le tour pour feuilleter les dépliants. Un attira mon attention: Protectorat de midi. C'était quoi ça? Je m'avançai vers l'adolescent qui soufflait sa gomme à mâcher pour en faire une bulle. Lorsque celle-ci éclata, il put finalement me voir en train de l'observer et lui pointer le dépliant du doigt.
C'est quoi cette île?
C'est une île protégée par des écologistes. La nature y est très abondante et les animaux sont protégés par des lois spéciales.
Y'a des plages?
C'est une île, donc oui il y a nécessairement des plages. Mais si vous voulez mon avis, Akane Resort à Fiore est de bien meilleur goût.
Je m'en tape, c'est tout près. Et de toutes façons, j'ai l'intention de retourner à Fiore ensuite, alors...
Très bien... Alors prenez ce train, ce bateau et vous arriverez... là sur la carte. Ça devrait être pas mal...
D'accord. Adieu adolescent boutonneux!
Je partis donc sans me retourner. Je pris donc les transports suggérés et j'arrivai à un port. La plage n'était pas turquoise, mais la mer et le sable étaient-là. À voir ces écologistes me dévisager à mon arrivée, j'avais vraiment l'impression qu'ils ne s'étaient pas faits aux étrangers. Avant de faire mon tour sur la plage, je décidai de voir d'abord s'il y avait des services d'hébergements si je décidais de rester plus qu'une journée. Je fis mon entrée dans le village le plus près. La nature était extrêmement abondante donc les cris d'animaux, ils étaient nombreux et désagréables. Je me demandais comment ils faisaient pour dormir avec ces trucs tout près. Je passais devant une cabane où une homme s'était assis sur sa terrasse pour admirer ces arbres à perte de vue. Lorsqu'il me vit, il se précipita sur moi presqu'en tombant en bas au risque de se casser une jambe. Je m'arrêtai de marcher pour lui porter l'attention nécessaire. Il me révéla en panique son histoire:
Monsieuuuuur! Aidez-moi! Pitié! Ne les laissez pas faire!
Pardon? Il me faudra des détails bonhomme...
Ce sont... ces lucioles! Elles sont maudites! Vous êtes mage hein?
Comment vous arrivez à deviner?
Y'a que des mages qui osent venir sur cette île. Ils sont tous partis la journée-même sans pouvoir régler le problème.
Pourquoi ça?
Ces extrémistes, ils vous prennent pour des braconniers. Je vous le dis, je vous préviens, dans moins d'une heure, vous aurez une armée à vos trousses.
D'accord... et c'est quoi ce problème de lucioles?
La nuit, elle hypnotise les curieux pour les amener à l'écart et quand elles ont la chance... BAM! Elles vous attaquent et vous brûlent! Venez voir un peu ça...
L'homme me traîna pour que je puisse voir le côté de sa maison. On pouvait effectivement voir des trous, de nombreux trous. Il me racontait qu'une fois, une nuée de ces bestioles étaient venues le chercher dans sa maison pour le brûler. Il me montra ses nombreuses taches cicatrisées. Il me montra ensuite ces arbres meurtris de trous. Bien sûr, ces lucioles n'apparaissent que la nuit. Le jour, il me faudrait affronter d'autres adversaires: les écologistes révoltés. Si l'homme qui avait le double de mon âge ne m'avait pas averti que je serais chassé par cette bande d'abrutis, l'effet de surprise aurait fait le travail. Mais là, j'étais averti de ça et du problème de lucioles. Je me craquais les jointures en voyant la centaine d'imbéciles se ruer vers nous avec leurs pancartes. Ils essayaient de crier un slogan qui me ferait rebrousser chemin, mais malheureusement pour eux, j'étais têtu et je ne fonctionnais pas aux menaces. Je levais un bras pour les faire taire, ce qui fonctionnait plutôt bien.
Yô! Les écolos!
Ncmlpmvngft!
Hein?
Ncmlpmvngft!
C'est pas très clair...
Nous demandons votre départ! Partez sur-le-champ, mage!
C'est dommage, mais je n'en ai pas l'intention, voyez-vous?
Si vous ne partez pas d'ici les cinq prochaines minutes, nous forcerons votre départ!
J'aimerais bien voir ça...
PARTEZ! PARTEZ! PARTEZ MAGE PARTEZ!
Vous me gonflez...
PARTEZ! PARTEZ PART-
VOS G*EULES! Écoutez bande d'abrutis... Vous avez des lucioles qui traînent la nuit et qui ont l'intention de tous vous décimer les uns après les autres. Vous voulez risquer votre vie pour des bestioles? Vous êtes ridicules! Je sais que les animaux sont importants pour vous, mais ouvrez les yeux...
PARTEZ! PARTEZ! PARTEZ MAGE PARTEZ!
Vous voulez jouer à ça? Très bien... CROW CLAWS! Vous continuez une seconde de plus votre carnaval les clowns, et je rase la forêt en entier.
Non pitié! Tout ce que vous voudrez!
Tout? D'abord je veux que vous me foutez la paix... ce sera tout.
Vous avez entendu? Rentrons chez nous...
J'ai vraiment eu chaud sur celle-là. Les raisonner n'aurait mené la chose nulle part. Ce n'était pas comme si je n'avais pas tout essayer. Je voulais qu'ils voient que le peuple était en péril si ces bestioles restaient en vie. Je retournais voir les trous faits à la cabane et me dis que ces lucioles étaient plutôt intelligentes. Elles avaient figuré que la cabane était la résidence du vieil homme. Elles en savaient un peu trop si vous voulez mon avis. Je me disais qu'il y aurait peut-être un moyen de les raisonner si elles m'écoutaient. Entre des écolos extrémistes enragés et des bestioles chasseresses, mes chances de réussite étaient un peu plus élevées. Pour le moment, j'allais m'étendre en maillot sur le bord de la mer. Je me disais que trouver un hébergement serait tout à fait inutile puisque je quitterai l'île quand le problème serait réglé. Je me fis bronzer de long en large, j'allai courir pour dépasser la vitesse des vagues, j'allais nager. Je me sentais comme un enfant. Jamais mes parents et moi n'étions partis en vacances en famille. Ils préféraient rester cloîtrés et prier. J'avais qualifié cette journée de productive. Je me sentais léger intérieurement, tout à fait calmé de mes émotions.
La nuit tombait, mais je restais allongé au bord de la mer à contempler le ciel. Couché sur le dos, les mains derrière la tête, je ne me disais pas déçu de ce petit voyage. J'avais apprécié le paysage et les émotions que me procuraient ce calme serein. Maintenant, je contemplais les étoiles. C'était clair que j'aurais aimé partager mon bonheur avec quelqu'un, mais cela m'était tout à fait impossible. Je soupirai pour moi-même. Cette solitude me tuait à petits feux. Je me remémorais mes moments à la secte où je pouvais considérer ces gens comme ma deuxième famille. J'avais eu des bons comme de mauvais moments. Je me souvenais que quelques uns d'entre nous avaient été arrêtés à cause de leur liaison avec la secte, mais pas pour leur utilisation de magie illégale. Ils n'avaient jamais osé se débattre contrairement à moi. J'avais montré le potentiel magique que ça pouvait avoir. On m'avait arrêté brièvement avant de me relâcher et de me considérer comme étant exilé.
Le signal lumineux avait donc décidé de se mettre en action. Je vis une petite lumière verdâtre voler en forme de 8. Je me relevai debout et me mis à la suivre. Elle m'amenait au village où justement quelques habitants se faisaient attaquer par une nuée de son espèce. Je serrai les dents et me précipitai à leur rescousse en utilisant mon «Faith's Protection». Leur attaque physique fut déviée sur mon bouclier. Je poussai les résidents en leur ordonnant de se mettre à l'abri. Ils n'attendirent pas que je le dise deux fois avant de se sauver à la course. Les lucioles essayèrent plusieurs façon de s'attaquer à mon bouclier. Elles formèrent plusieurs formes, utilisèrent quelques tactiques, mais les brûlures n'étaient pas assez efficaces. Elles décidèrent de quitter en retraite. Comme si j'allais les laisser partir sans faire quoi que ce soit. Je les suivis jusqu'à leur base-mère où une luciole plus grosse que les autres brillait tout en haut. Je me mis donc à crier dans le but d'avoir leur attention. Elles redescendirent encore plus nombreuses. Leur silhouette commune formait alors un visage. Leur voix commune résonnait comme un tout, me permettant de pouvoir communiquer sans devoir les faire répéter:
Que voulez-vous, mortel?
Mortel? Vous êtes aussi mortelles que moi... Je veux que vous arrêtiez de vous acharner sur ces habitants.
Nous ne pouvons pas faire cela.
Pourquoi ça?
Nous devons leur faire comprendre qu'ils essaient de nous empoisonner en faisant brûler du chanvre dans du papier. Nombreuses de nos consœurs sont décédées à cause de cela.
Je vois... Et si je réussis à les dissuader, vous arrêterez de les attaquer?
C'est exact.
Je quittais leur nid pour me précipiter en ville. À peine étais-je parti qu'il y avait encore cette luciole qui me suivait. Je n'en fis rien et continuai ma course vers le village. Dans le ciel, un énorme feu avait été allumé. À mon arrivée, je voyais ces con*ards d'écolos en train de fumer la plante pas nette et danser autour du feu. Je serrai les poings et m'avançant vers eux. Alors qu'ils allaient se prêter le bout de papier illicite, je le pris dans ma main et l'écrasa comme si c'était une vulgaire mouche. J'avais senti une brûlure, mais je m'en foutais, ces cons devaient comprendre. La musique de leurs chants s'était stoppée, tous me dévisageaient.
Con*ards, fils de p*te, enc*lés, vous n'avez donc rien compris? Ce truc-là, ça va vous tuer. Ça ne détruira pas que vos poumons, mais les lucioles vont bâtir une armée pour finalement mettre fin à vos fêtes d'imbéciles! Vous me donnez vraiment le goût de tous vous tuer. Vous me faites penser au Royaume de Minstrel. Plutôt que d'être bornés à prier, vous vous bornez à fumer un truc débile!
Ah ha... HAHAHAHA!
Ma colère de voir ces bornés me monta à la tête. Je fis sortir mon Crow Claws et trancha la tête de celui qui venait de se moquer de ce que je disais. Cette forêt méritait du respect et ces gens n'en avaient aucun. Ils se fichaient de ce que je pouvais bien dire, mais moi je ne me foutais pas de lucioles qui cherchaient à vivre par elles-mêmes. Les écolos avaient sursauté à mon geste et me traitèrent d'avocat du diable. Je n'en avais rien à foutre. Voir le sang giclé avait réveillé ces cerceaux vides et lents. Ils promirent de ne plus recommencer. De toutes façons, s'ils recommençaient, ils se verraient traumatisés par ces lucioles une fois de plus. Ce fut le vieux qui me donna ma récompense. J'avais eu l'impression qu'il m'avait donné toute sa fortune. Il ne cessa de me remercier de leur avoir ouvert les yeux à la situation actuelle. Je n'en fis rien et quittai l'île pour retourner à Fiore. Au moins, là-bas, les gens sont un peu moins débiles. Tout au long de mon voyage, j'avais l'impression d'être devenu fou. J'entendais une voix venant de mon oreille droite qui ne cessait de dire: «Monsieur!». En plus, ça me chatouillait et je n'arrêtais pas de mettre mon doigt dans mon oreille, au cas où ça délogerait des mauvaises saletés...
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