Ca a commencé il y a trois jours de ça. Et ça devient pénible. Sincèrement. On m’a joué de très mauvais tour, mais ce sortilège là, je ne l’avais jamais vu. J’ai la varicelle version magique, et mes boutons sont plus ou moins élégants. C’est que… Je suis devenu une usine de création à moi tout seul. Au début, c’est drôle. Ensuite, c’est lourdingue.

Ca a commencé un beau matin, je prenais mon petit déjeuner, puis j’ai un pris le train. Je ne me sentais pas très bien, un léger mal de ventre incompréhensible. Je me suis dis que ça passerait tout seul, alors j’ai rien fait. A côté de moi, il y avait un petit enfant qui dormait, et en face, ses parents. Adorable, cette petite famille, vraiment. Les parents étaient plutôt jeune, et la complicité d’une romance encore toute fraiche brillait comme une étoile dans un ciel noir. C’était tellement mignon, jusqu’à ce qu’ils se mettent à me fixer étrangement. Ne comprenant pas, je baisse la tête pour voir des pétales de fleurs dépasser de ma veste. Je l’ouvre donc, et voici un bouquet de rose, sorti de nulle part. Enfin, il est sorti de ma veste pour être exact, mais il n’était pas là avant. Enfin, vous m’avez compris hein ? Bon, je n’ai pas cherché à comprendre, et je leur ai offert le bouquet avec un sourire gêné.

Puis dans l’après midi je me suis rendu au parc d’attraction, et alors là, c’était la foire. J’ai levé les bras en ciel en riant, et se sont échappé de mes manches tout un flot d’accessoire de foire, comme des confettis et des serpentins, et même un nez rouge. Et là, j’ai vraiment commencé à m’inquiéter quand les gens m’ont regardé étrangement et que je n’ai pas eu d’explications à leur donner. Enfin surtout quand, après avoir croisé un gosse dans une poussette, quelques mètres plus loin, une jeune femme m’a arrêté pour me tendre une peluche de lapin rose.
- C’est à vous, il vient de tomber de votre épaule

Et puis c’est devenu presque systématique. Je ne sais pas qui m’a causé tant de soucis, mais la fréquence augmentait de plus en plus. Une poêle par ci, un ukulélé par là… Et encore, ça c’est la partie drôle pour tout le monde. J’achète des sucettes, et avec la monnaie, je tends un désodorisant sorti de nulle part. La vendeuse n’a pas apprécié et m’a jeté dehors. Puis des bonbons ont poussé sur ma tête alors que je me baladais dans la rue, si bien que je n’osais plus sortir quand il y avait du monde avec tous ces objets insolites. J’ai été pété une durite dans ma guilde en cherchant le petit plaisantin qui m’aurait maudit, et on m’a gentiment enfermé dans l’armurerie jusqu’à ce que j’arrête de pondre des lames en tout genre.

Bon, je vous raconte le pire du pire. Je me suis rendu à la bibliothèque chercher des bouquins sur mon pouvoir. Vous savez, contrairement à la majorité des mages qui apprennent dans des bouquins et étudient des années, je n’ai jamais eu de tuteur pour m’apprendre sa magie. La mienne est apparue telle quelle et s’est exprimée d’elle-même en moi, ce qui arrive de temps à autre. L’inconvénient, c’est que personne n’est là pour me guider, surtout que ma magie n’évoque rien à qui que ce soit, si ce n’est qu’elle serait « perdue ». Géniale, hein ? Enfin bref, j’ai fini par penser que c’était un sale tour de ma propre magie en suivant la logique d’apparition de ces choses. Il y a un lien avec les émotions qui trainent dans le coin à chaque fois. Donc peut être bien que le problème, c’est moi, et non pas une quelconque malédiction.

Sauf que voilà, à la bibliothèque, il a fallu que je tombe sur LE bibliothécaire. CE bibliothécaire, qu’on ne sait pas ce qu’il fou dans cet emploi pou vieux grincheux à lunette, mais qui est absolument magnifique. Jeune hidalgo si charmant que même un hétéro aurait dévié le regard. Si si, j’vous jure.

- Je peux vous aider, monsieur ?
- Hééébaaa… c’est que… Ou-oui très certainement… Je ch…
- Si je puis me permettre, vous avez une… couronne sur la tête monsieur

Prince charmant. Haha, très drôle. Rangeant la couronne de papier dans une poche de ma veste, je me reconcentre sur ce charmant bibliothécaire

- Pardonnez, un vilain sort. Je cherche le rayon des livres traitant du sujet de la magie perdue.
- Je vois, si vous voulez bien me suivre. Quel type de magie vous inté…

De part sa tête, je devine qu’il s’est passé encore un truc. Effectivement, j’ai des étoiles miniatures brillantes sur le cou. Je m’en débarrasse de la même manière que précédemment avec un sourire gêné. J’essaye de penser à autre chose tandis que nous nous dirigeons vers le rayon adapté. Après quelques blabla informatifs sur ma magie, le biblio montre sur une échelle attraper un bouquin qui serait apparemment parfaitement adapté. Il me le tend avec un sourire, et là, c’est la cata'

- Les magies anciennes, tome IV, De la magie d’origine émotionnelle.

Je lève la main pour le prendre en le remerciant, et encore une fois, le sort a frappé. J’avais entre mes mains, pour une raison inconnu, un magasine avec une photo douteuse, destiné à un public tout aussi douteux, et certainement majeur. Je suis devenu rouge comme une tomate. Je n’ai jamais ouvert ce genre de chose, et je n’ai pas l’intention de m’y mettre.

- Vous semblez avoir quelques soucis avec votre magie, de ce que je vois.
- Vous m’en voyez sincèrement désolé

Il a simplement ri, doucement, comme un bon habitué de ce genre de lieu le ferait. Et puis il a pris le magasine, plaçant entre mes mains le bouquin de magie.

- En espérant qu’une fois ce problème résolu, vous parviendrez à m’offrir quelque chose de plus élégant. Je garde le magasine en souvenir, revenez vite me voir.

Totalement déconcerté et ne sachant pas où me mettre, j’ai vite filé avec le bouquin, où j’ai fini par trouver mon bonheur.

- Par la pureté des émotions et la sincérité des sentiments, que le maléfice du comble s’arrête ici et maintenant. Depth of the feeling.

Ceci mit fin à mes trois jours de malheur. Et par la même occasion m'a ouvert la porte vers de nouvelles possibilités. Mon pouvoir me surprend un peu plus chaque jour. Néanmoins, je n'ai jamais osé retourner voir ce bibliothécaire.