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Passager clandestin (réservée)
Rang de la mission : C
Objectif : Un petit trafiquant désire faire appel à vos services. Sa principale exigence est votre totale discrétion. Il vous indique un navire à bord duquel vous devez vous infiltrer au port.
C’est un grand voilier qui doit officiellement relier Harujion à une île à proximité pour le compte d’un riche particulier. En réalité, quelques cales transportent des objets magiques volés à un marchand (voire d’autres marchandises précieuses), et il doit revenir à l’aube avec une cargaison de produits sans valeur.
L’équipage est composé d’une cinquantaine de marins sans magie. Une dizaine de sbires est présente pour superviser le transport, et ils s’en prendront aux intrus.
Une fois sur l’île, vous devez vous rendre à l’Est pour récupérer un « colis » d’un certain Takami que vous rapporterez au commanditaire (en reprenant le même bateau qui fait escale pendant 2 heures).
Conditions pour réussir :
Apporter le colis au trafiquant.
Personne ne doit voir le colis.
Il commençait à se faire tard. Goubkine était allé finir la journée dans une taverne des bas-fonds d’Harujion.
L’endroit était tel qu’on pouvait être sûr de croiser des escrocs et bandits de toute sorte ; et c’était justement pour ça qu’il était venu. En effet, les missions qu’il pouvait accomplir « légalement » n’était pas suffisamment gratifiantes et rémunérées à ses yeux. Il avait dû chercher un stupide chat qui s'était perdu, une vieille dame lui avait demandé s’il pouvait surveiller son fils pendant une journée, et un marchand l'avait même accosté pour une aide à la fabrication de sucettes…
Il s’était donc assis seul près du comptoir, le chapeau dissimulant légèrement son visage, et il buvait sa bière par petites gorgées.
Il n’y avait pas beaucoup de monde, mais ceux qui étaient présents lui rappelaient le temps où il fréquentait déjà des criminels dans un autre royaume. Peut-être trouverait-il un employeur potable?
A une table juste derrière lui, il sentait que les clients ne souhaitaient pas être entendus.
C’est à ce moment là qu’un ivrogne s’approcha de lui en commandant un énième verre d’un alcool inconnu pour lui.
"Dis-donc *tousse*, on t’a jamais vu ici é…tranger, qu’est-ce tu trafique *avale péniblement sa salive* dans le coin ..?" *tousse*
L’homme avait visiblement beaucoup bu, et il avait du mal à articuler. Ce n’était sûrement pas ce genre de personne qu’il cherchait, mais il avait senti dans son dos que l’attention de certains venait de se porter sur lui.
"Je cherche un moyen rapide pour gagner de l’argent. "Direct et efficace ; Goubkine avait pesé chaque mot, et avait été très clair. Mais le sac à vin en face de lui ne l’arrangeait pas beaucoup. Le mage lui offrit donc un verre d’alcool très fort pour « l’achever ». Comme escompté, l’ivrogne ne tarda pas à aller s’affaler sur un banc, laissant son nouvel « ami » seul.
Un des clients qui lui avait semblé très discret lui fit un léger signe de tête, presque imperceptible. Un homme, petit et chauve, plus ou moins la quarantaine. Il avait passé une bonne partie de la soirée attablée avec d’autres individus du même style pariant de l’argent en jouant à des jeux de hasard. Goubkine attendit deux minutes pour finir sa bière, payer la note et se diriger vers la sortie sans se presser. Il voulait montrer un certain détachement, comme si l’affaire avait peu d’importance pour lui. Cela serait toujours plus confortable pour négocier ensuite.
Il sortit en faisant grincer la porte, devant l’indifférence de la salle. Le mage s’adossa ensuite à un mur de l’autre côté de la rue en attendant qu’on vienne le rejoindre. Ayant déjà eu des contacts peu recommandables, il s’attendait à ce qu’on lui demande de faire ses preuves - au combat notamment.
Quand le client intéressé sortit de la taverne accompagné de trois gorilles, Goubkine avait déjà repéré suffisamment de roches pour une de ses techniques et se tenait sur ses gardes. L’homme en question s’approcha de lui et lui tendit la main. Intrigué, Goubkine ne réagit pas et se contenta d’un :
"Bonsoir… "Son interlocuteur ne parut pas surpris par sa méfiance et retira sa main avec un léger rictus.
" On m’a dit qu’tu veux t’faire d’la thune facilement pas vrai ? "
Il se contenta d’acquiescer très légèrement ; donner toujours le moins d’information était une règle chez lui. Il encourageait ainsi l’autre à parler et à se dévoiler.
" J’ai une affaire à t’ proposer, si t’as pas d' problème pour oublier un peu la loi… "
Le mage le fixait, inexpressif. Il parla avec une minime pointe d’intérêt dans la voix, juste assez pour donner confiance à l’individu :
" Continuez. "Le chauve hésita un instant, avant de faire signe à un des colosses qui l’accompagnait.
" On va encore vérifier un truc. Simple formalité… "
Le mastodonte s’approchait de Goubkine avec des intentions nettement hostiles. Le fait d’avoir un seul adversaire en face de lui laissait présager que c’était un test.
Goubkine évita le premier coup de poing et recula de deux mètres pour être hors de portée.
« Stone Arm »De petites roches vinrent se déposer autour du poing et de l’avant-bras droit du mage. Il avait la sensation de pouvoir laisser son bras en le maintenant en hauteur par la pression des pierres.
Il s’élança sans prévenir vers son adversaire en lui assénant un coup à la mâchoire. Sa seule force n’aurait pas fait grand-chose à ce colosse. Mais en combinant ses muscles et la puissance de la roche, il avait du casser quelques dents et ouvrir le visage en plusieurs points. Les deux autres gardes du corps eurent un sursaut et s’apprêtaient à intervenir pendant que leur collègue s’était accroupi la main devant sa bouche. Le chef eut un sourire satisfait et s’approcha de Goubkine pour lui expliquer la mission. Il semblait qu’à cause de l’obscurité, ils n’avaient pas remarqué la technique utilisée par le mage, qui se permit de relâcher les pierres silencieusement.
Le chef-chauve était un trafiquant, se présentant sous le nom de Jo Satori.
La mission était assez simple et bien payée : s’infiltrer à bord d’un grand voilier (où d’autres trafics pouvaient avoir lieu apparemment) récupérer un colis d’un certain Takami sur l’île de destination, puis rapporter le colis à Satori en le dissimulant soigneusement. Le seul problème était l’incertitude concernant la nature du colis, pour le reste, il saurait se tirer d’affaire.
Ils se quittèrent sur cet accord.
Goubkine fit ensuite chemin vers l’endroit du port où le voilier « l’Indocile » avait jeté l’ancre. Le départ était prévu dans 4 heures, il avait donc le temps de se reposer. Mais avant cela, il voulait faire un tour à bord, pour voir comment était construit le bâtiment – et ne pas être décontenancé une fois le navire au large.
Il sauta à la mer à une distance de sécurité convenable pour ne pas attirer des éventuels vigiles de l’Indocile, puis s’en approcha à la nage. L’eau était assez froide mais comme il savait qu’il ne resterait pas longtemps et qu’il serait en mouvement, cela ne le dérangeait pas.
Il s’accrocha à la corde reliant l’ancre au bateau puis la grimpa et mit les pieds sur le pont. Déjà, il entendait les pas réguliers d’un garde à proximité, mais les pas trop monotones montraient que le garde ne se doutait de rien.
La luminosité était très faible, donc les risques de se faire repérer étaient réduits. Goubkine en fit le tour pendant une vingtaine de minutes – juste assez pour découvrir quelques éléments utiles. Ses sens étaient en éveil afin d’éviter une rencontre, mais à part l’unique garde, il n’y avait personne.
Près des cuisines, il trouva quelques tonneaux contenant plusieurs denrées : alcool, pommes de terres, noix, pommes, légumes… En réalité, il y avait dans les cuisines de quoi réaliser un vrai festin. Il se contenta cependant d’une pomme – avoir l’estomac lourd si le navire affrontait une tempête était fatal.
Enfin, il trouva une cellule, où se trouvait un prisonnier endormi. Le mage emprunta un double des clés « au cas où ».
Être venu plus tôt avait été une merveilleuse idée, mais maintenant la facilité avec laquelle il pensait pouvoir opérer le surprenait. C’était trop simple.
Il pouvait même se servir en cuisine et se reposer en attendant le départ nocturne du navire.
Vers 3h30, alors qu’il était allongé dans l’endroit le plus discret qu’il avait trouvé (sous une chaloupe de secours), il entendit quelques mouvements qui le tirèrent de sa léthargie. C’était un groupe de marins qui transportait des caisses vers la cale. Goubkine en compta une bonne cinquantaine et en se déplaçant légèrement pour les observer, il fut rassuré de voir que leur accoutrement allaient de l’uniforme de marin régulier aux haillons de boucaniers. Il pourrait parfaitement s’incruster dans cette masse hétérogène. Pour l’instant, il décidait de ne pas se mettre à découvert. Une fois le navire en pleine mer, il ferait son apparition.
Après un court moment, il entendit les commandements de lever l’ancre et de larguer les amarres. Sans être un navigateur aguerri, il avait déterminé quel serait le meilleur moment pour surgir. Il vérifia que personne ne faisait attention puis sortit sur une allure naturelle et grimpa aux cordages aux moments où résonnait la commande : " Hissez les voiles !".
Il grimpa donc au mât sans éveiller trop de soupçon. Escalader ces cordes n’était pas aussi évident qu’au premier abord, mais heureusement elles étaient sèches donc il ne glissait pas. Le fait d’être en altitude n’était pas beaucoup plus facile pour les autres marins, qui ne prêtaient du coup aucune attention à lui, lui laissant le champ libre pour qu’il puisse les observer et déplier les voiles comme il le fallait. Quand ce fut fait, il monta jusqu’à la vigie, prétendant la relève. L’homme eut l’air surpris, mais ne broncha pas et céda sa place.
Goubkine put s’installer et profiter de l’obscurité que ne troublait pas la faible lune. Il était trop haut pour qu’on le reconnaisse, et en même temps on voyait qu’il y avait quelqu’un au poste, ainsi personne ne s’inquiétait. Un autre avantage était d’avoir une vue d’ensemble sur le navire. A la barre, le commandant corrigeait le cap de temps à autres, sans se faire aider. A présent que le voilier filait vers sa destination, il n’y avait pas besoin de beaucoup de manœuvres.
De son poste d'observation, il put voir, malgré l'obscurité, un navire de plus petite taille se rapprocher de l'Indocile. Quelques caisses qui avaient été embarquées à Harujion furent balancées par dessus bord, et d'autres furent transbordées. Le commandant observait l'opération de loin mais n'intervenait pas. Goubkine crut voir un haussement d'épaules de sa part. Le deuxième navire finit par repartir et l'équipage se dispersa à nouveau dans tout le navire. Quelques rires sonores résonnaient, comme ceux de malfrats se réjouissant d’un bon larcin.
Après environ une heure de trajet, l’île apparut à l’horizon. Telle qu’on lui avait décrite : il n’y avait rien sur les côtes, sûrement pour donner un air inhabité, renforcé par la présence d’une forêt luxuriante. De son observatoire, le mage pouvait cependant voir qu’au centre de l’île, un village vivait. Quelques lueurs et de la fumée indiquait la position. Un endroit n’existant pas officiellement. Goubkine ne l’annonça pas, ne connaissant pas le signal habituel. Crier « Terre en vue ! » lui semblait complètement désuet et il préféra s’abstenir. Et d’ailleurs, le commandant n’avait pas besoin d’indications. Le trajet avait duré une heure. C’était donc peu à l’échelle maritime, et il pouvait connaître la route par cœur. Quelques hommes montèrent pour réduire peu à peu la voilure. Le navire décèlera lentement pour finir par mouiller dans une petite crique, avec toute l’aisance et le savoir-faire d’un capitaine expérimenté.
Des matelots affrétèrent les chaloupes pour se rendre vers la plage, puis vers le village au centre de l’île.
Le bateau s’était pratiquement vidé de son équipage. Goubkine entreprit de quitter son poste à ce moment. Il descendit lentement par les cordages, et sauta pour atterrir en douceur sur le pont. A ce moment là, un homme avec une balafre au dessus de l’œil gauche l’interpella ; " Hey ! T’es qui toi ? "
Conservant son sang-froid, Goubkine s’arrêta sur la rambarde avant de plonger à l’eau, en prenant seulement le temps de répondre :
" je suis …
partis…" plouf . Il nagea vers la rive en sentant que l’homme le cherchait, mais dans cette obscurité, c’était peine perdue.
De nouveau sur la terre ferme, son élément, il se dirigea en suivant les bruits des marins, qui semblaient heureux de pouvoir faire un tour à la taverne du village – lieu propice aux « rencontres plaisantes ». D’ailleurs c’était à partir de cette taverne que la direction à suivre lui avait été expliquée. Il n’eut donc pas de difficulté pour trouver ce bruyant endroit. L’ensemble du village semblait avoir été construit de la même façon, à savoir anarchiquement. Des poutres dépassaient à certains endroits, des piliers étaient inclinés ou mal proportionnés; l’ensemble donnait une impression de total désordre.
Goubkine aurait été curieux d’entrer dans cette taverne, mais il n’avait pas de temps à perdre. Les indications étaient claires, et en les suivant à la lettre, il parvint à une demeure totalement différente. Difficile à estimer mais en pleine lumière la maison devait être blanche et la structure évoquait une sorte de temple.
Le mage entra sans frapper. La pièce où il était ressemblait à un hall, sauf qu’un gigantesque fauteuil de marbre en plein milieu occupait la majeure partie de l’espace ;
" Takami, je présume... "Le personnage avachi dans ledit fauteuil se leva sans un mot pour s’avancer et évaluer le nouvel arrivant. Il fit un tour complet autour de Goubkine qui ne broncha pas et l’examinait aussi. L’homme portait une blouse blanche s'apparentant à celle d'un chercheur ou un médecin, il portait de fines lunettes.
" Je viens de la part de Jo Satori "" Ouais je m’en doute, attends une minute "
Takami prit un escalier descendant et revint après quelques minutes, portant une petite boite en bois.
" Tout est là dedans, Jo connaît les instructions "
" Des précautions particulières à prendre ? " demanda Goubkine.
" Comment ? Il ne t’a rien dit ? "
Takami souleva le couvercle, dévoilant une poudre bleue.
" Eviter tout contact avec l’eau. Il y en a assez pour faire exploser tout le village. "
Des explosifs, c’était donc ce que le mage allait devoir transporter.
Cela ne lui posait pas de problème outre mesure, mais ça allait légèrement compliquer sa tâche puisqu’il ne pouvait plus s’infiltrer sur le navire de la même manière qu’à Harujion.
Il remercia Takami, puis reprit la route vers le bateau sans perdre de temps, portant son colis avec précaution. Il regrettait un peu de ne pas pouvoir passer plus de temps ici, et y trouver des gens plus intéressants que ce qu’il avait trouvé à Harujion. Ne serait-ce que ce Takami semblait avoir quelques ressources. Une communauté qui s’était formée à l’écart de la société devait regorger de personnes hors du commun. Les barrières de la société civile n’avaient pas lieu d’être ici. Il se dit qu’à son tour il devrait rejoindre ou former une communauté alternative dans ce genre.
Retrouver le voilier ne fut pas plus difficile que de trouver le village. On voyait l’imposante forme se dessiner de loin.
Goubkine prit une des chaloupes laissées sur la plage. Mais avant de retourner à bord, il prit soin de la charger de quelques pierres trouvées en route. Il prit ensuite les rames pour rejoindre lentement le navire. Arrivé bien plus tôt que n’étaient prévus les matelots, il avait déjà attiré l’attention de 2 hommes à bord.
Quand il fut à une dizaine de mètres du voilier, il se mit face aux deux hommes interloqués. Le mage attrapa la plus grande roche qu’il avait trouvée – une belle pièce de 30 cm de diamètre et pesant son poids.
« Rock Shoot »Il lança le projectile en s’aidant de sa magie. La roche fusa vers un des marins et le heurta en pleine poitrine, le projetant un arrière de trois bons mètres et le faisant s'écraser dans un râle pathétique. Son équipier dégaina aussitôt un sabre courbé et fit mine d’attendre que le mage arrive à bord. Voyant que Goubkine ne bougeait pas, il le questionna :
" T’es qui et qu’est-ce tu veux ? "
A la voix, Goubkine avait reconnu le même balafré qui l’avait remarqué en descendant du mât. L’éliminer ferait d’une pierre deux coup, même si être discret serait de toute façon difficile. L’homme qu’il avait attaqué en premier ne réapparaissait pas. Ne voyant pas de la chaloupe où il était, le mage supposa qu’il était k.o. Par contre, deux autres marins vinrent se joindre à lui, qui eux aussi dégainèrent leurs sabres. Goubkine estima que se rendre sur le pont maintenant le mettrait dans une position de faiblesse pendant la transition. Il fallait donc que l’homme le rejoigne dans la chaloupe. Vu son attitude, Goubkine opta pour une banale provocation.
" Hey, tu serais pas le crétin qui s’est fait cocu ? "C’était simple et assez large pour toucher n’importe quel marin. L’effet fut immédiat, l’homme jura et l’enjoignait de monter pour lui régler son compte. Goubkine se contenta d’un rire sonore et provoquant. Le balafré n’en toléra pas plus et sauta directement vers la chaloupe. Le mage n’en demandait pas tant. Il lui envoya l’extrémité d’une des rames en pleine tête. Le marin ne pouvait pas éviter le coup et le reçut de plein fouet. Tombant à l’eau, un deuxième coup vint l’achever.
Il en restait encore (au moins) deux à bord, et ils n’avaient pas envie de subir le même traitement que leur camarade. Et Goubkine ne pouvait pas attendre que le reste de l’équipage revienne.
« Stone Rain »Le mage utilisa toutes les pierres dans la barque pour pilonner les deux matelots et se couvrir pendant qu’il sautait à bord, la boite dans la main droite et la rame dans la gauche. Il n’avait pas cherché à vraiment les blesser, cependant il sentait que son énergie en avait pris un coup. Mais au moins il était à bord et n’avait pas encaissé le moindre coup. Et puis toutes les pierres étaient venues avec lui…
La seule chose qui l’inquiétait était le transport d’explosif ; il déposa donc la boite au sol en maintenant ses adversaires à distance avec la rame.
C’était une arme peu conventionnelle, et peu dangereuse, mais il avait largement une meilleure allonge pour parer leurs coups.
A présent, les deux guerriers hésitaient à lancer une attaque simultanée. Avoir à faire à un mage n’était pas leur quotidien. Le mage, lui, faisait attention à ne pas en avoir un dans le dos.
Ils s’élancèrent à deux mais sans avoir défini de plan. Goubkine avait au contraire anticipé le comportement à avoir dans cette situation, et s’écarta rapidement sur la droite en donnant un puissant coup avec son arme improvisée dans les pieds du marin plus proche qui trébucha et s’étala par de tout son long. Il n’eut pas le temps de se relever qu’un autre coup à la tête venait l’achever.
Mais le moment pendant lequel Goubkine focalisait son attention pour l’achever avait créé une ouverture au deuxième, qui gratifia le mage d’une longue estafilade au bras gauche. A vouloir trop économiser ses réserves, il venait d’en payer le prix. Sans être profonde, la blessure saignait.
Il décida alors de ne plus perdre de temps, et actionna son pouvoir pour faire léviter la grande pierre qu’il avait utilisé comme projectile en premier. Le marin, dos à elle, ne la voyait pas. Un coup dans l’arrière du crâne assomma le dernier combattant. Le souffle encore haletant après cette débauche d'énergie, il s’assura qu’ils étaient tous morts et banda sa plaie en arrachant un bout de tissu de sa chemise – c’était peu élégant mais ça devait faire l’affaire.
Grâce à sa première exploration, il savait où il voulait aller mais cette fois il risquait de croiser du monde.
En premier lieu, il visita les cuisines. Pas un chat ; l’équipage n’avait pas besoin de grande collation pour un tel trajet et avait préféré ce restaurer au village. Le mage trouva le tonneau rempli de noix et dissimula la boite au fond. A moins de vraiment savoir qu’elle y était, personne ne la trouverait.
Il remplit aussi une gourde d’alcool – un rhum de piètre qualité – et revint sur le pont. Il jeta ensuite les roches à la mer pour faire disparaître les preuves, et imbiba ses défunts adversaires d’alcool et leur ajouta des blessures de sabre pour faire croire à une dispute entre ivrognes.
Il se rendit ensuite vers la cellule.
L'homme qu'il avait vu enfermé y était toujours. Goubkine en ignorait la raison, et s’en fichait. Il ouvrit la cellule avec le double des clés qu’il avait emprunté lors de sa visite nocturne, réveilla l’homme en lui disant de se sauver. Le détenu maugréa mais se rendit vite compte que la cellule était ouverte et qu’on l’invitait à partir.
Goubkine lui conseilla seulement d’être discret pendant son évasion. Quand le détenu disparut, le mage prit sa place dans la cellule sans verrouiller la porte, avec toujours un double des clés en poche, et s’allongea en attendant de voir si quelqu’un remarquerait le changement.
Il attendit un long moment, jusqu’à perdre la notion du temps, avant de sentir le bateau se déplacer. Personne ne se préoccupa de lui jusqu’à ce que ce soit le commandant en personne qui vienne le voir.
" Qui êtes vous et que faîtes vous à la place du criminel qui était détenu ici ? "
Le mage avait eu largement assez de temps pour préparer une histoire plausible. Il parla donc avec facilité, même s’il feignait la crainte.
" J’ai tenté de m’introduire à bord du navire dans la crique. Vos hommes ne m’en ont pas laissé le loisir et m’ont enfermé ici avec le détenu. Mais au moment où ils m’enfermaient, un combat s’est engagé entre ce détenu et… " Il marqua un temps d’arrêt, faisant semblant d’hésiter et mima seulement la balafre au dessus de l’œil, ce à quoi le commandant acquiesça brièvement. Goubkine reprit :
" Pendant le combat, j’ai préféré ne pas m’interposer. Je ne suis pas un guerrier vous savez. D’ailleurs je n’ai même pas d’arme et n’en ai jamais eu, ce qui ne m’a pas empêché de recevoir un coup. " Il montra son bandage rudimentaire.
"Et je suis revenu ici jusqu’à ce que quelqu’un vienne. Au moins j’y suis en sécurité, même si la serrure n’est pas fermée. " Le commandant vérifia avec une pointe d’étonnement et enchaina aussitôt.
" Mais pourquoi étiez-vous monté ? "
" Hum…c’est une longue histoire, mais pour faire court, je veux juste rentrer à Harujion. Et je ne veux de mal à personne "Goubkine sentait la pitié et la faiblesse s’installer dans le cœur du commandant. Il avait eut le loisir de l’observer et de l’étudier pendant l’aller, et avait plus ou moins cerné le personnage : un homme foncièrement bon, qui acceptait pourtant que divers trafics aient lieu à son bord. En présentant sa cause comme étant juste, on devait lui faire avaler n’importe quoi.
Sans même attendre qu’il le demande, le commandant l’incita à sortir de la cellule ce à quoi il résista un moment prétendant vouloir être en sécurité. Puis il l’accompagna finalement jusqu’au pont, pour qu’on ne le considère plus comme un intrus. Goubkine demanda innocemment s’il y avait une cuisine à bord. Le capitaine ne put l’accompagner, mais lui indiqua la direction, et donna son nom pour faciliter le contact avec l’équipage : le commandant Ohta-San.
Cependant, le mage trouvait louche qu’on lui fasse confiance aussi rapidement. Il avait du mal à croire qu'il ne fasse pas plus de remarques sur sa blessure. C’était peut-être dans la nature du commandant, mais il resta sur ses gardes.
Le mage alla donc se restaurer. En cuisine, quelques matelots se reposaient entre deux manœuvres, et le virent arriver d’un œil méfiant. Donner le nom du commandant effaça en grande partie leurs doutes, et Goubkine put manger tranquillement, et même discuter avec eux de l’île où ils s’étaient arrêtés. Sans révéler son manque d’information, il apprit ainsi son nom et sa location ; si l’envie de revenir le prenait…
Un des marins affirma qu’ils arriveraient dans une demi-heure ; Goubkine attendit environ 5 minutes et alla se préparer un encas pour la route. Il prit une sacoche vide et alla se servir des nombreux produits de la cuisine. Personne ne s’en étonna jusqu’à ce qu’ils le virent enfoncer son bras en entier dans le tonneau de noix. Il passa discrètement la boite dans la sacoche avant de ressortir la main avec une noix tout à fait banale sur laquelle il s’extasia pour justifier sa recherche :
"Celle-ci sera parfaite !!!" Les marins échangèrent un regard lourd de sens – il est taré non ? - mais ils n’insistèrent pas.
La boite parfaitement dissimulée dans la sacoche, Goubkine retourna discuter avec eux, jusqu’à ce que le navire atteigne Harujion.
Pendant la discussion, un des matelots allaient aborder le sujet des marchandises illégales transbordées pendant la nuit, mais ses acolytes le retinrent, ne voulant pas dévoiler d’informations à un inconnu. Sentant le gêne s’installer, Goubkine déclara qu’il savait de toute façon ce qui se passait à bord, et n’en avait cure, mais qu’ils feraient bien de garder le silence à ce sujet.
Il se permit d’aller saluer le commandant et retourna à terre sans que personne ne lui pose de question.
Il devait rejoindre Satori dans un hangar désaffecté à l’aube. Ayant du temps devant lui mais n’ayant pas l’intention de dormir, il arpenta les rues de la ville endormie. La mission avait été facile, comme prévue. Le souvenir de Ragomechi le laissait songeur. En déambulant un peu au hasard des rues, il ne cessait d’y penser. Un désir de liberté encore plus fort qu’avant avait jailli dans son esprit. Il voulait lui aussi faire partie d’une communauté libre…
A l’heure du rendez-vous, Goubkine retrouva le commanditaire à l’endroit désigné. Jo Satori s’y trouvait accompagné des trois mêmes gaillards que lors de la première rencontre. Celui qu’il avait affronté avait une joue enflée et grossièrement embandagée, ce qui lui fit éprouver un sentiment de satisfaction (qu’il dissimula à peine). Goubkine ouvrit la sacoche pour en sortir la boite et la tendit au trafiquant.
" Takami a dit que vous connaissiez les instructions d’usage. "" Ouais. " il vérifia le contenu de la boite.
" Marco, file lui la récompense "
Goubkine tendit la sacoche dans laquelle un des sbires versa une belle quantité de jewels.
"C'est un plaisir de faire affaire. Je vais au Mordant Fief les jeudis soir… je parlerai de toi à des gens utiles."
Sur cette idée pleine de perspectives, ils se séparèrent.